Je suis là

#8 Sujet

- Vous savez pourquoi vous êtes là? Interrogea cet homme qui nous servait de pion.

- Non. Je répondis.

Cette fille, depuis notre entrée en perm, elle n'avait pas ouvert la bouche une seule fois.

- Voyons. Il croisa les bras. Mets y au moins de la volonté Yoongi.

- La seule volonté que j'ai en ce moment, c'est retrouver mon plumard.

- Tu n'avais cas écouter en cours.

- Et me détruire les oreilles? Je rigolais narquoisement. Non merci.

- Tu es redoublant je te rappelle.

- Et donc?

- Tu as promis au directeur de faire des efforts.

- J'ai promis que dalle moi. Je dis en jetant mon sac au sol.

- Ce n'est pas ce qu'on m'a dit.

- Ce qu'on vous a dit, je m'en tape complètement. La seule promesse que j'ai faite, c'est que je sortirai de cette taule, mon bac en main.

- Et tu compte t'y prendre à quel moment?

- Bon. Je l'interrompis grossièrement. Vous êtes ici pour me faire un interrogatoire sur ma vie ou pour nous fliquer?

- Tu m'exaspère Min.

- Je m'en branle. J'ai pas demandé à être ici. Vous direz merci à c'te prof qui vous a pourri votre jour de repos. Je peux dormir maintenant?

- Non. Tu vas travailler.

- Alors là... Je fis en m'adossant à ma chaise. Vous espérez beaucoup dans votre vie non?

- Donnez moi le travail monsieur. Je vais le faire.

Je tournais la tête vers cette fille. Ce pion nous avait placé de sorte à ce que je sois installé à une table côté fenêtre, et elle côté porte. La rangée du milieu nous séparait.

- Voilà quelqu'un de raisonnable ici.

- Je ne fais pas ça pour le plaisir. Je fais ça pour me casser.

Je souris. Elle était comme moi. Du répondant. Un sale caractère et une attitude inappropriée.

Désespéré, il posa sur nos tables, deux feuilles avec des tonnes et des tonnes d'écritures à n'en plus finir. Et recto verso en plus.

- Vous avez deux heures. Il n'ajouta plus rien, et s'installa sur le bureau en face de nous.

Ce bahut, c'était une geôle. Une taule. On avait tout à notre disposition. La bouffe dégueulasse à la cantine. Des chiottes pourris qui fouettaient le cadavre. Des salles de classes où on nous enfermait, nous obligeant à écouter les morales que je qualifierai ainsi, d'immorales. On nous sanctionnait à la moindre boulette. Nous punissait au moindre faux pas. Et pour finir, nous avions un pion qui faisait office de gardien.

Ouais. C'était une taule...

***

Je n'arrivais pas à ouvrir la bouche. Dès que je contractais la mâchoire, je grimaçais. J'était au bord de l'évanouissement. Heureusement que personne n'avait cours le mercredi après midi. J'attirerai moins les regards.

Ce garçon tenait tête au surveillant. Il m'ennuyait. Il m'exaspérait. J'avais l'impression qu'il frimait mais ça avait l'air tout aussi naturel. C'était dans sa nature. Répondre était naturel et évident pour lui.

Pour moi aussi ça l'était. Mais plus depuis que mon père me faisait payer mes actes. Je me laissais faire. Me laisser presque insulter. Ma fierté était rabaissée. Certes je remballais quand il le fallait, mais je m'éclipsais bien vite lorsque je voyais que ça dégénérait. Ce que je n'aurai jamais fait avant.

- Donnez moi le travail monsieur. Je vais le faire.

J'avais dit ça comme ça. Mais ça m'avait coûter une douleur insupportable. Je ne voulais qu'une chose, me barrer de ce lycée de merde.

De toute façon, les exercices de rattrapage ne devaient pas être si difficiles que ça. J'aurai certainement fini en une heure.

Je fus vite satisfaite en voyant les feuilles. Des textes, des documents qui prenaient deux pages recto verso. Et je me figeai en voyant le sujet.

Était ce une coïncidence?

"Notre intérêt pour l'art s'explique par un besoin d'évasion? Vous développerez à l'aide des textes suivants, de vos connaissances et de votre expérience."

L'art? Je pensais directement à la musique. Au dessin. Et oui. C'était pour moi des moyens d'évasion. Il n'y avait même à discuter la dessus.

Bizarrement, même si mes mains m'avaient hurlé une douleur sans nom au moment où j'avais saisi mon stylo, je passais au dessus et commençais à gratter. Je devais finir ça en une heure. Même si j'en avait deux devant moi. C'était mon défi.

***

J'avais dit quoi un peu plus tôt? Qu'on se ressemblait?

Je retire ce que j'ai dit. On a des points en commun certes, mais putain jamais dans ma vie, je ne pourrais écrire comme elle le faisait. Je ne voyais bien évidemment pas ce qu'elle grattait. Mais je fus surpris en voyant qu'elle en était déjà à sa deuxième feuille.

L'heure? Quatorze heures cinquante cinq.

Deux pages en moins d'une heure? Je croyais qu'elle était aussi nul que moi en cours. Alors pourquoi? Je me serai trompé?

Et puis c'était quoi ce sujet complètement merdique sérieux.

Soûlé, je mis ma tête dans mes bras, attendant la fin des deux heures. Tant pis. J'aurai mon zéro, mais au moins j'aurai répondu présent à la colle. J'aurai mon zéro, mais au moins j'aurai dormi.

***

Je n'avais pas respecté mon temps. J'avais dit une heure. Il était quinze heures vingt deux.

Les mains en feu, je tendis mes feuilles au pion.

Sans prendre la peine de relire mes copies, je lui rendais. J'en avait rien à foutre de toute manière. Je connaissais ma note.

***

Il était tellement à fond dans son portable qu'il n'avait rien vu. Il n'avait absolument rien vu mais ce n'était pas mon cas.

Ces mains rouges et carrément tremblantes, son visage voilé par l'indifférence mais aussi et toujours par cette tristesse. J'avais vu.

Elle ne tenait plus debout. Elle chancelait par moment. Elle marchait presque à reculons.

Mais ces mains. J'en étais resté sans voix. Incapable de cligner des yeux ou même de continuer de respirer. Tout s'était bloqué. Mon souffle tout comme mon corps. Seul mon regard la toisait. Je la suivais des yeux. Elle passa l'encadrement de la porte, mais s'arrêta. Se touchant les côtes. Puis, sans que ne m'y attende, elle tourna la tête et daigna m'adresser un regard.

Je plissais les yeux, tentant de la déchiffrer.

Quel était ce regard? De la haine? De l'indifférence? De la pitié? Un appel à l'aide? Un avertissement? Ou juste un encouragement?

Je la toisais de mes deux billes noires. Et mon regard resta en suspens. Même lorsqu'elle passa la porte et disparut.

Je mis un certain temps à retrouver la mobilité de mon corps.

Je secouais la tête, mes cheveux agressant mon visage et je retournais à ma sieste. Trop fatigué pour continuer de me torturer l'esprit avec des hallucinations.

***

/Vous pensez quoi des persos? Du personnage de Yoongi et de son caractère? Et celui de Sun Hee?/