4 ✅

440 71 119
                                    

J'ai fais toutes sortes de gaffes dans ma vie. Boire de la javel, faillir brûler la grange abandonnée à côté de chez moi sont des bêtises faisant pâle figure. En seize années d'existence, celle-là est monumentale : j'ai insulté l'héritier d'Emmoa, m'adressant de façon directe.

J'essaie de ne pas montrer mon trouble à mes parents du mieux que je peux, je baisse les yeux vers l'herbe luxuriante.

Les gardes nous autorisent à entrer, accompagnés d'une révérence. Je vois les jeunes filles les unes plus belles que les autres avec leurs proches défiler devant le couple royal et son fils.

Lorsque j'arrive au niveau des héritiers, la reine m'accueille d'un regard glaçant. Je le soutiens, de peur qu'elle ne me trouve malpolie. Je laisse mes parents passer puis salue le roi ainsi que sa femme. Une révérence maladroite salue le prince, je ne croise pas sa vue.

— Ce serait dommage qu'un aussi joli visage garde constamment la tête baissée.

Je ne pique pas de fard à son clin d'œil évident, même avec un charme pareil.

L'entrée du château est aussi belle que l'extérieur : de grands lustres en cristaux décorent un plafond joliment peint. Une jolie sculpture en marbre blanc se tient au font de l'immense cour du château. Plusieurs fauteuils de couleur pourpre parsemés de broderies dorée sont placés de part et d'autre d'une immense véranda, qui donne sur un petit jardin.

Je me tourne vers mon père et ma mère, en en admiration. Qu'aurait été notre vie si nous habitions dans un tel palace ?

La salle est noire de monde, des gardes armés de longs fusils surveillent l'endroit. Je suis mes parents à travers la foule – enfin j'essaie. J'entends les jeunes filles jacasser et glousser comme des poules à l'attente du choix du prince, une raison futile pour ma part.

Des buffets ont été installés pour l'évènement au fond de la salle. Les mets ont l'air délicieux. Des vallets déambullent gracieusement dans la longue pièce, à là mains des plateaux où sont posés de grandes coupes de champagnes en verre.

Mes parents se dirigent vers un fauteuil libre à un coin de la salle. Je les laisse tranquille, me dirige vers un des comptoirs pour me servir de l'eau. Nous n'avons pas l'eau courante au village, et pouvoir me servir librement comme ça sans faire une demie-heure de marche est un pur bonheur.

Une fois mon verre en main, j'entreprends de rejoindre mes parents. C'était sans compter la violente bousculade que je me prends en pleine figure.

— Oh ! s'étonne une petite voix  mielleuse. Je ne t'avais pas vu.

Je me retourne. Ashley Parkinson, encore et toujours elle. Manque de bol, elle est accrochée au bras du prince, que j'ignore. Un regard noir lorgne Ashley, je manque de lui sauter à la gorge. Mais ce ne serait pas distingué.

J'essaie donc de me contrôler.

— J'espère que la tâche sur ta robe partira, me dit-elle, pointant du doigt un endroit sur mon vêtement.

Son sourire victorieux m'alerte, je n'assimile pas de suite. Je vois le regard du prince tomber sur le buste de ma robe, et que je sens un liquide froid se rependre sur ma poitrine.

Ashley m'a renversé le contenu de son verre. Et c'est du champagne.

Une énorme envie de la gifler monte en moi. Je ne dis rien, ne reponds. Je cherche un serveur des yeux et lui demande où se trouvent les toilettes les plus proches. Il m'indique un couloir et me dit que c'est la deuxième à gauche.

— Merci.

Je trottine difficilement jusqu'au fameux couloir. Des parents et jeunes filles se retournent à mon passage, chuchotant entre eux. Je n'y fais pas attention.

Je continue à chercher les toilettes jusqu'à enfin les trouver. Elles sont aussi élégantes que le reste du château : la glace au dessus du lavabo est géante, entourée d'un joli cadre blanc et doré. Le lavabo est tout propre, immaculé à croire qu'il n'a jamais été utilisé.

Je prends du papier toilette, le mouille puis commence à frotter. Ça ne part pas.
Je continue, encore plus fort. Toujours pas.

Je laisse tomber, jette le papier et pose mes mains au bord du lavabo. Je me regarde dans le miroir, souffle pour me calmer.

J'ai tellement envie d'étriper cette garce ! Va-t-elle gâcher ma vie jusqu'à ma mort ? Si c'est elle qui monte sur le trône, je jure de quitter le pays. Espérons que cette foutue réception se finisse pour que je puisse rentrer chez moi.

— Si vous mettez de l'eau et un peu de bicarbonate de soude, ça partira.

Je fais brutalement volte face.

Je n'ose pas regarder le prince dans les yeux, alors je me tourne vers la glace et l'observe à travers. Un long moment s'écoule, sans que ni lui ni moi ne parlons, puis je me décide.

— Au fait, je m'excuse pour ce que j'ai dit. Vous avez bien caché votre jeu, la dernière fois.

Je ne lui parle pas sèchement, mais normalement. Il viens s'adosser au mur, derrière moi.

— Vous savez, parfois rester enfermé dans un immense palais comme celui-ci, la plus part du temps désert, peut devenir très pesant.

Dit comme ça, c'est vrai que ce doit être lourd au bout d'un moment. Je n'avais pas vu les choses sous cet angle : il n'a jamais été libre.

— Excusez-moi, mais comment vous appeler vous ? me demande-t-il.

— Eretha Weavers. Et vous ?

Il me fixe de ses yeux marron clair dans le miroir, abasourdi.

— Vous ne savez pas comment je m'appelle ?

Il a l'air outré. Je me tourne vers lui, sentant la colère monter peu à peu.

— Pardonnez-moi de ne pas avoir la télévision chez moi.

Ma voix est extrêmement sèche. Je le regarde droit dans les yeux, une multitude d'émotions sur son visage.

— Je m'appelle Kayle Campbell.

— Alors, ravie de faire votre connaissance.

Je fais une petite révérence avant de quitter les toilettes. J'ai prononcé cette phrase sur un ton ironique, évidemment...

_________________________

Bonjour à tous 💙 ! Excusez-moi pour le retard, j'avais beaucoup de choses à faire 😃. Mais j'espère que vous avez aimé ce chapitre et dites moi ce que vous en pensez dans les commentaires !
Sur ce, à la prochaine 💋💙💝 !!!

NeerGrey Eyes  {En Réécriture}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant