So. [ FR ]

Bonus #3

Assis sur la chaise haute de mon bureau, je corrige à la file mes copies, soupirant et hurlant à chaque note en dessous de la moyenne qui tombe. En tant que professeur, je me devrais d'être indulgent avec mes élèves et de chercher des points là où il n'y en a pas, mais j'en suis incapable depuis qu'elle est partie. 

Et cela dure depuis des années déjà. 

Je n'ai pas vu le temps passer, car chaque jour se déroulait de la même manière au fil des mois. J'allais au lycée, je faisais mes cours machinalement, sans rien exprimer, me laissant à nouveau dévorer par l'épilepsie peu à peu. J'ai arrêté d'aller chez le médecin pour mes ordonnances, j'ai stoppé mes entraînements de sport, mes habitudes de vie saine, j'ai changé de ville, et changé de vie et d'habitude. 

Mais même avec ces bouleversements, ma vie est restée toujours aussi monotone, aussi triste, sans aucune joie, sans aucune émotion. Chaque femme que je croisais dans la rue me la rappelait, et me faisait à chaque fois une piqûre de rappel sur le fait que je ne suis qu'un connard. 

Je ne sais même pas où elle est allée. Je n'ai aucune idée d'à quoi ressemble mon fils maintenant à cinq ans. Et je n'ai même plus conscience de ce que je fais. 

Je ne suis plus qu'une coquille vide. Qu'une ombre dans la nuit, cherchant sa lumière et son âme sœur. 

Sans succès. 

Mes doigts tremblent lorsque je touche le verre qui sépare cette photo de nous deux, cette image que je regarde depuis trois ans et demi sans cesse, cette chose qui me fait chialer comme un môme dès que je la regarde. 

J'ai tenté de les retrouver. Mais je n'y suis jamais parvenu. Et j'ai désormais abandonné l'idée que je les revois un jour. Alors je survis. Je fais tout pour ne pas partir de ce monde qui n'a plus de sens sans eux. Je ne tiens que plus grâce à une chose : L'espoir mince et minime qu'un jour ou l'autre, Silky me laissera me rattraper. 

Même si je ne suis plus si sûr qu'après avoir vu l'homme que je suis devenu, elle le fasse encore. 

***

Quelqu'un frappe à la porte d'entrée, me tirant de mes pensées et de mes souvenirs. 

Je vais ouvrir machinalement, sachant déjà pertinemment qui est cette personne. 

Les yeux de mon frère sont exaspérés en me voyant, sûrement à cause de ma tenue indécente et débraillée, et du fait que j'ai encore une fois remis mes lentilles de couleur brune. 

"Salut. 

Sa voix est réprobatrice, et d'un ton si rempli d'inquiétude que j'en déglutis. 

-Salut... 

-Tu penses encore à elle. 

-Si t'es venu pour me dire ça, tu peux te casser Mickaël. 

Il entre en me poussant sur le côté du chambranle et me fixe de face après que j'ai renfermé la porte blanche. 

-Vas t'habiller.

-Non. Je reste ici.