Back & Beyond - Tome 1

Chapitre 11

Début février 2014, Ancien Monde, Dimension Modifiée.

"Qui d'entre vous n'a pas encore de stage ?"

La moitié de la classe leva la main, Rob, Carine, Blake et moi compris. Nous étions en cours de Mathématiques. Le professeur de cette matière était également notre professeur principal.

"Il va falloir commencer à vous bouger, ajouta-t-il. C'est peut-être en mars, mais mars, ça approche à grands pas ! Faut pas attendre la dernière minute pour se bouger, je vous rappelle que si vous n'avez pas vos vingt-deux semaines de période en milieu professionnel, votre bac vous pouvez tirer un trait dessus !"

Le prof nous sermonnait, comme tous ses collègues, d'ailleurs. Ils avaient bien raison. Trouver un stage était un exercice compliqué pour beaucoup d'entre nous. Il fallait avoir la motivation. Ce que bon nombre d'entre nous ne possédaient pas. C'était remarquable dès le premier coup d'œil lorsque l'on observait attentivement les trois ou quatre mecs qui dormaient au fond de la classe, et quelques autres qui vaquaient à des occupations absolument pas en rapport avec les cours.

J'étais de ce genre là. Non pas que je n'étais absolument pas motivé, même s'il y avait de ça. Ma phobie du contact prenait toujours le dessus. J'avais horreur de prendre le téléphone pour prospecter. Ce n'était pas mieux de me déplacer directement sur place. Une sorte de grande timidité qui me bloquait et me rendait affreusement nerveux. Aux yeux de mes professeurs et de mes parents, je passais simplement pour le gros flemmard de service qui ne voulait rien faire. Même si cette phobie n'avait pas totalement disparue avec le temps dans la Dimension Réelle, j'en avais suffisamment appris pour ne plus être aussi fébrile quand je devais prendre le téléphone ou me rendre quelque part.

Quelques semaines s'étaient écoulées depuis la Transportation et mon retour au lycée. Même si ce retour dans le passé n'était pas facile à vivre, je finissais tout de même à m'y incorporer. Mon quotidien de lycéen a continué à défiler, telle une rediffusion d'un programme. Je retrouvais globalement les mêmes péripéties que dans la Dimension Réelle. A quelques détails près.

J'avais beau m'incorporer, je n'arrivais pas à détacher de Blake le soupçon que quelque chose avait changé. Nous étions meilleurs amis, mais nous ne parlions plus beaucoup de nos histoires depuis ce fameux week-end de janvier. Il l'avait bien évidemment remarqué. Tout comme ma décision de dormir moins souvent chez lui. En effet, je rentrais désormais chez moi presque tous les soirs, à l'inverse de ce que je faisais dans la Dimension Réelle. Le sentait-il comme un éloignement de ma part ? Je ne savais pas trop. Blake était fort pour regarder les choses se passer sans pour autant dire clairement quand quelque chose l'ennuyait. Evidemment, inutile de préciser que sur ce coup là, nous étions un peu le plus et le moins. Nous gardions tout de même intacte notre entente et nos délires, comme au bon vieux temps, comme d'habitude. Cependant, je constatais bien qu'il cogitait sur mon cas.

Charlye se posait également des questions sur mon cas. En quelques semaines, elle remarqua mon changement comportemental dû aux événements de la Dimension Réelle. Le Logan trop sentimental, trop dévoué et monstrueusement envahissant laissait place à un Logan bien plus relâché. Je sentais de jour en jour mes sentiments grandir pour elle, en dépit de ce que j'avais vécu avec elle dans la Dimension Réelle. Jadis, je me mordais les doigts de n'avoir pas compris plus tôt ce qui posait problème chez moi pour qu'elle finisse par se détacher et me quitter de la sorte. Au lendemain du 11 Novembre, je pensais qu'il était trop tard pour faire machine arrière. Ce retour dans le passé m'a démontré l'inverse.

Bien-sûr, je n'avais pas oublié toutes ses frasques, toutes les histoires qui m'avaient mené à devenir si envahissant et protecteur envers elle. Il est difficile d'oublier quand quelqu'un nous trompe, encore plus lorsqu'il s'agit de notre premier grand amour. Cependant, je savais qu'à la période où je me trouvais, début deux mille quatorze, Charlye exprimait mieux que jamais l'amour qu'elle me portait. Il était véritable. Tout comme ses regrets quant à Octobre 2013. Je n'avais su profiter et regarder en face toutes les preuves d'amour qu'elle me faisait, dans la Dimension Réelle. Je n'étais porté que sur ses fautes, et sur la peur que cela se reproduise. N'était-ce pas légitime ? Pour moi, si.