Un été entre amis -23-

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Arnaud

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J'avais peur du retour. Vraiment. J'ai attendu que ma tête tourne, que le roulis des vagues fassent remonter mon repas et que je termine aux toilettes en courant. Maintenant que je savais où elles étaient, je n'avais plus besoin de personne pour admirer ma déchéance. Et pourtant, rien n'est venu. Je n'ai pas eu de remontée acide. Pas de tournis. Et j'ai pu profiter à fond. Tout ce que j'avais manqué lors de l'aller, je l'ai vu au retour. Passant de bâbord, à tribord, de poupe en proue sans jamais m'arrêter. J'étais à l'image des gamins qui faisaient la même chose, savourant les embruns et le vent frais. Je n'avais pas le mal de mer et j'étais ravi.

J'ai passé mon temps à appeler Vinza, me sentant obliger de partager avec lui tout ce qu'il avait pu manquer en s'occupant de moi. Le malade. Je savais parfaitement que parfois, je le soulais. Soyons honnête. Avoir quelqu'un qui t'appelle toutes les deux minutes pour venir voir un pan de falaise bouffé par l'érosion, y a plus sympa, mais il venait quand même. C'est Vinza. J'ai remarqué qu'il me refusait rarement quelque chose. Du coup, j'ai joué mon gamin capricieux. De temps en temps, ça fait pas de mal. Mais je voulais m'amuser. Et sans mon meilleur ami, ça n'avait pas beaucoup de sens.

Quand on est arrivé, Naïs ne cessait de me regarder comme une mère satisfaite que son enfant se soit bien dépensé. Et quand je me suis posée dans la voiture, je me suis sentie partir. Saundra est montée avec nous et nous sommes restés longtemps silencieux avant qu'une discussion calme débute sur un sujet d'actualité qui passait à la radio. Dire que j'ai vraiment écouté serait un euphémisme. Je les ai laissé parler, glissant quelques mots de temps en temps pour participer mais c'est tout.

En sortant de la voiture, Benjamin se rue sur nous, l'air désespéré.

-Sauvez-moi. Pitié !

- Rooo, ne fait pas ton pauvre petit malheureux.

Carmen lui assène une grande tape dans le dos en riant. Si y en a une qui n'est pas fatiguée, c'est bien notre hispanique.

- Que lui avez-vous fait ? je demande.

Pour que Benjamin soit dans cet état, c'est qu'il a dû subir quelque chose à l'intérieur. Mais quoi ?

- Mais rien. On a parlé de ce que nous allions faire à manger.

Euh, si c'est tout, je ne comprends. Mais quand je pose mon regard sur Vinza pour voir si lui il a compris, j'ai l'impression que c'est le cas.

- Je sens que je ne vais pas manger ce soir.

Naïs le rejoint en souriant et lui attrape le bras, se mettant sur la pointe des pieds pour déposer un baiser sur sa joue.

- Allons. Je suis sûre que tu ne diras pas ça quand la bonne odeur de cuisine se répandra dans le bungalow.

- Alors c'est chez-vous le repas ?

Saundra sourit et rejoint Carmen. Une petite lumière s'allume dans ma tête, je crois que je commence à comprendre.

- Oui.

Benjamin n'a vraiment pas l'air enthousiaste.

- C'est chez-nous que l'on va ouvrir les crustacés, les cuisiner, les assaisonner et surtout, garder l'odeur d'iode et de poisson toute la nuit, si ce n'est plus.

Qu'est-ce que je le comprends. Après tout, on a échangé là-dessus dans la voiture avant d'arriver. Saundra et Vinza espéraient de tout cœur que ce ne soit pas chez-nous. Saundra avait même émit la théorie que ce serait chez les deux hommes du groupe. Nous quoi. On en a frémi rien qu'à l'idée d'un champ de bataille de vaisselle, de l'odeur... et j'en passe.

Un été entre amisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant