Rafe
4h15. Mercredi. Dur de sortir du lit. Annie m'a arraché à un cauchemar atroce. Je retrouvais le cadavre de sa fille. Ces images squattent mes pensées alors que je m'habille. Je n'arrive pas à les chasser. Toujours ce même sentiment d'impuissance et... Cette odeur. Cette odeur de mort dans mes narines.
Un café. Oui, c'est ça qu'il me faut. Dans la cuisine je m'empare du thermo comme d'un trophée. Je rempli une tasse. Ma boisson est froide mais je me force à la boire jusqu'au bout. Chaud ou froid, la dose de caféine est la même, n'est-ce pas ? C'est dégueulasse. Je m'enfile un grand verre d'eau ensuite. Puis je suis partie.
Je ne suis qu'à cinq minutes de chez Annie. Le trajet me semble pourtant durer une éternité. Je ne comprends pas ce qu'elle a voulu me dire. Je n'ai même pas eu le temps de l'interroger. Elle a laissé tomber le téléphone. Mais qu'a-t-elle donc vu ? Louisa ?
Je suis perdue dans mes interrogations. Je manque la rue d'Annie. Personne en vue, j'enclenche la marche arrière sur une centaine de mètres. Qu'on me voit, je m'en fiche, je suis le shérif après tout ! Je tourne et m'engage sur une route étroite, en mauvais état. Tout autour, des arbres. Je me suis toujours demandé comment Annie avait pu décider d'habiter ici. Isolée de tout, perdue au milieu de la forêt. Le prix de la vieille maison de l'ancien garde-chasse avait du jouer un rôle décisif dans son choix.
Je me gare, je descends. Je regarde autour de moi. J'ai un drôle de pressentiment, il y a quelque chose de très étrange ici. Je respire à pleins poumons, une odeur de feu plane dans l'air. J'avance vers la maison dans l'obscurité la plus totale. Cet endroit est vraiment glauque. La maison apparaît devant moi, je parviens enfin à décrocher ma lampe torche de ma ceinture. Je la braque vers le perron. La porte d'entrée est grande ouverte. Bizarre...
Je gravis les trois marches du perron avec prudence. La main sur mon arme. Sur le seuil, deux empreintes de pieds noires de terre. Je rentre, la peur au ventre.
- Annie ? j'appelle. Annie, tu es là ?
Je remarque que les traces de pas continuent à l'intérieur. Elles traversent le salon. Sur le sol, près de la fenêtre, je retrouve le téléphone. Je suis les empreintes jusque dans la chambre d'Annie. Le pied est grand et ne peut être celui de la mère de Louisa. Quelqu'un est bel et bien entré ici, et à présent elle a disparu. Je vérifie la salle-de-bain, la chambre de Louisa, même le minuscule grenier. Il n'y a personne ici. Je redescends.
Un cri résonne au loin, mon sang se glace. Aussitôt je me précipite dehors. Il vient de la forêt. Je dégaine mon arme de service, m'engouffre dans les bois. Un nouveau cri, j'accélère. Je ne sais pas où aller. Annie est là quelque part, je le sais mais je ne parviens pas à la trouver. Je reste sur le sentier principal. Je crie son nom, aucune réponse ne me parvient. Je m'arrête, à bout de souffle, reprends mes esprits.
C'est alors que j'entends ce qui ressemble à des pleurs. Je suis ce bruit jusqu'à retrouver Annie. À genoux dans la terre, elle murmure des paroles incompréhensibles. Lentement, je m'approche d'elle. Je glisse mon révolver dans son étui et pose une main sur son épaule.
- Annie... je murmure.
- Il était là, il me l'a enlevée. Il était là, il me l'a enlevée. Il était là, il me l'a enlevée.
- Annie ? Qui était là ?
- Il était là, il me l'a enlevée.
Elle répète sans cesse ces mêmes paroles. Elle est en état de choc, elle semble avoir vu quelque chose et je ne sais pas quoi. Elle scrute les arbres droit devant elle, il n'y a rien. J'ai beau écouter, je n'entends rien. J'essaye de la ramener à la raison, rien n'y fait. Elle continue de pleurer et de répéter cette phrase, effrayée.
J'appelle Eddie et des renforts. Quelqu'un est entré dans cette maison, Annie l'a sans doute poursuivi jusqu'ici, il nous faut maintenant le retrouver. Si on le retrouve, on retrouvera peut-être Louisa. Je ramène Annie chez elle, je n'arrive pas à la calmer. Il lui faut un docteur, de toute urgence.
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So Darkness We Became
Siêu nhiênIl était une fois... Silver Hollow, une bourgade comme il y en existe des centaines dans le Maine ; une scierie, un pont couvert, un lac et une forêt. Une immense et mystérieuse forêt qui imprègne ce microcosme de son aura intemporelle. Idyllique en...