Chapitre 1

303 17 3
                                    

Mai 2016, Post-Inhumaine.

Comme d'habitude, les bruits de la rue m'avaient réveillé, avant même que ça ne soit mon portable qui le fasse. La fenêtre entrouverte laissait passer un courant d'air frais et le bruit ambiant du centre-ville, avec son lot de voisins sans aucun respect qui klaxonnaient et faisaient hurler leurs moteurs. Je relevai la tête de mon oreiller et saisis mon portable pour y regarder les notifications que j'ai accumulé pendant que je dormais. Il était dix heures du matin, un jour de printemps, énième jour de routine depuis dix mois.

La levée du corps était faite, comme disait mon ancien beau-père, mais non sans difficulté. Aller se coucher aux environs de cinq heures du matin, toutes les nuits, pour se lever plus ou moins de force à une heure précise le matin, de préférence "tôt", ça finissait par peser très sérieusement, autant physiquement que moralement. Ce n'était pas faute d'essayer de dormir plus tôt, régulièrement, mais ça n'aboutissait jamais. Même lorsque je fatiguais, je ne trouvais pas le sommeil avant un bon moment. Je me contentais de me rappeler que ce sommeil archaïque était bien pire au début, parsemé de nuits blanches et de déphasage complet, et que ça ne durerait pas éternellement. Ce n'était pas la chose la plus importante à ce moment-là.

Vendredi 13 mai. En voilà une drôle de journée qui s'annonçait, n'est ce pas ? Le genre de date que je peinais à oublier tant le treize du mois avait une signification particulière. Heureusement, l'aube du week-end me sortait un peu de ma routine, car il était prévu de le passer chez Blake, en compagnie de notre bande, ceux avec qui nous étions encore en contact depuis la fin du lycée. Il était fréquent que l'on se retrouve tous là-bas, une habitude depuis la remise des diplômes en deux mille quatorze. Blake habitait à une vingtaine de kilomètres de chez moi, dans une ville perdue entre deux montagnes, où ma vie de lycéen a commencée, lorsqu'elle a vraiment prit du sens et m'a amené à ce que je vis maintenant.

Je préparai soigneusement mon sac, y rangeant entre autres des affaires de rechange, mon ordinateur portable, et pourquoi pas une petite bouteille de whisky dont on ne connais que trop bien l'utilité.

En quittant mon appartement, je pris soin de ne pas oublier mes écouteurs dans la panoplie d'affaires que j'emmenais avec moi chez Blake. Grand passionné de musique, j'avais du mal à faire sans, depuis un bon paquet d'années maintenant. Certaines musiques rappellent des souvenirs, des moments clés de certains événements ou périodes passées, quand bien même la musique en général est un moteur pour le moral et l'humeur.

J'avais accumulé un certain nombre de titres qui ne se ressemblaient pas, qui n'étaient pas du tout des mêmes styles musicaux, mais qui avaient pourtant un sens lorsque je les écoutais. Cela passait de Three Days Grace à du Thirty Seconds to Mars, des titres d'artistes éparses comme Cruskin ou encore Nothing But Thieves, mêlés à la variété de musiques électro ou pop. Il y en avait pour tout les goûts. Je lançai Spotify sur mon portable, mis mes écouteurs et me dirigeai vers la sortie de mon immeuble, portant mon sac à dos comme si je retournais en cours.

Il était presque midi et, au lieu de m'apprêter à manger comme la plupart des gens normaux, je me dirigeais vers la gare pour prendre un bus qui m'amènerai à bon port. Le soleil tapait de toutes ses forces, comme un jour de brûlant été, bien avant l'heure. Derrière mes lunettes de soleil, en marchant au rythme des titres qui défilent dans mes oreilles, je pensais au week-end qui s'amoncellait, à ce que j'allais faire une fois que mon bus m'aurait amené à destination.
Le topo habituel. 

Je sortirais de ce bus, marcherais jusqu'à chez Blake. Il m'ouvrirait la porte avec son regard empli du foutage de gueule qui lui est caractéristique, faisant mime de me fermer la porte au nez en me disant "C'était sympa, à la semaine prochaine", ce à quoi je lui dirais d'aller se faire voir, dans la joie et la bonne humeur évidemment, puisqu'il s'agit d'un délire entre meilleurs amis, ou plutôt entre meilleurs amis bizarres et cons comme leurs genoux.

Back & Beyond - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant