- Et boum dans le derrière ! lâcha Léna.
Ava explosa de rire, puisque pour une fois que Léna touchait enfin la cible en mousse, il fallait que la flèche atteigne le postérieur de l'ours qui se dressait devant elles. Cela faisait près de trente minutes qu'elles avaient commencé leur parcours de tir à l'arc dans les bois de leur club, seulement en réalité, cela ressemblait plus à deux jeunes femmes bavardant dans les bois.
Léna passa sa main dans ses cheveux blonds pour en dégager une feuille qui avait dû tomber là sans qu'elle s'en rende compte. Ses yeux verts pétillèrent en avisant le t-shirt de son amie, la brune Ava, où l'on pouvait lire « no boyfriend, no problem ». Parce que non, Ava ne pourrait jamais reconnaître que Léna avait réussi à la rendre romantique.
- Je commence à avoir faim, avoua Ava.
- Déjà ? se mit à rire Léna. Il est à peine seize heures.
- Oui, c'est bien ce que je dis, c'est l'heure de goûter! En plus, j'ai pris du brownie, la taquina-t-elle, ses yeux gris orage pleins d'entrain.
- Ooh, alors ça change tout ! saliva Léna. Mais d'abord on finit ce parcours, sinon on va grossir et culpabiliser en même temps.
- On est vraiment nulles, aujourd'hui, déclara Ava.
- Je confirme... Ceci dit, on est bien meilleures sur les cibles à longue distance! ajouta Léna. Mais de toute manière, on est en vacances...
Alors, les deux jeunes archères débouchèrent sur un petit sentier camouflé par les feuillages des arbres où, à trente mètres de là se trouvait une biche, toujours en mousse, déjà bien abîmée au niveau de la zone signalant le cœur de l'animal. Elles armèrent leur arc, tendirent leur corde avant de la relâcher, concentrées sur la cible...
Silence.
- Oh, putain ! hurla Ava.
Léna, quant à elle, resta sans voix sa main plaquée sur sa bouche, les yeux écarquillés. Soudainement pétrifiées d'horreur, elles restèrent un long moment debout côte à côte, où seul le bruit des branches, causé par le vent, laissait supposer que le monde ne s'était pas arrêté. En effet, leurs flèches venaient de percuter une jeune femme en pleine poitrine qui, sans prévenir, avait surgi des buissons. Après un long moment qui leur sembla une éternité, elles décidèrent d'avancer vers la personne qui s'était écroulée au sol quelques minutes plus tôt.
Nul doute qu'elles l'avaient tuée. Les deux flèches se trouvaient en plein cœur de la jeune femme qui restait inerte sur le sol, recouvrant petit à petit les feuilles mortes d'un rouge vif éclatant.
Malgré son dégoût, Léna tenta de trouver un éventuel pouls, et c'est les mains tremblantes qu'elle tâta le cou de leur victime. Ava se voulut rassurante en posant la main sur son épaule, ce qui eut l'effet inverse, et Léna tressaillit. C'est alors qu'Ava désigna du menton la nuque de la jeune femme, à l'attention de sa voisine qui s'était relevée, non sans chanceler.
- Qu'est-ce que c'est ? demanda Léna.
- On dirait l'heure, sauf qu'il n'est pas trois heures quarante-quatre minutes et vingts secondes, répondit Ava sur un ton presque ironique.
Seulement, Léna connaissait assez bien son amie pour savoir que ce n'était pas la désinvolture qui la faisait parler ainsi. C'était la peur. Une femme était morte sous leurs yeux, par leur faute. Et Ava essayait à tout prix de repousser l'horreur de la situation.
- Ton explication est vraiment merdique, maugréa Léna. C'était peut-être son temps de vie restant ?
A ces mots, Léna se retourna brusquement pour s'écarter d'Ava, et se mit à vomir. Prise de pitié, Ava lui tendit un mouchoir. Alors Léna se redressa, appuya sa main sur une branche à proximité et, pliée en deux, prit le mouchoir dans l'autre.
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COALITION
Science FictionLéna et Ava, dix-huit ans, habitent à Jackson, Wyoming, Etats-Unis. Elles se préparent à rentrer à la fac lorsqu'une catastrophe sans précédent s'abat sur leur pays. Des clones de la population apparaissent subitement, avec pour seul but de retrouve...