chapitre 54

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Ainsi passérent six jours.
Six longs jours pendant lesquels je n'avais de cesse de me poser des questions.

Depuis notre discussion du jour de ma venue, je n'avais plus jamais revu mame abdou.

Mame astou m'expliquait qu'il était dans la chambre sacrée, une case où logeaient les esprits.

J'avais appris durant ces six jours que mame abdou était le gardien des esprits de la famille. C'est à dire du totem qui était un serpent et compagnie.

Au début je ne comprenais pas vraiment jusqu'à ce que mame astou m'expliqua que mon arriére grand-pére, c'est à dire le pére de mame abdou et grand-mére mariane, était désigné comme étant gardien du temple familial. À sa mort, son fils mame abdou lui succéda.

Toutes ces histoires de totem et d'esprits me mettaient vraiment mal à l'aise pour la simple et bonne raison que j'ai toujours ignoré tout ça.

Dans ma courte vie, jamais je n'ai  été superstitieuse.
J'ai toujours crut en la simplicité et le naturel.

Le surnaturel allait vraiment au delà de mes forces.

Je n'avais jamais pénétré dans cette chambre sacrée pour deux raisons.

La premiére: je ne pouvais vraiment pas me résoudre à avoir en face de moi un serpent que j'aurais à vénérer sans crainte. Et pourtant, dieu sait que mame astou avait fort insisté pour que j'aille me baigner dans Le canari sacré des ancêtres mais tout ça était vraiment trop pour moi. Je voulais rester qui j'étais.
La seconde raison: je ne voulais pas énerver mame abdou encore plus qu'il ne l'était déja car je ne pensais vraiment pas qu'il aurait été heureux de revoir la tête de la fille qui avait osé venir chez lui sans l'avale de son pére.

J'étais d'accord pour dire qu'il passait la majeure partie de son temps dans la chambre sacrée au point qu'il ne dormait même pas dans la chambre de sa femme qui au passage dormait avec moi depuis mon arrivée. Il ne partageait non plus jamais les repas familiaux qui étaient pourtant trés animes. Mais était-ce vraiment une raison pour qu'il ne demanda même plus à me voir? Je ne l'avais vu qu'une seule et unique fois et depuis, plus rien, je n'avais plus jamais eu de ses nouvelles.
Son attitude envers moi m'intriguait vraiment d'autant plus que je trouvais qu'il abusait vraiment.

Durant les six jours passés là bas, j'ai eu droit à d'innombrables visites ainsi qu'à des présentations un peu partout qui me donnérent l'impression d'être la rescapée d'un naufrage.

J'étais traitée avec beaucoup d'égards.

Je partageais les repas familiaux qui avaient le don de réunir toute les personnes de la demeure, petits et grands, garçons et filles au milieu de la cour où étaient placés plusieurs récipients contenant des mets qui m'avaient jusque là été inconnus.

Je sus ce qu'était le "tiéré mboum" (cous-cous avec des herbes commestibles).
Je découvrais et savourais avec plaisir le fameux "mbaxalou saloum" ( riz assaisonné particulièrement).

Au lieu de me manquer, ma vie de citadine, enfant unique et aisée devint un souvenir que jamais je n'aurais échangé avec ce que je vivais alors.

Je fis la connaissance de tout le monde et fut l'amie de tous.

Tous m'appréciait comme je les appréciais.

J'aidais, la majeure partie du temps, mame astou à s'occuper de sa maisonnée et lorsque j'avais un peu de temps libre, j'écrivais sur mon carnet ou je jouais avec les enfants qui me considéraient toujours comme une occidentale.

J'allais aussi me promener de temps en temps dans les champs où l'on me pointait du doigt comme étant la toubab.

Avec ceux que je considérais comme des oncles, des tantes, des frêres et des soeurs,  Je cueillais des jujubes ou du pain de singe que je m'amusais à casser à l'aide des bâtons ramassés sur le chemin.
Pieds nus, insouciante et ragaillardie, je recommencais à savourer pleinement ce qu'on pouvait appeler la vie.

J'avais comme d'habitude des amis.
Les villageois étaient devenus ma famille.

En seulement six jours, j'avais sut ce qu'était la vraie enfance ou plutôt devrais-je dire l'innocence enfantine.

Mame astou m'avait adopté et avait fait de moi la soeur de ses enfants même si son mari ne semblait guére s'occuper de ma présence.

Six jours qui parurent petits en nombre mais tellement riches en connaissances et découvertes que j'en étais arrivée à presque oublier daour et tous mes soucis.

Lorsque les adultes partaient aux champs le matin, je m'affairais alors à apprendre à cuisiner et mame astou s'en donnait à coeur joie pour transformer la petite citadine en parfaite villageoise.

J'apprenais à attiser les fourneaux lorsqu'elle cuisinait.
J'apprenais à passer outre la douleur des yeux qui piquent à cause de la fumée.
J'apprenais même à essuyer mes mains pleines de crasse sur mes jupes sans soucis.

En repensant à mon séjour à los Angeles, je riais.

Si savana zacharski la peste me voyait elle s'emprésserait sûrement de me prendre en photos pour aller montrer ça à l'école.
Et laurie n'en aurait jamais crut ses yeux. Elle croirait certainement que je suis devenue folle. En passant, je me demandais même si elle avait bien reçu ma lettre. Elle me manquait tellement.

Je pensais aussi trés souvent à moustapha et à ce qu'il avait bien put raconter à daour aprés mon depart.
J'espérais et priais vraiment qu'il n'aie pas eut de problèmes.
Mon frêre me manquait beaucoup.

Mais toute cette vie était passée et dérriére moi.

En seulement six jours, je me sentais changée, transformée.

Je ne me souciais plus de mame abdou.
J'ai appris à l'ignorer comme il m'ignorait lui ou en tout cas comme je pensais qu'il m'ignorait.
Je me disais que son épouse avait sûrement tenter de discuter avec lui mais avait échoué, cause pour laquelle elle non plus ne faisait même pas mention de son mari devant moi.
Je ne m'interessais ni à lui ni à sa fameuse chambre sacrée où il s'enfermait avec son python sacré.

Je croyais qu'il m'avait même oublié.

Mais ce n'était pas le cas.
Ma pensée était erronée.

Mame abdou pensait bien à moi et avait bien l'oeil sur moi mais lorsque je le compris, ce fut trop tard.

Sombre Réalité (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant