| 6 † 1 |

96 18 15
                                    

Dès que la porte de la salle d'interrogatoire s'ouvrit, Selvigia me sauta presque littéralement dessus. Elle accorda à peine un regard au corps inerte de Séraphin, me tira sur le côté, tandis que les gardes affluaient dans la pièce. Deux voulurent remettre le fils de Týr sur ses pieds mais, dans son état actuel, il était incapable de tenir debout. En fait, il était à peine conscient. Paupières à peine ouvertes, cheveux crépitants, mains parcourues de tremblements sporadiques, il aurait presque fait peine à voir... s'il n'avait pas essayé de me tuer, peut-être.

— Quoi ? soufflai-je à voix basse.

Pour toute réponse, elle me tendit l'une tablette que l'on utilisait pour faire l'inventaire, enregistrer les déplacements et les ouvertures des portails, et Loki savait quoi d'autre encore. Celle-ci en particulier affichait actuellement les données de Séraphin. Nom, prénom, âge, Maison, taille, poids, numéro de cellule... a priori rien de spécial. Je fronçai les sourcils, et Selvie posa un ongle tout en bas de la page pour m'indiquer ce qui l'avait intriguée.

Puce : Désactivée

Je mis un instant à comprendre. Réactiver l'implant annihilateur de magie se résumait à appuyer sur un simple bouton – ce que je fis immédiatement — mais le fait qu'il soit désactivé et non court-circuité voulait dire qu'on avait volontairement saboté mon interrogatoire, avec la claire intention de me faire tuer au passage. Et la dernière personne à avoir ouvert cette fiche était, d'après l'historique...

Levi.

Je serrai les dents, submergée par une bouffée de rage, avalai difficilement ma salive, fis un signe de tête aux gardes pour qu'ils ramènent mon prisonnier dans son alcôve. À quatre, ils le traînèrent difficilement dehors, me laissant seule avec ma sœur.

— Tu es sûre que c'est lui ? marmottai-je, les dents serrées.

— Non. Mais il te déteste... et je l'ai rembarré...

— Je vais le tuer.

Je fis un mouvement. Un simple pas. Ma sœur m'attrapa par le bras. Une poigne ferme, solide, qui m'empêcha de foncer droit sur la tête blonde que je discernais dans le couloir, qui discutait à voix basse avec une touffe brune tout aussi reconnaissable.

— Respire, m'intima ma sœur.

Je pris une profonde inspiration, coulai un regard meurtrier à Levi et Adam, debout à quelques pas de là, qui échangeaient à voix basse. Je ne voyais pas le visage du blond, mais le brun en revanche, paraissait légèrement irrité. Évidemment que c'étaient eux. Quinze ans que je vivais ici, et à chaque fois qu'un incident se produisait, je retrouvais toujours l'un de ces deux-là à l'origine du problème.

— Par contre, faut vraiment que tu te calmes.

La douceur dans la voix de Selvigia parvint à m'apaiser. Ça, et la pression qu'elle exerçait sur mon poignet, si forte qu'elle pouvait me le démettre à chaque instant. Elle la maintint encore un instant, le temps d'être certaine que je n'allais pas foncer tête baissée, puis me relâcha, et me sourit. Je lui rendis une vague grimace, réfléchissant à toute allure. Après notre petite discussion juste avant, Levi avait dû se sentir acculé, incapable d'échapper à mes exigences. Alors, il avait essayé de me supprimer. Encore. Et, comme Adam n'irait certainement pas l'en empêcher, il s'était tourné vers lui pour avoir une brillante idée, ou alors du soutien.

Sauf que, comme à Barcelone, ça n'avait pas marché comme prévu. Et, malheureusement pour lui, maintenant, il était obligé de me retrouver dans l'arène.

Je poussai un long soupir, refoulai la fureur qui me tordait les entrailles, plaquai un air neutre sur mon visage, fis un signe de tête approbateur à ma sœur. Devinant ce que je faisais, elle se mordit l'intérieur des joues pour étouffer son sourire, et me suivit alors que je filais droit vers Adam.

Le Cycle du Serpent [I] : La Confrérie de LokiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant