Le cœur ou la raison

56°

L.A-02-16
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"Prends soin de lui,
parce que lui, il le fera"

Emma

Depuis le décès d'Isaac, Niall n'a pas beaucoup pleuré, sauf, toute l'heure pendant les funérailles. Des larmes ont coulé sur ses joues. Qui aurait pu faire autrement, nous étions près de deux cent en pleurs. Rien d'étonnant, la cérémonie était tellement émouvante. La tristesse des autres la probablement amener à réaliser la sienne, à admettre cette fatalité qui vient de nous frapper. Lui, un homme si fort et solide, il est toujours là pour sécher mes larmes, entendre ma peine et écouter ma douleur. Mais lui personne n'a besoin d'essuyer ses larmes... Elles ne coulent pas.

Il m'inquiète. J'aimerais qu'il me parle, qu'il exprime ses émotions en mettant des mots. Ça me rassurait. Je crois qu'il en est incapable. À travers ses yeux, je vois qu'il est blessé. Je le sens déconnecté et ça me fait peur. Le choc est sans fin et pour se protéger, il s'est construit une bulle, une sorte d'abri contre la souffrance. On dirait que son cœur s'est détaché de son corps, je sais qu'il se sent désespéré, car le plus grand des maux l'envahi et que ce déséquilibre est bien plus grand qu'une simple tristesse. Malgré son silence, j'entends sa souffrance. Je sais qu'il souffre en silence.

Harry était présent aux obsèques. Niall l'a contacté pour lui dire qu'il était le bienvenu. Niall et Harry n'ont pas beaucoup discuté à ce moment, ils ont limité leur échange au simple souhait de condoléances. Même chose de mon côté, les souhaits de sympathies sans plus, le moment n'était pas idéal pour une grande discussion. L'adieu pour Isaac reste à Isaac, je préfère ne pas mélanger les choses. Je veux que chaque moment me laisse un souvenir inique à lui. Pourquoi compliquer les choses, ils le sont déjà suffisamment.

À notre retour du cimetière, quand je suis rentré dans la maison, Niall était avec Harry. Ils étaient tous les deux dans le salon, dans un silence complet, Niall assis sur un tabouret dans un coin et Harry devant lui. J'avoue avoir tiré l'oreille, mais rien. Seulement quelques murmures. Mais ce que j'ai vu...

Harry l'entourait de ses bras, et sa tête reposait contre lui... et il pleurait, en le voyant si fragile, j'aurais aimé le rejoindre pour entremêler nos pleurs, mais j'ai compris à ce moment-là que nos larmes n'avaient pas le même langage. Les siennes étaient dures , il pleurait pour lui et non pas pour qu'on l'entende. Je n'ai pas parlé parce que cet instant leur appartenaient.

Il ne m'a pas vu ni entendu, j'ai rebroussé chemin jusqu'à la chambre que j'occupe depuis les deux derniers jours, rassuré de le voir partager une partie de l'immensité de sa peine.

[...]

Le grincement de la porte, des pas et un raclement de gorge.

- Emma, c'est moi, dit nerveusement Harry, je sais que t'es là, ajoute-t-il quand il comprends que je ne veux pas lui répondre, écoute je ne te poserais pas de question, ça sert à rien, tu n'as pas les réponses et je veux que tu prennes ton temps pour te guérir, mais tu sais, quand tout devient trop noir, n'oublie pas, je suis là.

- Je ne fais que pleurer, Harry, je suis incapable de penser, répondis-je depuis la salle de bains adjacentes à la chambre.

- Eh bien pleur amour, pleur... ce n'est pas magique, mais des fois, il n'y a que ça pour aider un cœur à guérir.

- Je ne pense pas que Niall serait content de te savoir ici, dis-je.