Seconde Chance

Lui

Il fait si sombre, si froid, et j'ai tellement sommeil. Une fatigue étrange, qui immobilise mon corps, me laissant prisonnier, seul avec moi-même, mes pensées, ma douleur, ma propre voix, je suis comme seul au monde et je déteste ça. J'ai toujours été seul. Est-ce ça la mort ? Se retrouver dans les ténèbres, avec pour seul compagnie notre mal-être, et cette fatigue...

Pourquoi est-ce que je ne meurs pas ?

Ne suis-je pas censé voir ma vie défiler ? C'est ce qui arrive, normalement, c'est ce qu'on dit. Ma vie doit avoir été tellement lamentable que mon propre inconscient refuse de la revoir. Tant mieux, je voulais fuir tout ça, oublier, un repos de l'âme, enfin... c'est lâche, c'est faible, mais libérateur, n'est-ce pas ? ou est donc ma liberté.

« Tu es mon fils, Joshua, toi et Thomas êtes ma priorité... »

Maman, je suis désolé. J'ai tellement sommeil, pourtant, mon esprit ne cesse de cogiter, je devrais arrêter de penser. Oui, ne plus penser à ceux que j'abandonne lâchement. Je suis faible, je l'ai toujours été, j'ai essayé bon sang, j'ai tellement essayé, mais je n'y arrive pas, je n'ai jamais pu être moi-même, parler sans réfléchir d'abord, sans avoir peur de ne pas plaire, d'être rejeté, non-désiré.

« Anna, tu pourrais dire à ton fils que je ne suis pas son père... ça devient gênant, là. »

« Joshua, tu veux bien m'apprendre à dessiner comme toi ? J'aimerais savoir, moi aussi, et je dirais à tout le monde que mon frère m'a appris ! »

« Joshua, est-ce que tu vas bien ? »

Non, non, je ne vais pas bien. Je meurs bordel, pourquoi ça prend autant de temps ? Je ne veux pas les entendre, je ne veux pas y penser, je veux crever, merde, tout simplement. Maman souffrira, c'est certain, elle pleurera pour ce fils si fragile émotionnellement, ensuite, elle devra prendre soins de Thomas, et se montrera fort... elle m'oubliera. Thomas aussi le fera, il sera peut-être déçu, en colère, mais il n'aura plus à avoir honte de la loque que je suis.

Et elle...

« Tout va bien, Joshua ? »

Non, je ne vais pas bien...

« Est-ce que je peux marcher avec toi pour rentrer ? Je ne t'embêterais pas, je le promets, marchons, tout simplement... »

Non, s'ils te voient avec moi, tu auras des ennuis, tu seras critiquée, rejetée, reste loin de moi.

« J'adorerais voir ton carnet, un jour, tes dessins, je pourrais peut-être comprendre ce qu'il y a dans ta tête »

Malia, tu détesterais savoir, car dans ma tête, il n'y a que toi. Ton sourire, ta présence, ta gentillesse. Un ange tombé du ciel, malheureusement, tu mérites tellement mieux que moi. Je ne suis rien ni personne, et je refuse de te tirer vers l'enfer avec moi.

« Je suis là si tu veux parler, Josh, appelle-moi... n'hésite pas. »

Le pensait-elle vraiment ? Non, bien sûr que non. Comment aurait-elle réagi si j'avais osé la regarder en face ? Aurait-elle pris peur que j'ai pu faire d'elle le centre de mon monde ? Evidemment, Mia est gentille, curieuse, naïve, sa présence n'est justifiée que par mon rejet. Si elle savait combien je l'aime, elle prendrait la fuite.

« Je me fiche de ce que les gens disent, Joshua, je suis là parce que je le veux, alors cesse d'être aussi grognon ! »

« J'admire ta force, tu sais ? Tu as beau t'isoler, ou fuir de temps en temps, Joshua, tu reviens toujours. C'est ce qui compte, tu ne parles pas beaucoup, tu agis, et bien que ce soit difficile pour le moment, tu te relèves, affronte le monde, car un jour, tout ceci sera dernière toi, et les beaux jours viendront enfin »