Un été entre amis -33-

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Arnaud

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Je me sens comme un morceau de cristal qu'on aurait enveloppé dans du coton. Je ne veux pas ouvrir les yeux de peur de ce que je vais trouver. J'ai dormi, je le sais, mais mon cerveau n'a pas l'impression d'avoir pu se reposer. J'ai cauchemardé une bonne partie de la nuit, ou du moins, de celle où j'ai dormi. Je sais que Naïs est restée près de moi et que Benjamin a pris son mal en patience dans le salon. Je suis tellement désolé pour ma meilleure amie. Mais je ne savais pas où aller. Si j'étais rentré au bungalow, Vinza m'aurait suivi et je ne sais pas comment ça se serait terminé. Sûrement avec des larmes et des paroles déplacées. Retrouver ma meilleure amie, ma confidente a été la seule pensée logique qui m'ait traversée en rentrant dans le camping.

J'entends d'ailleurs encore la pluie qui tombe. La journée est fichue. Totalement.

— Arnaud.

La voix douce de Naïs me fait sortir de ma torpeur.

— Arnaud. Il va falloir que tu manges. Je crois que tu as bu beaucoup hier soir.

Oui j'ai bu. Trop. Quand j'y repense. Je ne me reconnais pas. Jamais le Arnaud parisien ne serait allé dans ce genre d'endroit. Jamais le Arnaud d'avant les vacances ne serait resté. Jamais le Arnaud que je suis au fond de moi n'aurait dit oui.

— Est-ce que ça va ?

J'ouvre les yeux. Je ne veux pas faire paniquer Naïs. Elle me sourit mais je sens que ce n'est qu'une façade. Son regard est empli d'inquiétude.

— Oui.

Ma bouche est pâteuse et j'ai soif. Comme si elle était connectée à mon pauvre cerveau, elle me tend un verre d'eau fraîche. Je me redresse et savoure le liquide qui glisse dans ma gorge asséchée.

— C'est mieux ?

Je hoche la tête mais je ne veux pas parler. Je sens les larmes monter et Naïs me tire contre elle.

— Oh Arnaud, je ne sais pas ce qui s'est passé, mais je suis tellement désolée.

Je laisse les larmes couler silencieusement. Hier soir, j'étais en colère, mais là, je suis presque soulagé. Mon cerveau a cogité toute la nuit et maintenant, il semble mettre tout en place. Et mon corps se relâche.

Des années que j'aime Vinza, des années que je fais tout pour le lui cacher parce que je sais que l'idée de coucher avec un mec ne l'intéresse pas. Il n'est pas gay. Des années que je vis avec lui, que je refoule mes sentiments. Et là, bam, comme un revers bien placé, je viens de me prendre des années de certitudes dans la figure.

Je sais qu'il était bourré, plus que bourré même. Je connais les différents stades de cuite de Vinza. Mais jamais, jamais il n'avait été jusque-là. En fait, je ne peux même pas dire jamais. Si ça se trouve, ce n'est pas la première fois qu'il s'envoi en l'air avec un mec. Si ça se trouve, tout le monde savait qu'il avait déjà baisé des mecs, sauf moi.

Mais qu'est-ce que je suis con de m'être ainsi voilé la face. Adieu les bisounours, bonjour la réalité.

— Benjamin n'est pas là. Tu veux aller prendre une douche ?

Je me détache de son corps rassurant et marmonne un oui à peine audible. Elle me traîne jusqu'à la salle de bain et me montre une pile de vêtement.

— Benjamin a été les chercher.

Benjamin a été voir Vinza. Je chasse cette pensée et me glisse dans la cabine sans même faire attention si Naïs est sortie. Je laisse le jet d'eau chaude me réchauffer puis je me savonne tel un automate sans penser à rien d'autres qu'à me récurer. Je veux chasser tout souvenir de cette nuit horrible. Lorsque je sors, habillé, les cheveux encore humide, Naïs m'accueille avec un plat de pâte.

Un été entre amisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant