Tome 2-ch 21-Damien

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Une respiration l'une après l'autre, un pas après l'autre. Au jour d'aujourd'hui, c'est tout ce que je peux faire. Essayer de m'adapter à la vie qui m'est réservée. Eden a fini par s'endormir dans mes bras, épuisé d'avoir trop pleuré. Et moi, je pense trop à sa mère. Les images de cette nuit tournent en boucle dans ma tête, et si je ferme les yeux, je peux même encore sentir son parfum ainsi que ses mains sur mon corps.

— Elle me rend dingue, encore plus qu'avant, encore plus quand elle est énervée contre moi. J'ai agi en crétin, pour pas changer. Mais il fallait que je parte avant que je m'endorme profondément, il fallait que je respire et que je réfléchisse. Ce que j'ai fait, longuement. Une part de moi me dit de me barrer de New-York, de partir loin d'elle et de toutes ces émotions qu'elle fait naître en moi. L'autre côté me dit de l'embrasser, de lui faire l'amour encore et encore et de ne jamais plus me séparer d'elle.

Connor tape sur ma cuisse, puis mon épaule.

—Et moi, je te dis que t'es con. Cette nana ne voit que par toi, ne désire que toi et t'es là, à hésiter comme un putain de flippé.

Il n'a pas tort le con.

—Je flippe, ouais, admets-je.

Mon ami détache sa ceinture et se tourne vers moi, malgré les mains qu'il garde sur son volant.

—Dam, souffle-t-il, tu te rappelles de ce qu'on répond toujours quand les gens nous demandent si nous n'avons pas peur de faire notre métier ?

—Oui.

Que la peur ne nous mène à rien. La peur est le pire des ennemis dans la vie, celui qui te pose le plus de barrières et qui t'empêche d'avancer dans le bon sens.

—Justement. Cette réponse ne concerne pas seulement la Navy, mec. Elle concerne la vie en général et devrait devenir ton leitmotiv. Vas la voir, fais-toi pardonner d'être parti comme un branleur et baisez sur la banquette arrière de ta bagnole jusqu'à plus savoir marcher !
Je ris. Si je pouvais...

—D'abord, faut récupérer ta caisse, ajoute-t-il, puis on ira voir quelqu'un.
—Je n'irais pas chez un psy, me rebiqué-je.

—Qui a parlé de psy ?

Soupir.

Connor sort de la voiture et je l'imite, la boule au ventre, le cœur en vrac.
Nous sommes sur le parking de l'hôpital, au beau milieu des visiteurs qui viennent voir leurs proches, pour leur apporter du réconfort et prendre des nouvelles. Nous, nous sommes là pour récupérer un bien qui m'appartient, et je suis prêt à étrangler Alexandro s'il ne me lâche pas rapidement les infos qui m'intéressent. Je ne sais même pas comment l'on va procéder. Le tact et l'hypocrisie ne sont pas mon fort, mais je sais qu'il ne serait pas très intelligent d'enrouler les tuyaux de sa perfusion autour de son cou.

Je me passe les doigts dans la barbe en regardant Connor avancer à mes côtés. Cet homme a la classe incarnée, la confiance coule dans chacune de ses veines faisant ressurgir l'autorité par chaque pore de sa peau. En apparence, parce qu'en vrai, il est de ceux qui ont le cœur tendre et l'humour grinçant.

—On procède comment ? le questionné-je.
­—Tu me laisses gérer ça, d'abord.

—Mais...

—Mais rien, Dam. Ton frère ne te dira absolument à rien et je suis certain qu'avec vous deux, ça va partir en pugilat.
Je ricane. Ouais, ok, il n'a pas tort. Entre Alexandro et moi, l'ambiance n'aura été qu'au beau fixe durant nos cinq premières années. Et encore...

L'hôpital est un lieu dans lequel je ne voudrais jamais revenir. On n'y va jamais de bonté de cœur. Rien que l'odeur de l'endroit me révulse. À l'accueil, la dame nous indique que ce qu'il me sert de frère est au huitième étage, chambre 871. Dans l'ascenseur, nous n'échangeons pas un mot, comme nous ne sommes pas seuls. Une dame âgée nous accompagne, canne à la main et le dos complètement voûté.
Je comprends rapidement que nous n'aurons pas la tâche aisée lorsque j'aperçois deux molosses devant la chambre. Ben tiens... Alexandro flippe tellement qu'il a demandé des gardes du corps. Couillon, va.

Un jour trop tardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant