Seconde Chance

Chapitre 28

Malia est étrange, distante, elle me regarde en silence, mais pas de ce silence que j'aime, au contraire. Celui-ci est imposant, lourd, plein de sous-entendu, pourtant, je n'ai droit à aucune réponse mise à part un : tout va bien. C'est faux, je le sens, alors pourquoi ne me parle-t-elle pas ? Je souffle d'agacement, me passe la main sur les cheveux et observe le dessin que j'ai sous les yeux. Je ne vois pas tout de suite l'intruse qui m'observe avec effroi.

Lorsque je lève les yeux, je me crispe entièrement et referme mon cahier de dessin. Anna semble dans tous ses états, elle gigote, gênée, moi je suis en apnée tant j'ai peur qu'elle ait vu, qu'elle ait comprit que son lâche de fils n'a pas trouvé le courage de terminer son acte, et crever comme il l'a tant souhaité.

- Je m'excuse, bafouille-t-elle, j'ai frappé et vous avec marmonné quelque chose, je pensais que je pouvais entrer.

- Je suis désolé, je... que puis-je faire pour vous, Anna ?

J'ai posé ma question avec le peu d'air que mes poumons contiennent, mon coeur bat si vite de peur, car les yeux de maman ne cesse de voyager entre mon carnet et mon visage. Mon Dieu, que dois-je faire ? Il m'est impossible de lui dire la vérité, elle en mourrait de honte, et lui mentir ferait de ma culpabilité un poids plus lourd à porter.

- Vous dessinez, me questionne-t-elle en approchant d'un pas, je serre les dents et hoche la tête. Mon défunt fils adorait dessiner, il avait du talent... Vous voir aussi concentré sur votre chef-d'œuvre m'a directement envoyé dans le passé.

- Je griffonne un peu, balbutié-je, que puis-je faire pour vous, Anna ?

J'insiste, si elle n'a pas compris, alors elle doit partir, elle doit me laisser retrouver mon souffle, mais aussi oublier Joshua, et avancer dans la vie. Maman doit se reprendre et faire de Thomas un homme bien. Je serais là pour m'assurer qu'elle ne manquera de rien, à distance. Le rachat de son immeuble est en route, je m'arrangerais pour qu'il ressemble à un palace... Mais pour l'instant, elle doit juste me laisser retrouver l'air qui me manque.

- Oh, pardon, je... il se trouve que mon fils, Thomas, est un peu malade, et... enfin, j'aimerais pouvoir rester à ses côtés pour le soigner, bégaie-t-elle en se tortillant. Vous savez ce que c'est ? Nous, les mamans, ont a toujours peur.

- Je sais, oui, soufflé-je avec émotion, ensuite je me souviens que Daniel est orphelin de mère et je me reprends. Enfin, j'imagine, Anna. Notez-moi le nombre de jours dont vous avez besoin, soyez au côté de Thomas, il n'y a aucun problème.

- Oh, merci, Daniel.

- Ne me remercier pas, j'espère qu'il ira très vite mieux, souris-je. Je vous demanderais bien de lui passer le bonjour, mais il ne m'apprécie pas énormément.

Anna avance d'un pas et me sourit avec tendresse et embarras. J'espère qu'elle ne va pas tenter de me rassurer en insinuant le contraire, parce qu'elle me mentirait. Maman n'est pas comme ça. Quand la vérité fait mal, elle s'arrange pour en tirer les points positif... même inexistant.

- Thomas vous voit comme une menace, Daniel, il a peur que votre relation avec Malia ne l'éloigne de nous, avoue-t-elle et mon cœur rate un battement. Pourquoi tout le monde pense que je vais la leurs enlever ? Je regrette qu'il soit aussi grincheux, mais ça changera d'ici peu.

- Je ne vais pas lui enlever, Mia, assuré-je d'une petite voix. Elle compte pour lui, et il compte pour elle, vous comptez tous les deux, alors... C'est pareil pour moi.

- Oh, souffle-t-elle et d'adorable rougeurs s'étendent sur ses joues, je suis peut-être allé un peu loin.

- Je voudrais rendre Malia heureuse, expliqué-je, elle compte énormément pour moi, je l'ai aimé... la première fois qu'elle m'a souri. J'ignore comment m'y prendre, mais je veux son bonheur, Anna... Vous, les femmes, êtes tellement compliquées.