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Nous avons pris le train pour Paris et avons embarqué dans une nouvelle navette en direction de Londres. « Arrête de stresser ! Tout va bien se passer ! » ne cessait de me répéter Églantine. J'aurais dû me montrer plus fort. Mais depuis que je sors avec Églantine, je n'ai pas d'autres choix que d'accepter ma vulnérabilité. De fait, je crois que nous les hommes, nous nous construisons une vision déformée ce que l'on doit être. Une vision hypocrite de la réalité. Nous sommes des êtres sensibles. Hommes et femmes. Et je crois que la meilleure des choses que l'on puisse faire, c'est de l'accepter. Ce n'est pas tellement un gage de faiblesse que davantage l'expression de notre humanité.

En arrivant dans la ville, j'étais littéralement dépaysé, perdu. J'ai apprécié entendre parler les autochtones. Je ne saurais l'expliquer, mais j'ai aimé ne pas les comprendre. Je me suis émerveillé comme un gamin devant plein de détails, d'éléments que je n'avais jamais vu. L'ambiance, les lumières, les odeurs. Tout était magnifique.

Proche de la gare, nous avons trouvé l'hôtel que nous avions réservé, et avons découvert notre chambre. Elle était petite, mais illuminée. Simple, mais moderne. Le seul bémol, c'est que notre fenêtre donnait sur le toit d'un bâtiment attenant qui nous cachait la rue. Je me rappelle que des mégots de cigarettes disséminés parmi la fiente de pigeons couvraient toute la toiture.

Nous devions rejoindre un restaurant mais nous sommes restés un peu plus longtemps que prévu dans la chambre. 

Et là !

Là, j'eu ce doux moment de folie qui me libéra de mes entraves mentales. Églantine m'a guidé. Tendrement. J'ai été un peu hésitant, mais elle, elle a été parfaite. Je me suis aventuré lentement sur ce sentier que je m'étais jusque-là interdit d'explorer. J'ai été très maladroit... Églantine s'en ai amusé, mais toujours avec bienveillance. Ce fut une soirée formidable. Étrange, décousue, mais inoubliable.

Maintenant, je sais ce que c'est ! Et je ne pense pas avoir changé. La vie continue. Sans déconner ! Tout ça pour ça ! C'est vrai que je suis bête...

Nous sommes dans le lit. Églantine dort à point fermé. Moi, je n'arrive pas à dormir. Je regarde le plafond de la chambre partiellement éclairé par les lumières feutrées de la ville. Ça me fait bizarre d'être ici. Maintenant que la pression est redescendue, je réfléchis à l'avenir. Je ne dois pas me contenter de l'amour d'Églantine comme seul refuge. Je sais que notre relation peut se terminer du jour au lendemain. Je sais qu'elle peut échouer. 

Je connais la douleur de la séparation et du deuil. J'ai conscience que cette aventure que je traverse actuellement n'ai qu'un passage, aussi long soit-il. La volupté n'est pas pérenne. Et je devrais me faire violence pour construire sans Églantine ce nouveau chemin dans lequel il me faudra m'épanouir. Cependant, je souhaite de tout cœur et de toute mon âme qu'elle restera à mes côtés le plus longtemps possible. C'est une jeune femme brillante, qui mérite d'être heureuse. Je n'ai pas le tiers de sa maturité ni de son expérience. Elle semble bien mieux préparée que moi à vivre dans ce monde. Dans sa lumière, je me sens imbibé de la naïveté d'un type qui vit une puberté tardive. En fait, je me rends compte que je ne suis pas adulte. A trop me replier sur moi-même, j'ai cessé de grandir. Du lycée jusqu'à aujourd'hui ne fut qu'une longue pause dans ma maturation. J'espère qu'Églantine aura la patience de me comprendre et saura me guider comme elle l'a déjà fait jusqu'à maintenant. Mon ego en prend un coup! J'ai tenté de m'élever par le savoir pur, mais c'est une feinte que je me prends aujourd'hui en pleine poire. 

Églantine remue et met sa tête contre ma poitrine.

_ Tu regardes encore le plafond ? Me demande-t-elle en baillant.

_ Je réfléchis.

_ Il faut que tu sois en forme pour la ballade de tout à l'heure.

_ Ah ah ! Depuis quelques temps, je suis en forme tous les jours !

_ Bah moi je suis un peu fatiguée...

Elle pose son bras sur mon torse et semble se rendormir. Mon dieu que je me sens bien avec elle. J'ai tellement peur de la perdre...

LucasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant