Fragment trente-cinq.

486 21 0
                                    

Joan avait peur. Le carnet de Harry était composé de tous les morceaux de son âme et son contenu l'inquiétait. Elle avait découvert un Harry plus doux et authentique au cours de ces trois semaines passées avec lui. Un homme brisé, follement amoureux d'une femme qui l'avait littéralement changé. Métamorphosé. Elle appréciait cet Harry là. Elle aimait leurs discussions sur la peinture, sur les esquisses de la jeune artiste et leurs conversations nocturnes qui retraçaient certains épisodes de leur vie. Surtout sur Niall, d'ailleurs. Leur amour pour l'irlandais était la seule véritable chose qu'ils avaient en commun. Mais malgré leurs nombreuses différences, ils avaient appris à se connaître, à se respecter et même à s'apprécier. Ils ne deviendraient pas amis mais un lien spécial s'était tissé entre eux. A travers leurs dialogues. A travers leurs silences. Et pas un seul instant Joan aurait pensé avoir peur du brun. Et pourtant. La confiance qu'avait donnée Harry à Joan avait tout changé. La jeune femme avait été flattée de voir que le chanteur pouvait se livrer à elle et que, lorsqu'il n'y arrivait pas, il y mettait sur papier pour être certain qu'elle le comprendrait. Et c'est ce qui s'était passé. Jusqu'à ce qu'elle tombe sur les pages les plus sombres du carnet. Alors, elle avait eu de la peine pour lui. « Le grand Harry Styles de One direction » n'était qu'un gamin effrayé à l'époque. Joan ne s'était jamais intéressée au groupe jusqu'à leur séparation mais voilà qu'elle découvrait une autre facette de la célébrité. Loin des stras et des paillettes, la mélancolie rythmait les journées du chanteur. Et une autre partie de lui s'était dévoilé. Harry n'était pas forcément quelqu'un de gentil. C'est pourtant l'adjectif que Joan utilisait souvent pour parler de lui. « Un peu con, trop sûr de lui et orgueilleux mais gentil. » Niall levait toujours les yeux au ciel lorsqu'elle employait ces termes mais dans le fond, ça l'amusait. Parce qu'il se disait qu'elle ne connaissait pas Harry. Mais lui, le connaissait-il vraiment ?   Joan trouva Harry assit sous le porche à contempler les étoiles dans le ciel. Discrètes et bientôt cachées par les nuages. Elle profita de la faible luminosité qui éclairait le brun pour s'asseoir à côté de lui et poser son carnet sur ses genoux. Le bouclé baissa son regard sur la couverture en cuir et la toucha du bout des doigts, comme pour s'assurer qu'il s'agissait bien du sien. Son visage resta impassible et bien vite, il perdit à nouveau son regard dans l'immensité du ciel.  

- Je l'ai lu intégralement, se confia la jeune femme.  

Il opina d'un signe de tête. Il s'en doutait, de toute façon. Joan avait disparu pendant près de huit heures (peut-être plus ?) et Harry savait qu'en lui remettant son carnet, elle ne pourrait qu'aller jusqu'au bout de sa lecture. Il lui avait d'ailleurs remis avec cette idée en tête.  

- Mais je ne comprends pas pourquoi tu me l'as donné, Harry, continua-t-elle.  

Harry soupira. Il n'avait pas envie de donner des explications. Il n'avait pas envie de se justifier. Trop souvent, il avait dû le faire. Transmettre des communiqués pour expliquer son retard sur scène, dire au vigile de prévenir les fans qu'il ne pourrait pas venir signer d'autographes pour des questions de sécurité, laisser son meilleur ami gérer les rumeurs sur son homosexualité, appeler Niall pendant des heures pour lui expliquer que non, ce n'était pas à cause de leur dispute que Harry songeait à quitter One direction. Le bouclé ne voulait plus être cet homme-là. Il en avait assez de devoir rendre des comptes. Il lui avait donné son carnet parce qu'il était utile à l'enquête. Point. Joan devrait se contenter de son silence en guise de réponse. Pourtant, Harry se souvint d'une chose qu'il n'avait pas mise à l'écrit. Une chose primordiale. Une chose qui pourrait satisfaire la curiosité de la jeune peintre.  

- Il n'y a pas tout dans ce carnet, expliqua le brun.

- A quel sujet ?

- Merle m'avait demandé de lui faire un enfant.  

Joan tomba des nues. Elle avait dressé un portrait si sombre du jeune homme et du couple qu'il formait avec le mannequin allemand. Elle avait compris que Harry aimait Merle mais à sa manière. Elle avait du mal à croire que leur histoire était sérieuse après la lecture du carnet du chanteur. Lui dressait un portrait si froid de son histoire avec elle alors qu'en réalité, il la considérait comme la femme de sa vie.  

- Et tu avais accepté de lui en faire un ?

- Oui.  

Harry jouait nerveusement avec ses doigts, des souvenirs douloureux venant de refaire leur apparition dans sa tête. Il rejouait en boucle sa rencontre avec la blonde, tous les bons moments passés en sa compagnie, tous leurs coups de fil jusque tard dans la nuit simplement pour entendre la voix de l'autre et se promettre de se revoir bientôt. Mais tous les bons souvenirs se retrouvèrent balayer par ses souvenirs du corps ensanglanté de Merle. Du couteau qu'il lui a retiré du ventre. Du sang qu'il a essayé d'éponger. De ce bouche-à-bouche qu'il a fait au cadavre de celle qui aurait dû être sa fiancée. Et toujours tout ce sang dans lequel il avait baigné pendant plusieurs minutes avant que la police n'intervienne et arrête les tentatives désespérées de Harry à sauver Merle.  

- C'était la femme de ma vie. Elle a arrêté sa pilule juste avant de commencer son tournage. C'était la première fois qu'on se retrouvait quand on a été à San Francisco. Je voulais faire ma demande, là-bas. J'avais acheté une bague, prévenu ma mère, ma sœur, et j'avais trouvé l'endroit parfait pour la faire. J'avait tout prévu... Sauf qu'elle mourrait cette nuit-là.

Guilty.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant