𝐒𝐄𝐄𝐒𝐀𝐖 | ʲʲᵏ⁺ᵏᵗʰ

QUATRE-VINGT-QUATRE

Le souffle haletant.
Le cœur palpitant.

Jungkook avait peur. Angoissé par tous les scénarios possibles et inimaginables alors qu'il se repassait la conversation en boucle dans sa tête. Il courrait sans même réfléchir à où il allait poser ses pieds avant de le faire, sachant pertinemment où il allait, comme par pulsion, par instinct. Comme par un mauvais pressentiment qui l'obligeait à courir d'avantage et à courir toujours plus vite.

Il courrait à en perdre haleine.

Il courrait tellement vite qu'il avait du mal à respirer alors qu'il manqua plusieurs fois de trébucher sur ses lacets défaits. Il dépassa plusieurs passants, s'élança dans plusieurs ruelles, ne s'arrêtant pas une seule fois, pas une seule seconde. Il avait la chance de ne pas habiter très loin de chez Taehyung mais les mètres lui semblaient, en cet instant-même, beaucoup trop longs, interminable. Ses jambes lui faisaient mal, semblant empêcher le sang d'atteindre ses pieds alors que ceux-ci continuaient d'enchaîner les pas.

Interminable, oui.
Il n'en voyait pas le bout.

Et sa tête continuait d'imaginer le pire, il appréhendait, angoissait, se demandant ce qui avait bien pu se passer. Il était bien placé pour savoir qu'une colère pouvait être dangereuse, et que celle de Namjoon pouvait être destructrice. Son souffle déjà saccadé par sa course semblait se détériorer à cette simple pensée, la pensée du pire. Et alors qu'une boule de nerf avait pris place à l'intérieur de son ventre, il s'arrêta finalement.

Le souffle haletant.
Le cœur palpitant.

Debout, essoufflé et tellement fatigué que ses jambes semblaient trembler. Il avait mal aux côtes, mal d'une course effrénée qui lui avait demandé toute ses forces, mal d'une angoisse qui prenait de plus en plus d'ampleur. Il respirait bruyamment, inspirant tellement fort que sa gorge semblait s'être asséchée, desséchée, complètement déshydratée. Et alors que sa poitrine battante se soulevait aussi rapidement qu'incessamment, ses yeux, eux, ne bougeait pas. Immobile, comme figé, ancré sur un point précis.

Il fixait la maison de Taehyung.

Son souffle d'abord anarchique se calma peu à peu, ralentissant de plus en plus jusqu'à reprendre un rythme normal. Les lèvres entrouvertes, il se demandait ce qu'il trouvera en ouvrant la porte. La porte de cette maison vers laquelle il avançait bien trop vite, ses pieds enchaînant les mètres alors qu'il tendait déjà la main, prêt à se faire entendre, faire savoir qu'il était là. Une maison sur laquelle il loucha, entrouvrant les lèvres sous une peur qui devint soudainement beaucoup plus réelle lorsqu'il se rendit compte que la porte était déjà entrouverte.

Ses yeux s'écarquillèrent alors que les pires scénarios qu'il avait imaginés lui retombait à présent dessus. Ou alors c'est lui-même qui était en train de tomber, tombant de son piédestal, chutant de l'idylle qu'il croyait être prêt à vivre. Une chute bien trop haute qui lui retourner le ventre, lui donner envie de vomir. Une chute bien trop brusque, bien trop violente, une chute qu'il n'avait pas envisagée et à laquelle il était loin d'être prêt.

Il n'entendait plus son cœur. Peut-être parce qu'il s'était arrêté ou alors parce qu'il pensait trop. Les idées se succédant bruyamment dans sa tête alors que les images défilaient devant ses yeux tremblants d'une peur incertaine. Tremblants d'une question qui le tiraillait de l'intérieur, tremblant d'une question sans réponse.

"Que trouvera-t-il derrière cette porte ?"

Une question qui avait soudainement pris le contrôle sur chaque autre pensée, se répétant en boucle dans l'esprit du brun que ce dernier n'arrivait plus à faire taire. Qu'il se sentait faible en cet instant-même. Mais ce sentiment n'était rien en comparaison de celui qui vint prendre sa place alors que ses yeux continuaient de fixer silencieusement la porte. Cette porte qui, soudainement, se mit à ressembler à celle sur laquelle il avait furieusement frapper. Cette porte qui le séparait du corps de Taehyung qui se faisait déchirer, et cette porte qui aujourd'hui encore le séparait de lui. Il avait cette terrible impression d'être revenu dans le temps, se retrouvant quelques jours plus tôt. Et il avait encore cette impression, celle d'entendre les cris du plus jeune, ses appels désespérés et ses pleurs. Et tout ça semblait si réel, tout ça semblait si vrai, comme si tout était encore en train de se passer.