6 décembre

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Il est tôt. Je n'ai pas dormi de la nuit. Je n'y arrive pas. Maxime m'a trahie, une fois de plus. Il me prouve que j'ai eu tort. Et si ses questions sur mes parents et la mafia servaient seulement à m'accuser encore ? Je ne dois plus rien dire tant que je n'ai pas d'avocat.

Maxime est un traitre. Depuis le début. Il aurait pu m'innocenter dès que nous étions à La Haye. Il aurait pu m'éviter d'être prise pour une criminelle. Il aurait pu m'éviter tant d'emmerdes ! Il n'a rien dit seulement pour se protéger ! Ce n'est qu'un égoïste ! Il ne pense pas à moi ! Il ne m'a jamais considérée autrement qu'une façon de protéger sa peau. Il a toujours préféré se protéger, lui plutôt que nous deux.

Cela me met hors de moi. J'ai été tellement stupide. Tellement naïve. Je suis seule. Depuis le début. Encore plus maintenant.

Je réfléchis en me lavant grâce à l'eau glacée du lavabo. Il ne faut plus que je dise un mot. Je n'aurai pas le droit à un avocat avant demain. En attendant, je ne dois plus rien dire. Je leur en ai déjà dit beaucoup. Trop.

Je m'habille lorsque je suis sèche. Je m'allonge sur la banquette de béton, les bras croisés derrière ma tête. Allez, les gars. Venez me chercher. J'ai été gentille jusque-là. C'est fini.

Ils sont en retard. Ils auraient dû arriver depuis longtemps. Ils viennent toujours plus tôt, le matin. Auraient-ils oublié de se lever ? Etrange pour des militaires ! Enfin, le vrai terme, c'est « Police Militaire ». Je me demande ce que ça change réellement. Pas grand-chose, je suppose.

Il n'empêche qu'ils sont en retard.

Les voilà. Enfin. Je commençais à avoir faim. Je mange tout. Ils me laissent encore dans ma cellule. Ils doivent avoir mieux pour s'occuper. Tant mieux, je suis tranquille. Je m'allonge et je m'endors enfin.

La porte s'ouvre. Je regarde Maxime entrer. Encore lui.

– Tu veux pas me laisser tranquille ?

– Lève-toi, je t'emmène en salle d'interrogatoire.

Je soupire. Je le suis. Il s'assoit devant moi. Il a un bloc note et un stylo. Il n'y a plus de caméra, ni de micro.

– J'ai besoin que tu me dises tout sur l'activité de tes parents.

Je le regarde dans les yeux. Je ne sais rien. Je ne sais rien et je ne te dirais rien.

– Camille, ce n'est pas un jeu. Tes parents avaient un lien avec celui qui a fait ça ! Tu sais très bien que la CPI fera le lien entre toi, tes parents et celui qui a fait ça.

– Si tu leur dis qui a fait ça.

– Je leur dirai, je te ferai innocenter.

Bien sûr. Tu ne l'as pas dit, jusqu'à présent. Pourquoi tu changerais aujourd'hui ?

– D'où tu viens ? lance-t-il tout d'un coup.

Quoi ? Tu t'intéresses à moi tout d'un coup ?

– Où est-ce que tu es née ? Tu n'es pas née à La Rochelle, n'est-ce pas ?

Qu'est-ce que tu essayes de faire, là ?

– Aide-moi, s'il te plaît.

– Pourquoi je t'aiderais ?

– Je sais que tu crois que j'ai tout fait pour moi. Mais je tiens à toi. Tu comptes énormément pour moi. J'ai toujours essayé de faire de mon mieux pour te protéger. Depuis le début, je savais que tu n'étais pas la coupable. J'ai toujours essayé de te tirer de là. Je fais de mon mieux. Mais comprend-moi. Je ne veux pas mourir non plus. Ce mec venait de la mafia ! Je ne fais pas le poids ! Surtout depuis que tout le monde est mort ! On ne peut faire confiance à personne, ici. Il faut que tu me croies, Camille. Fais moi confiance.

Je le regarde. Tu crois vraiment que j'ai tout oublié ? Tu crois vraiment que je vais te croire une fois encore ? Je ne peux pas te faire confiance. Je le sais maintenant. Je ne commettrais plus l'erreur.

– Dis-moi quelque chose...

Je lui lance un regard encore plus noir que la première fois que je l'ai vu. Non, je ne te dirais plus rien. Tu peux essayer autant que tu veux. Tu peux me poser toutes les questions que tu veux.

– Camille, dis-moi seulement où tu es née. Ça m'aiderait tellement...

Tu peux toujours rêver.

– Allez, s'il te plaît.

Je serre les dents. Je baisse les yeux. Il me prend les mains. Retire-les, Camille. Ne te laisse pas avoir, pas encore. Mais ses mains... Retire-les ! Pourquoi je ne peux pas ?

– Je suis désolé. Je ne voulais qu'il t'arrive tout ça. Je ne voulais pas te faire subir tout ça.

– Bari.

– Quoi ?

– Bari. Je suis née à Bari. En Italie.

Il sourit. Il serre un peu plus mes mains.

– Merci.

Je garde les yeux baissés. J'ai encore perdu. Je vais encore le regretter.

Maxime m'a ramenée dans ma cellule. Je ne peux plus penser à autre chose qu'à lui. Allez, oublie-le une bonne fois pour toute ! J'ai tellement de mal... Il est dans mon esprit, partout. J'ai envie qu'il soit là, avec moi, mais je ne peux plus le supporter. Qu'est-ce que je dois faire ?

Je tourne dans ma cellule, en cherchant désespérément à comprendre cet homme. Je suis perdue. Je ne sais plus quoi penser. Il faut que je me calme. Je m'arrête. Je m'assois sur le lit de béton. Je ferme les yeux. Je respire. Tranquillement. Allez, ça va aller.

J'entends quelqu'un crier. C'est quoi ce bordel encore ? J'écoute.

– Vous n'avez pas le droit de me retenir ici ! Eh ! Vous m'entendez ! J'ai rien fait !

Moi aussi j'ai essayé de leur crier dessus. Ça n'a servi à rien. Laisse tomber. Ils ne veulent rien entendre.

– Allez, ça va aller. 

U4 - CamilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant