Chapitre 20 suite

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Marie tira sur sa manche pour qu'il lui expose ce qu'il venait d'apprendre. Ses sourcils froncés n'annonçait rien de bon. Il était pâle, raidi et la jeune femme craignait le pire. D'une main, il s'ébouriffa les cheveux, signe de sa nervosité. Enfin, il osa affronter son regard.

-Ton grand-père est tombé d'une échelle de dix mètres en tentant de retirer une branche d'arbre du toit de l'habitation. L'accident s'est produit tôt le matin, vers six heures. Les personnes que j'avais employées pour l'assister dans son rôle de garde-forestier n'étaient pas encore sur place. Lorsqu'elles sont arrivées, il était à terre et inconscient. 

"Est-il gravement blessé ?" demanda Marie, les yeux brillants de larmes et tremblante.

Il se pinça la lèvre, comme s'il se résolvait avec une grande difficulté à lui répondre honnêtement. D'un mouvement imperceptible, il l'incita à poursuivre.

-Il a plusieurs côtes cassées et un risque d'hémorragie plane. Avec son âge avancé, son état n'est pas stable... Il est possible qu'il...

La jeune femme en avait assez entendu. Sa tête allait exploser s'il lui annonçait encore ne serait-ce qu'une mauvaise nouvelle. Il fallait qu'elle soit seule pour laisser éclater sa peine. En quelques secondes, elle avait parcouru le grand vestibule et s'était réfugiée dans le jardin. Elle s'écroula sur la pelouse, sanglotante. 

Hémorragie... 

Le vent caressait son visage, s'engouffrant dans ses cheveux.

Instable...

Une vague s'écrasa sur la falaise, l'arrosant d'embruns salés.

Mort...

Au milieu des bruits qui l'entouraient, les mots prononcés par Joris l'envahissaient tout entière, hurlants et insupportables. Comme elle aurait voulu avoir encore une voix pour crier toute sa rage de ne pas être auprès de lui en cet instant... Par dépit, ses mains s'accrochaient aux brins d'herbe, les arrachant même. Au bout d'une demi-heure, une veste fut posée sur ses épaules et une main dure qu'elle connaissait bien saisit son menton pour l'obliger à lever le regard. Elle se fondit dans ses yeux noirs. 

-Tu vas rentrer en France, j'ai tout prévu. Un avion peut décoller dans une demi-heure et Paula a préparé tes affaires.

Un éclat d'espoir brilla dans les yeux de la jeune femme et Joris sut qu'il avait fait le bon choix. Certes, d'après l'accord qu'ils avaient passé lors de leur première rencontre, Marie ne devait pas rentrer en France mais cet accord semblait désormais dérisoire. Ils avaient partagé tellement de choses... Il ne pouvait plus l'imaginer le trahir, tout comme elle avait besoin de lui pour se sentir vivante. L'homme pouvait la laisser partir sans s'inquiéter de ne jamais la revoir. Après le supplice que Yahn lui avait fait subir, elle commençait seulement à retrouver foi en la vie. Elle se nourrissait, découvrait la force qu'elle avait toujours possédé. Son handicap ne l'avait jamais gêné non plus. Alors que personne ne l'acceptait, il avait appris à la comprendre rien que par ses yeux. La jeune femme transmettait plus de choses par le regard que par ses paroles, et cela n'enlevait rien à sa sagesse ni à sa douleur.

Il l'aida à se relever et sécha ses larmes avant qu'elle ne parte vers la villa sans un mot, seule la gratitude brillait dans ses yeux. Dans quelques heures, elle serait avec son grand-père.

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