Back & Beyond - Tome 1

Épilogue

Fin août 2014, Ancien Monde, Dimension Modifiée.

"Quelle pluie ! Mais quelle averse !
—Comme on dit chez nous, il tombe des arbres.
—Et oui!"

Je me repassai en boucle cette séquence hautement étrange de deux commentateurs sportifs lors des 24 Heures du Mans, diffusés sur Eurosport, à la mi-juin. Le caractère drôlissime et inopiné de ce passage m'avait poussé à en faire une vidéo sur YouTube, sobrement appelée "Les 24 Heures du Troll", illustrant un arbre qui tombe sur une voiture après l'intervention des commentateurs sportifs.

Pourquoi je vous parle de cette chose complètement étrange ? Pour la simple et bonne raison qu'à l'inverse du monde d'où je viens, cette vidéo faisait un carton. Quelques centaines de milliers de vues en l'espace de deux mois. Cela aidait grandement à propulser mes autres vidéos, notamment celles de mes compositions musicales.

Mais pour l'heure, cette pseudo notoriété grandissante, à laquelle je ne croyais pas une seconde, était bien faible comparé à la situation dans laquelle je me trouvais. Nous arrivions à la fin des vacances d'été, deux mois relativement courts qui ne furent pas de tout repos.

Aucune nouvelles de Keannon depuis le week-end des Portes Ouvertes des Arts Graphiques, jour où il m'apprit que les rêves ne sont pas forcément infondés, jour où il m'apprit qu'un événement épouvantable s'était produit dans la Dimension Réelle, que j'avais rêvé, et dont Charlye n'était pas sortie vivante. Cinq bons mois sans nouvelle de lui, livré à moi-même dans une spirale infernale, que dis-je, une véritable réaction en chaîne.

Hormis quelques rares publications sur Facebook, je n'avais pas de nouvelles de mon paternel. Malgré le froid sidéral instauré entre nous depuis début juin, nous étions encore "amis" sur ce réseau social. L'occasion de glisser des messages subliminaux quand bon me semblait. Tout allait bien de son côté, comme avant. Il se complaisait dans sa petite vie avec sa femme et SON fils, le seul, l'unique. Impossible de savoir si mon pétage de plombs, ce soir-là, avait pu le blesser. En tout cas, voir sa petite vie loin de nous me brisait constamment le cœur.

Comme mes problèmes n'étaient jamais seuls, comme s'ils avaient besoin d'être accompagnés tels des mômes à un séance de cinéma restreinte aux moins de douze ans, ma relation avec Charlye ne s'améliorait pas vraiment. Nous approchions du cycle fatidique de Septembre-Novembre 2014, ce monstrueux compte à rebours qui avait irrémédiablement changé ma vie.

A l'instar de la Dimension Réelle, en dépit de quelques différences notables, je ne vis Charlye qu'occasionnellement. Un contraste béant avec l'été passé, en deux mille treize, pendant lequel nous ne pûmes nous passer de l'un et l'autre.

L'été deux mille quatorze avait été propice à un grand questionnement de ma part à propos de la relation que j'entretenais avec Charlye, dans la Dimension Réelle. Cette fois-ci, nul remise en question. Je restais celui que j'étais depuis ma Transportation, conscient que quelque chose n'allait pas et que notre fin allait se produire tôt ou tard.

Cette relation passait du froid au chaud, selon nos humeurs et nos activités. Il était difficile de pouvoir rester plusieurs jours dans une situation de calme sans que ça ne reparte. Si certains moments lui suffisaient pour se sentir bien et montrer un peu de normalité de sa part, Charlye pouvait cependant changer de comportement lorsqu'elle se sentait lassée, ce qui arriva fréquemment. Je ne pouvais lui remettre la faute sur elle entièrement, il était clair que j'y étais également pour quelque chose.

Il fut terrible pour moi de constater les similitudes flagrantes de son comportement envers moi, entre la Dimension Réelle et la Dimension Modifiée. Tout cela me faisait paniquer. Quid de cette grande discussion que nous avions eu quelques temps après ma Transportation, celle-là même que je souhaitais entreprendre justement au moment précis de notre rupture ? Quid de l'amélioration de nos liens au fil du temps ?