Celui qui m'a tué... (tome 2)

Chapitre 18: France vs Paraguay (1ère partie)

Rennes, 2 juin 2017, France vs Paraguay, match amical. PDV Antoine.

France- Paraguay, mon premier match en sélection depuis mon divorce, le premier match avec mes coéquipiers bleus devant ma famille depuis que nous n'en étions plus vraiment une, le premier match auquel elle assisterait d'après ce que Didier m'avait dit. Il m'avait... stimulé de cette manière. Adriana était devenue ma motivation depuis qu'on se connaissait et elle l'était toujours autant. Je voulais la rendre encore plus fière de moi aujourd'hui. J'espérais qu'elle se rendrait compte, après 90 minutes de jeu, que j'avais toujours une place dans son cœur, comme je gardais au chaud la sienne.

Les gars n'avaient pas arrêté de me surveiller. Pendant les entraînements, ils avaient tous plus ou moins remarqué mon niveau de jeu qui s'affaiblissait de jour en jour. J'étais au stade où vraiment je prenais conscience de la réalité même si j'espérais que tout cela n'était qu'un cauchemar. Perdre Adriana avait toujours été ma plus grande peur. Je regrettais tout ce que j'avais pu faire ce soir là, je regrettais de ne pas l'avoir suivi,... Je nous aurais sauvegardé, j'aurais protégé notre famille comme un vrai père le faisait. Olivier essayait de surveiller l'état émotionnel des enfants. Ils ressentaient maintenant le manque et comprenaient vraiment ce qu'il se passait. Hugo, Paul, Dimitri et Kevin, ce dernier ayant expliqué les passages trop durs aux autres car je n'avais pas la force de le faire moi même, m'avaient encerclé. A tour de rôle, chacun avait passé du temps à mes côtés, chacun avait essayé de me faire changer les idées tandis que les autres discutaient de mon cas, quand ils me pensaient en train de dormir. Didier m'avait prévenu que je devais me re-concentrer dans ce que je faisais, que ce soit sur un terrain ou au dehors. Ils avaient constaté que j'étais souvent dans mes pensées ce qui provoquait par exemple, un verre qui se renversait, une question que j'ignorais ou encore un ballon, qui pourrait devenir décisif, me passer à côté.

Depuis cinq minutes, nous attendions dans les vestiaires de pouvoir aller nous échauffer. J'étais assis à ma place, réfléchissant à tous les scénarios possibles des prochaines heures et prochains jours. Je pensais de plus en plus à me détendre un soir et aujourd'hui me semblait être un bon jour car le coach allait nous laisser plus de temps pour dormir demain.

-Antoine, t'es avec nous ? M'interpella Kevin, qui était assis à mes cotés.

-Oui, oui bien sûr, dis-je en me re-concentrant assez vite dans le vif du sujet, avant de constater que toutes les personnes présentes dans la pièce me fixaient.

-Antoine, commença Didier, tu as intérêt à être plus concentré que ça pendant le match sinon je te sors, c'est compris? C'est la quatrième fois qu'on t'appelle. A quoi pensais-tu encore ? M'engueula-t-il comme s'il ignorait ma situation.

J'avais l'horrible sensation qu'il ne me connaissait pas quand nous étions ici, qu'il m'en voulait d'avoir changé sa fille, qu'il n'appréciait plus mon jeu, devenu tellement pourri ces derniers temps. J'étais devenu un de ces nombreux joueurs qui avaient tout perdu en quelques temps. Heureusement que c'était les trois derniers matches de la saison avant les vacances parce que j'aurais craqué. Je me re-concentrais sur ce qui m'entourait. Je le sentais très mal ce match, comme les deux qui suivront. J'étais prêt à tout sauf à cette semaine. Mes enfants me manquaient déjà, je les voulais près de moi. Je rêvais de ne pas avoir à porter le fardeau d'espoir que la France me mettait sur les épaules. Je rêvais de regarder mes coéquipiers gagner avec mes petits dans les bras, assis dans les tribunes.

Une fois que le coach eut fini de parler, pour je ne sais quoi dire puisque je n'avais pas écouté un mot, je me dirigeais vers lui.

-Didier, je peux te parler ? L'interpellais-je.

-Coach, me reprit-il, et je t'écoute Antoine.

-Je ne pense pas pouvoir assurer ce match, je ne me sens pas bien. Tu sais, j'ai eu une blessure au pied d'il y a quelques temps et je sens qu'elle revient là.