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Lorsque je me réveille ce matin là, je ne sais pas si c'est parce que j'ai mal dormi ou le fait que ma mère s'agite énergiquement autour de moi,de façon bruyante.

— Aller ! me presse-t-elle. Debout ! La couturière doit prendre tes mesures. Elle ne t'attendra pas une éternité.

J'avais complètement oublié. Pendant un instant, mon esprit se perd dans le vide quand je laisse tomber mon visage dans mon coussin.

— Oh non, maman... rouspété-je. Je n'ai pas envie d'y aller, et encore moins pour cet enfant pourri gâté.

Ma mère tire mes rideaux sans se soucier de ma non-volonté évidente. Un soupire las m'échappe, j'ai les yeux encore assommés par la somnolence.

— Je ne te demande pas ton avis c'est un ordre, lança ma mère en tirant ma fine couette.

— Et dépêche-toi ! s'écria-t-elle en sortant de la chambre.

Aargh... Je m'extirpe de mon lit pour aller à la salle de bain, au bord de l'énervement. Je me presse de retirer mes vêtements, mes gestes trahissent mon agacement.

J'entre dans la minuscule cabine de douche puis allume le jet d'eau glacé. Je m'y attendais. C'est très rare que nous ayons de l'eau chaude. En hiver, nous sommes obligés de la faire chauffer dans une grande casserole.

Nous sommes fin printemps, alors ce n'est pas trop désagréable. On finit par s'y faire. En plein froid, mes parents peinent parfois à payer du charbon.

Je finis de me doucher, me sèche rapidement avant d'enfiler de propres habits : un jean noir un peu déchiré et un pull léger mais consistant. Tout de suite après, je me donne à ma tâche quotidienne.

Je place correctement mes lentilles, vérifie qu'on ne voit pas la couleur feuille d'arbre à travers où sur les côtés. Allez en ville sans, se serait signer mon arrêt de mort.

Parfois, j'arrive à me convaincre que j'ai les yeux marron, comme Tyson... Mais ça ne dure pas longtemps puisque tous les soirs et matins, quand j'enlève mes lentille, que vois-je, dans la glace ? Un horrible regard. Alors forcément, il faut me rendre à l'évidence : je n'ai pas et je n'aurais jamais les yeux marron.

Je décide de tresser mes longs cheuveux aubruns en deux nattes épaisses. J'emporte mon pyjama et le pose sur mon lit. Je le laverai au fleuve à mon retour.

Je vais à la cuisine, emprunte à ma mère un petit panier d'osier. Elle est occupée à éplucher des pommes de terre.

— Ne traîne pas, Eretha, m'interpelle-t-elle quand je suis arrivée au seuil de la porte. Tu passeras le bonjour aux Crawford de ma part ?

— Pas de problème.

Si j'y pense. Je sors avant de claquer la porte.

~~~

Émmoa est un pays immense. J'y vis depuis que je suis née mais j'habite plutôt dans un des village du pays. Où les plus démunis se retrouvent, hélas. Il y a une ferme, une grange abandonné et une petite école. Le strict minimum.

Ma maison se situe à côté du fleuve Timébo. On l'a nommé comme ça en l'honneur d'un petit garçon qui s'est noyé quand le fleuve s'est créé.

Le roi Alan et sa femme Mérédith règnent : ce sont nos exemples. Ensemble ils ont eu un fils. Il se nourrit dans des bols d'argent avec des cuillères d'or. Même si je ne le connais pas, je ne le porte pas dans mon coeur.

Dans deux mois il atteindra la majorité. Pour l'événement, sa mère à convié toutes les filles du pays âgées de quinze à vingt ans – ne vous inquiétez pas, il y aura largement la place – sur trois jours. Pendant ces trois jours, l'école a été suspendue.

Personnellement, je ne vois pas comment il pourrait se choisir une fiancée seulement en l'ayant vu une seule fois, sans oublier le nombre que nous sommes.

Je suis conviée samedi. C'est pour ça que je dois aller chercher ma robe. Elle sera certainement moins belle que les autres.

Je suis presque arrrivée, après deux heures de route. C'est encore désert pour l'instant, les bois m'entourent. Je suis dans mes pensées lorsque je percute quelqu'un. Mon panier tombe lors de la colision. Je me baisse pour le ramasser.

— La prochaine fois, regarde où tu vas, me conseille la personne en face de moi.

En relevant les yeux, je croise un regard moqueur. Le garçon a l'air d'avoir un an de plus que moi ou deux, tout au plus. Il est grand, brun, avec de jolis yeux noisettes. Pour qui il se prend, lui ?

— Et toi, la prochaine fois, apprends à éviter les gens.

Je fulmine de l'intérieur, sans pour autant le montrer. Il me demande où je me rends avant de lui dire que je pars pour la ville.

Je ne sais pas ce qui me prends, mais je continue.

— Oui, je vais là-bas pour qu'une couturière prenne mes mesures. Tout ça pour quoi ? Enfin, pour qui ? Pour le prince. Un enfant pourri gâté, qui ne pense sûrement qu'à lui. Je suis sûre qu'il n'est même pas au courant de l'état de son pays à certains endroit. Je cracherai sur son nom, si je le pouvais.

Tout cela en une expiration et un fouillis de bras gesticulés.

— Ah, fait-il les sourcils froncés.

Il a compris que je ne rigole pas. Il est blanc comme un linge. Il est peut-être choqué que j'insulte l'héritier de cette manière.

— Désolée, je ne sais pas pourquoi je t'ai dit tout ça. Laisse tomber. Au revoir.

Je lui fais un signe de la main puis m'en vais. Quelques mètres plus loin, je me retourne, stoppe ma marche : j'ai oublié de lui dire de ne rien répéter.

Je me retourne alors, celle mon regard à ses belles prunelles. Je mets un doigt sur mes lèvres, et il fait de même...

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Merci de continuer à lire mon histoire 😃
À la prochaine pour le 3ème chapitre

NeerGrey Eyes  {En Réécriture}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant