Chapitre 8

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« Mon petit frère est déçu, en colère contre moi et ma faiblesse. Dix ans, et tellement mature, compréhensif. Je lui mens, et il le sait, pourtant, il continue de me regarder dessiner cette fille qu'il ne verra jamais, parce qu'au fond de lui, il sait que je suis pathétique, minable, seul encore et toujours seul.

Alors, il est déçu, en colère, mais il reste à mes côtés, observe les traits de Malia, son sourire, il l'aime, j'en suis sûr, et il se contente de ça. Quelque dessin pour lui décrire la femme parfaite que je voie en elle. Quelque mensonge pour en cacher d'autre. Quelque fantasme que j'ose avouer maintenant, j'ose en rêver, et ça ne restera que ça malheureusement.

- Elle est belle, Mia, me répète Thomas en posant sa tête contre mon épaule.

Elle est belle, oui, peut-être encore plus sur ces feuilles autrefois blanches. Je l'idéalise. Je la rends angélique. Elle l'est, mais elle reste humaine, et hier soir, elle était avec un homme. Je meurs de jalousie. Je meurs littéralement... Bientôt, je n'aurais plus la force de faire semblant de vivre, je les décevrais tous, Thomas en premier, mais ils seront très vite libérés du moins que rien que je suis. »

Quand je regarde Thomas, j'aimerais retourner en arrière, avoir son âge, son insouciance, ensuite, je repense à Joshua, et j'oublie tout, car si je pouvais remonter le temps, c'est lui que je sauverais. Je pousse encore une fois sur le petit dos, Thomas en demande toujours plus, mais j'ai peur de le faire tomber. Ce serait un comble. La première fois ou je le garde toute seule et je le ramène chez Anna avec un bras dans le plâtre.

- Plus fort, réclame-t-il, Josh me poussait toujours très fort !

- Je ne veux pas que tu tombes, me défends-je touchée qu'il mention inlassablement son frère.

- Je ne suis pas un gamin, je sais me tenir, et puis, Josh m'encourageait à fermer les yeux pour sentir le vent sur mon visage, il disait que ça me donnerait l'impression de voler... là j'ai plutôt sa sensation de flotter sur place, pousse-moi !

Je ris nerveusement, émue par la mention de Joshua, et touché par sa pique. Il ne flotte pas, là, je le pousse. Mon portable retentit, alors je recule pour lire le message reçu sans porter d'attention aux plaintes de Thomas. Je ne le pousserais pas plus, c'est non négociable. J'ai un pincement au cœur pour la déception, ce n'est pas Daniel cette fois, mais Nadia qui m'appelle pour une sortie entre fille.

Je les délaisse un peu, mais j'ai mes raisons. Être ici avec Thomas me rend heureuse. J'arrive à respirer comme il faut, j'oublie ma culpabilité, et je sais que c'est égoïste, un soulagement éphémère mais tellement utile pour mon bien émotionnel. Rendre cet enfant aussi souriant me soulage.

J'ai pensé que ce serait Daniel, encore, mais quand je lui aie dit que je sortais Thomas, il m'a simplement souhaité une bonne journée. Je n'arrive pas encore à mettre un mot sur ce qui nous arrive, mais ça arrive. Il reste distant, tout en étant très présent. Je crois que Daniel envisage une relation avec moi, ses gestes et ses mots me le prouvent, cependant, nous ne sommes pas près.

Joshua est constamment entre nous, il nous lie, nous culpabilisons chacun de notre côté, pourtant, être ensemble me donne l'impression de le rendre vivant, juste un peu. C'est pour ça que j'ai accepté de tourner la page sur le comportement de Daniel, sur notre rencontre, c'est égoïste, je le sais, mais je ne peux pas m'en empêcher. J'aime apercevoir Joshua à travers les gestes de cet ami qui n'en est pas un.

De son côté, Daniel me vole un baiser ou deux de temps en temps, souris niaisement à chaque fois, m'observe silencieusement, de loin tout comme le faisait Joshua, il semble combler sa propre culpabilité pour je ne sais quoi, alors nous nous soignons de notre présence, tout simplement, car il ne nous reste que ça.

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