chapitre 62

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Ceci fut mon histoire.
L'histoire de ma vie.
L'histoire de la petite mariane gueye camara.
Fille de fyfia faye et de daour gueye camara.
Mon pére fut un violeur manipulé par les esprits courroucés de mon village maternel.
Ma mére fut la fille indésirée qu'on a jamais voulu donner aux esprits.
Je fus la conséquence des erreurs de ma grand-mère.
Ceci fut ma vie.

La mer!
Elle est là devant moi et je suis assise sur un rocher à la contempler.

Je souris.

Quelle paradoxe!
Je suis vide et emplie.

Quelle désastre est ma vie!

Je souffre sans vraiment souffrir.
Je suis triste sans vraiment l'être.

Je pense être vide.
Oui je suis vide.

J'ai fait en sorte de débarrasser la surface de la terre d'une crapule telle que daour gueye camara mais et moi?

Est ce que je mérite de vivre dans ce monde?
Est ce que ce monde a vraiment besoin d'une personne telle que moi.

Je ne représente rien d'autre que la peine, la souffrance, la rancœur.
Je n'ai aucune vie.
Mon avenir est fichu.
Ma vie est fichue.
Je suis fichue.

Je ne me rattache plus à rien et rien ne se rattache à moi.

Je ne peux même plus parler.
Je suis muette faute d'avoir enduré quatre années de martyre.
Mon stylo est ma seule voix.
Mon cahier mon seul confident.
Ces deux choses furent mes compagnes d'infortune.
Mes seuls amis dans les pires moments de détresse.
Les seules choses que j'ai à offrir.
Les seules choses que j'ai à laisser.

Je suis la seule personne qui reste de la descendance de mariane faye.
Tout ceux qui seront mes descendants souffriront plus que je n'ai souffert.

Je n'ai aucune envie de commettre la même bêtise que ma grand-mére.
Elle avait refusé lorsqu'il fallait accepter et a essayé de rattraper un coup qu'elle savait perdu d'avance.

Elle avait fait en sorte de me conduire au village pour rattraper son erreur auprés des esprits et ainsi me sauver de leur colére mais cela n'a fait qu'empirer les choses.

Je ne tenterai pas le coup.

Je ne continuerai pas à défier la vie en traversant de force les obstacles qu'elle m'impose.

Certains pensent que la vie c'est justement surmonter les obstacles et savoir franchir les étapes.
On franchit les étapes en éspérant tomber prochainement sur quelque chose de mieux et non pour toujours tomber sur le pire.
Dans mon cas, je passe de pire en pire et je sais qu'il en sera toujours ainsi.

Donc Je n'ai pas de vie.
Non pas de vie.

Je ne ferai pas l'erreur de continuer à croire en une chose que je sais inexistante au détriment de ma future descendance.

Je veux débarrasser la vie de ma personne.
Je ne veux pas faire souffrir des êtres innocents.
Je ne veux pas être égoïste.

Comme j'aurais voulu pleurer en ce moment là mais je ne peux pas.
Mon coeur est sec.
Vide de sensations.
Mon cerveau fonctionne mais ça n'est plus lui qui contrôle mon corps.
Mon coeur bat dans le vide.

La mort de daour ne pére nullement dans ma conscience.
C'est comme si je ne viens de tuer personne.

J'écris quelques derniers mots sur mon cahier:

" ce cahier fut mon confident, mon allié. Il fut ma vie, mon espoir, mon souvenir. Je n'ai que lui à offrir. Lui et ce stylo qui fut la voix d'une sans-voix. Je prie vivement pour qu'ils tombent tout deux entre les mains d'une personne bien qui saura valoriser et faire connaitre l'histoire de mariane gueye camara. Je veux que mon histoire soit le pilier de l'handicapé, je veux qu'elle soit les larmes du perdu et la force de l'impuissant. Puisse la personne qui la verra en premier, valoriser   le seul bien d'un être qui n'a que ça comme trésor. Faites connaitre mon histoire et elle ragaillardira celui qui s'en croyait incapable. Je vous confie mon cahier, mon stylo et ainsi mon histoire. Que vous soyez homme ou femme sachez que l'âme d'une jeune fille de seize ans veille à ce trésor qu'elle consent néanmoins à partager avec des filles qui vivraient la même chose qu'elle a vécu, des hommes qui s'adonneraient à une telle criminalité et des femmes qui agiraient sans penser à l'avenir. Faites connaitre mon histoire et vous serez alors assuré d'avoir permis qu'une âme errante se repose enfin en paix."

Ce sont les derniers mots que mon stylo écrit sur mon cahier.
Les derniers.

Je pose le cahier et le stylo en dessus sur un rocher, à l'abri de l'eau puis je me léve.

Je regarde les vagues fouetter férocement les rochers et leur écume petiller et scintiller telle des diamants, le soleil intensifiant leur effet.

Je regarde l'eau reculer aprés chaque assaut.

Les vagues fouettent et m'appellent.

Quelques gouttelettes perlent mon visage.
Mon peignoir virevolte légèrement et le vent pénétre mon être.
Je ferme les yeux et tressaille de la tête aux pieds.

L'odeur du sel m'emplit.

Pourquoi ai-je l'impression que le bruit des vagues est un appel?

" viens mariane. Viens. On attend que toi."
Voila ce que j'entend.

J'imagine mon corps disparaître sous cette eau pleine.
J'imagine les vagues me transportant loin, trés loin, vers mon salut.

Un petit sourire se dessine sur mes lèvres.

Je me sens prête.

J'arrive maman. J'arrive grand-mére. J'aurais dut venir depuis bien longtemps déja. On va pouvoir être heureuses là bas, sans daour, sans esprits, sans malédiction. Rien que nous et la divinité. Si je dois être dans un enfer, que ce soit l'enfer divin et non celui des hommes.

Je tend les deux bras perpendiculairement à mon corps et me laisse tomber. Le vent méne mon mouvement.

Je suis comblée.

Enfin!!!

Je me sens déjà partir.



Sombre Réalité (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant