Chapitre 40

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C'est un jour spécial, pourtant, je me retrouve dans cette allée, bouquet de fleur en main, j'avance vers été silhouette familière chagrinée devant ma tombe. Mon cœur entame une course acharnée au fur et à mesure que je distingue les traits de Madison. Après un an, ce corps réagit toujours de la même manière face à cette peste.

Tant de choses se sont passés, tant d'épreuves surmontées, et aucune trace de Madison. Ce n'était que tant mieux, parce que j'ai pu ouvrir Daniel-Rescue. J'ai pu faire en sorte que les jeunes aient un endroit pour se libérer du tourment quotidien qu'est la vie. L'école, le harcèlement, le manque de confiance en soi, les drogues, les violences mentales ou physique, tout est prit en charge pour éviter les fins tragiques.

Malia m'aide beaucoup...

Elle est toujours à mes côtés, et bien qu'elle m'ait dit « oui » à l'hôpital, j'ai refais une demande en mariage digne de ce nom, et aujourd'hui, Mia m'attends à l'église pour devenir officiellement ma femme. Matthieu et Thomas sont nos témoins, Joseph sera le musicien lors de la cérémonie, Robert n'a d'yeux que pour maman, Anna et Cindy se sont occupée des buffets. J'ai eu énormément de mal à pardonner à cette folle, mais Mia y tenait, et qui suis-je pour ne pas lui accorder une seconde chance ? J'y aie eu droit, moi.

Est-ce la même chose pour Maddie ?

Que fait-elle là ?

La jeune femme entretenue, sur d'elle, toujours bien habillée et sentant à un kilomètre le parfum chic n'est plus la même. Madison a maigrit, ses cheveux blonds ne sont pas lissés, elle ne porte pas de maquillage... Elle souffre, c'est bien. J'aimerais pourtant m'en délecter plus, mais je n'y arrive pas. Quand elle me remarque, tout son corps se crispe, Maddie recule comme si elle était effrayée. Serait-ce parce que je l'ai bousculé une fois ? Bon sang, j'aurais aimé lui faire plus, si ce n'était pas une femme.

- Daniel, je... je suis désolée, je vais m'en aller, bafouille-t-elle prise de panique.

- Que fais-tu là ?

Blême comme la mort, Madison gigote, cherche à fuir celui qu'elle a tant espéré emprisonner dans ses filets. Je remarque un bouquet de lys blanc, comme le mien, et je réalise que Daniel aimait ces fleurs parce qu'elles étaient les préférés de la femme qu'il aime. Pitoyable. Pris de fureur, je jette mes fleurs sur la tombe entretenue, et Maddie sursaute.

Le docteur Kriss à été emprisonné rapidement, le jugement est tombé, et je n'ai mentionné Madison à aucun moment. Matthieu et Joseph m'ont pourtant poussé à le faire, cependant, Malia m'a conseillé d'écouter mon cœur, et le cœur de Daniel refuse que Maddie souffre davantage. Il pense toujours que cette peste a une conscience, étrangement, sa présence ici me fait aussi douter... non, c'est impossible.

- Je te laisse une minute pour t'expliquer, grogné-je.

- Je suis désolée, répéte-t-elle, je ne savais pas que tu viendrais, et...

- Cinquante-cinq !

- Il est mort, n'est-ce pas ?

Un horrible frisson me coupe le souffle, il me glace le sang alors que Madison me regarde enfin. Tendu comme jamais, je la défie du regard, elle ne doit pas s'aventurer sur se terrain, je refuse de salir la mémoire de ce corps, j'ai promis à Daniel de vivre sa vie, son père et ses frères sont les miens désormais, mais je reste Joshua.

- Quarante-deux, soufflé-je entre les dents.

- J'ai été dévastée lors de ton suicide, poursuit-elle, j'ai éprouvé tant de remords, et je voulais tout arrêter. Quand tu t'es réveillé, Antony m'a convaincu de continuer à jouer le jeu, il m'a menacé de le faire, jouant sur mes propres sentiments, et... Je me suis dis que tout s'arrangerais vraiment pour nous. Je le pensais, Daniel, j'étais prête à devenir la femme parfaite pour toi, mais tu as changé... tu étais si différents.

- Mon suicide, mon coma, mon désespoir et ma mort joue sur ta conscience, Maddie, ricané-je, hors de moi.

- Oui, Daniel, je suis tellement désolée, si tu savais...

- Tu as de quoi l'être, craché-je en la dévisageant de toute ma hauteur.

- Tu as parlé de cette tombe, et... je comprends ce que tu as voulu me dire, susurre-t-elle en baissant la tête. J'ai tué l'homme qui m'aimait plus que tout...

Un sanglot lui échappe, remue tout son corps en même temps que le mien. Je pourrais la blesser, lui faire mal autant qu'elle en a fait à Daniel. Je pourrais la pousser à mettre fin à ses jours, et Dieu sait que j'en aie envie. Mais je ne suis pas comme ça. Je refuse de tourmenter mon prochain parce que j'ai été dans ce rôle, et j'ai détesté ça.

La roue tourne, le destin a à ses côtés une garde qui s'appelle Karma. Elle se charge de rendre les choses équitables, et de temps en temps, elle donne une seconde chance à ceux qui n'en n'ont pas eux.

- Nous faisons tous des choses dont nous ne sommes pas fier, Madison, et ont doit apprendre à vivre avec, dis-je en reculant d'un pas alors qu'elle lèvre brusquement la tête. Poursuit ta vie, répare tes actes manqués, et aime réellement une personne. Aime-la au point de pouvoir donner ta vie pour elle. Tu comprendras ensuite ce qu'à ressentit Daniel... Adieux.

Je tourne les talons la poitrine en feu, mon cœur bat si fort, ma gorge est nouée, étrangement, c'est un gloussement qui traverse mes lèvres. Je ris de soulagement. Non, ce corps rit. Je me suis senti libre après mon réveil, mais la sensation que je ressens en cet instant est tellement plus intense. Je monte dans ma voiture et part retrouver ma future femme, celle qui m'est destinée, celle que j'aime, celle à qui je vais dédier cette nouvelle vie.

Je songe durant un instant, le cœur lourd, comment auraient tournée les choses si je n'avais pas réalisé cet acte désespéré. Comment m'en serais-je sorti en tant que Joshua ? La première chose que je ressens est une grande injustice, ensuite, je me sens stupide. Le suicide n'est pas une réponse, c'est un geste de lâcheté parce qu'on à trop peur de ce que l'avenir nous réserve.

Je ne dis pas que c'est facile, au contraire, j'avais l'impression que la vie ne m'offrirait plus rien de bon, que j'étais voué à une vie de souffrance, de critique, de rejet. J'étais encombrant pour ceux que j'aime. Cette sensation est horrible, et je ne la souhaiterais à personne, parce que ça fait mal... tellement mal que la mort est notre seule solution.

Mais c'est faux.

La roue tourne pour tout le monde.

Si je n'avais pas fais ce que j'ai fait, Joshua aurait passé ses examens avec brio, parce qu'il était intelligeant. Les études terminées, j'imagine qu'il aurait pris confiance parce que ces tourmenteurs auraient pris un autre chemin que le sien. Joshua aurai alors trouvé le courage d'approcher Malia, et Malia l'aime malgré tout, elle est restée tout ce temps, Mia aimait le Joshua que j'étais.

C'est tout ce qu'il me fallait.

J'aurais pu trouver un emploi, poursuivre ma passion et dessiner celle que j'aime à en perdre la tête. J'aurais soutenu maman, elle aurait été fière de moi. Thomas aurait pu garder son modèle de toujours : un frère aîné, et non une copie de lui, un corps ou l'âme de son frère se reflète de temps en temps.

J'aurais dû m'aimer en premier, le l'ai compris trop tard. Peu importe le corps qu'on habite, le milieu duquel on vient, la vie qu'on mène, il fait s'aimer, et nous serons aimé. Daniel avait tout ce qu'un homme peu espérer, tout mise à part l'amour de soi. Il m'a cédé son corps meurtri pour me faire comprendre que le bien le plus précieux qu'on puisse posséder est intérieur.

Parce qu'on n'a pas toujours droit à une seconde chance.

Que la mort est juste une fin... On se prive alors de tout espoir de réaliser nos rêves.

Seconde ChanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant