Je l'ai revu le vendredi suivant. Et le vendredi d'après. Nos rendez-vous ont été bref, mais je m'en suis contenté. Jusqu'à la dernière fois.À notre seconde entrevue, elle portait une robe-pull verte moulante. Je m'en souviens parfaitement, car je profitais de chaque seconde où elle baissait les yeux pour reluquer ses formes. J'ai appris ce soir-là qu'elle était arrivé seulement cette année car son père avait voulu déménager pour le boulot. Elle avait suivi ses parents car elle n'avait pas d'attaches, pas d'amis. Et j'ai commencé à comprendre que c'était son truc. Elle m'a dit qu'elle était là depuis le début de l'année, mais qu'elle suivait surtout des cours de photographie. Je me suis senti rassuré en entendant cela, car je ne l'avais pas vu avant ce soir-là au restaurant. Et je n'arrive pas à me dire que j'ai pu passer à côté d'une créature pareille sans la voir réellement.
J'en ai donc appris plus sur elle, je sais qu'elle est fille unique, qu'elle n'a plus que ses parents pour famille car son père ne parle plus à ses frères depuis son enfance. Elle m'a ensuite posé des questions et la seule chose que je voulais répondre était que je voulais tous savoir d'elle, parler de moi me semblait de faible importance. Pourtant j'ai du me résoudre à jouer le jeu moi aussi. Au moment de partir, la semaine dernière, j'ai pourtant du être honnête avec elle. Être honnête avec moi-même. Ses rendez-vous furtifs à la Roméo et Juliette n'étaient pas assez. J'en voulais tellement plus, plus de détails sur sa personnalité, plus de complicité avec elle. Même si elle ne veux qu'un ami, je ne me contenterai plus de ses quelques minutes à la volée. La seule réponse qu'elle m'a donné est "je vais y réfléchir". J'ai du me contenter de ça, évidemment. Elle sème des graines et je les attrape aussitôt en patientant calmement.
Nous arrivons beaucoup trop lentement au vendredi soir, et je suis surpris lorsque je la vois assise seule à sa table habituelle. Elle est plus apprêtée encore qu'à son habitude. Elle porte une robe noire en dentelle à manches longues et ses cheveux sont coiffés sur le côté avec des boucles. Ses lèvres sont rouges sang et elle illumine la pièce autour de tout ses gens si ternes. Elle est comme une flamme, incandescente, brûlant tous sur son passage. Moi y compris.
Une demi-heure passe, j'ai commencé ma partie, j'ai bu ma première bière, elle se ressert un verre de vin blanc sans relever les yeux vers moi. Je la vois porter ses yeux vers son téléphone avant qu'elle ne décroche. Elle semble d'abord soulagée par cet appel, puis son regard devient triste, comme si elle venait d'apprendre une mauvaise nouvelle.
Elle raccroche et repose son téléphone sur la table en affaissant ses épaules. Elle ne semble plus aussi parfaite qu'il y a un instant, elle me paraît à bout, presque anéanti de tenir un rôle créé de toute pièce. Elle lève la main pour appeler le serveur et il hoche la tête lorsqu'elle fait sa demande. Je me demande si elle va dîner seule, et cette idée me peine jusqu'à ce que l'homme lui apporte l'addition. L'idée de la voir partir sans me parler m'énerve et me blesse. Comme si elle avait signé un contrat et qu'elle s'apprêtait à déroger à l'une des règles. Elle tourne la tête vers la porte puis vers moi, comme si elle cherchait une réponse à sa question silencieuse. Je la regarde en mettant toute mon âme dans mon regard, espérant qu'elle comprendra que je ne veux pas qu'elle parte.
Comme si elle avait saisi mon message intérieur elle se lève en laissant un billet sur l'addition et se dirige vers notre porte.
- À toute, lance Jack en sachant déjà que je m'apprête à partir.
Je la suis sur le toit une fois de plus, et je la retrouve debout en plein milieu du toit, tournée vers moi. Son sac est jeté par terre et elle a mis son manteau.
- Salut, dis-je en m'approchant d'elle.
- Salut Evan... Sa voix se brise comme si elle allait pleurer mais je ne vois aucune larme, ni sur ses joues ni dans ses yeux.
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Sur ses lèvres
Roman d'amour"Elle m'a tenté, elle m'a envouté, elle m'a poussé à aller plus loin que je ne l'avais jamais été. J'en suis tombé amoureux, aussi rapidement qu'on puisse le faire, sans que je ne puisse rien contrôler. Et je lui en ai voulu. Je lui en ai voulu de m...