𝐒𝐄𝐄𝐒𝐀𝐖 | ʲʲᵏ⁺ᵏᵗʰ

CINQUANTE-SEPT

Il était tôt, encore bien trop tôt.

Les oiseaux sifflotaient allègrement quelques mélodies répétitives alors qu'une étouffante chaleur avait déjà commencé à prendre place dans les rues, inondant la capitale. Le soleil était à peine levé, la lune encore visible, le ciel reflétait un bleu intense, bien trop intense pour être réel. - S'en était presque incroyable, féerique. Et malgré la beauté rare de ce spectacle aérien, Taehyung restait figé, la tête baissée, observant chaque mouvement de ses pieds. Le goudron, les feuilles mortes, les canettes vides ou même encore ses simples lacets défaits, tout, absolument tout était devenu digne d'attirer son attention - en cet instant précis - volatile.

Il marchait sans même regarder devant lui, se contentant de suivre Jungkook comme un enfant suivrait sa mère, main dans la main. La simple distance de leur bras tendu les séparer, c'est comme s'ils étaient ensemble sans pour autant l'être. Étrange et tellement rassurant à la fois.

Mais malgré tout, rien n'y faisait.

C'était comme naturel, instinctif, comme quelque chose au fond de ses tripes : Plus ils approchaient du lycée et plus le châtain ralentissait, faisant peser son poids à Jungkook qui finit, après un bon bout de chemin, par s'en rendre compte.

— On est bientôt arrivés, constata-t-il alors que plusieurs voitures vinrent frôler leurs corps figés au bord de la route.

Taehyung resta muet, sentent son cœur se serrer à ces simples mots. Il le savait déjà, mais l'entendre dire rendait la chose encore plus difficile, plus vraie, plus réelle. Son corps se remit à trembler de lui-même, ses jambes peinèrent à rester droites, il sentait les larmes au bord de ses yeux. Il allait mal.

Ils restèrent alors comme ça, immobile, debout sur ce trottoir désert pendant de longues secondes tandis que leurs mains étaient encore serrées l'une à l'autre, comme collées, liées, reliées. - Inséparables.

Taehyung renifla bruyamment et vint essuyer son nez d'un revers de manche avant de relever les yeux. Ses paupières restèrent fermées pendant quelques secondes, juste le temps de se remettre les idées en place, de respirer profondément, de rester calme. Une brise d'air frais vint alors frôler son visage, l'aidant à mieux respirer, et il ouvrit finalement les yeux. Il fut dans un premier temps aveuglé tant le soleil tapait fort, la première chose qu'il vit fut les branches fleuries qui s'agitaient sous la brise matinale. Quelques oiseaux s'envolèrent sous ses yeux, traversant ce bleu écarlate.

C'était reposant.

Tout semblait beau.
Tout semblait calme.

— Tu peux encore rentrer chez toi, reprit le noiraud, tentant une dernière fois de ramener le plus jeune chez lui, à l'abri.

— Je sais, répondit alors Taehyung d'une voix étonnamment calme. Il était prêt, il se sentait prêt, il était sûr de l'être. Alors il resserra ses doigts autour de la paume de Jungkook, le brun lui rendant l'étreinte. Ses yeux se dévièrent sur la route qui lui faisait face, il inspira une dernière fois.

— Ça va bien se passer..., souffla-t-il dans un murmure à peine audible, comme une caresse, un énième courant d'air.

« Ça va bien se passer. »
... Pourquoi ça irait mal ?

Car au fond, rien ne pouvait être pire de ce qu'il avait déjà vécu.