Chapitre 41

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Marie peinait à se rendre compte de ce qu'elle venait d'accomplir. Sa voix était comme un écho qui résonnait dans sa tête. Les mains de l'homme étaient encore crispées sur ses épaules et il la fixait sans un mot. Elle pouvait entendre ses pensées sans qu'il n'ait à les prononcer : il oscillait entre la surprise de l'entendre autant parler et celle de la voir furieuse. Enfin, il relâcha lentement la pression qu'il exerçait sur ses membres et l'incita simplement à s'asseoir. Voyant qu'elle n'en faisait rien, il s'assit sur le canapé, visiblement perturbé. Sa tête était penchée, comme s'il ne désirait pas qu'elle voit son expression.

Si elle désirait savoir, il n'avait pas d'autre choix que de tout lui expliquer. La lueur dans ses yeux qu'il avait pu entrevoir un instant lui avait montré que quelque chose d'important dans leur relation se briserait s'il ne lui expliquait pas. Elle perdrait sa confiance en lui.

-Tu avais raison... dit-il doucement, las de fatigue et d'inquiétude. Quelqu'un essaye de nous séparer. J'ai reçu plusieurs menaces qui proviennent sans doute de le même personne qui a envoyé le bouquet de roses. Il te connaît bien et son mode opératoire me fait penser qu'il n'est pas stable psychologiquement.

Il leva les yeux sur la jeune femme, anxieux de connaître ses réactions. Mais son expression restait neutre. Elle avait seulement croisé les bras et semblait attendre la suite de son explication.

-Il a pris le contrôle de la sécurité de la villa et peut donc désactiver les alarmes à sa guise. Il était dangereux de rester dans un lieu où il pouvait entrer sans qu'on s'en rende compte.

Il rabaissa la tête.

-Tu sais tout...

Les minutes passaient et il n'osait l'observait. Jusqu'à quel point l'avait-il déçue en lui cachant quelque chose d'aussi grave ? Puis il sentit le canapé s'affaisser à ses côtés. Recroquevillée, elle appuya sa tête sur son épaule large. Sa fine main attrapa la sienne dans un geste tendre. Elle suivait de son doigt les lignes de sa paume, provoquant un frisson chez l'homme.

-Merci... de me faire enfin confiance.

Le parfum fleuri de la jeune femme s'insinuait en lui, n'inspirant que calme et apaisement, à son image. Et il lui sembla prendre enfin conscience de ce qu'elle lui avait reproché.

-Je te dois aussi des excuses. Je n'avais pas vu à quel point tu avais évolué depuis notre rencontre. Pour moi, tu étais encore terriblement fragile, trop fragile pour que je puisse me risquer à t'avouer la menace qui plane sur nous. Je voyait encore la femme maigrichonne, traumatisée par son passé.

Marie ne bougeait pas, blottie contre lui. Elle attendait la suite, à tel point qu'elle en oubliait de respirer. Dans sa main, le poing de l'homme s'était raidi, envahi par un souvenir qui le glaçait et mettait dans un état terrible de fureur.

-Tu ne peux imaginer à quel point il était douloureux de te retrouver en larmes et paniquée au milieu de la nuit après un cauchemar. Tu ne peux imaginer la torture que c'était de voir que tu élaborais des stratagèmes pour que je ne me rende pas compte que tu sautais des repas. Que tu ne t'aimais pas... Et que j'étais impuissant face à ta détresse.

Il lui prit le menton, désireux d'admirer ses beaux yeux bleus. Il sourire naquit alors qu'il continuait :

-Mais je me suis trompé sur toute la ligne. Tu es tout à fait à même de gérer. Il n'y a qu'à regarder ce qui vient de se passer. Tu viens de parler de manière presque normale !

Marie sourit en l'entendant dire cela. Il était fier d'elle et rien que ça la comblait. Bien qu'ironiquement, ça soit sa colère envers lui qui l'avait poussée à parler. Elle ignorait que ses crises de panique et les révélations sur son passé avaient autant troublé l'homme... Il ne disait pas tout de lui non plus. Mais il avait l'air d'avoir compris qu'il ne servait à rien de la mettre à l'écart, si ce n'est l'inquiéter et se torturer mentalement seul.

-Je suis désolé... murmura-t-il doucement, comme s'il n'avait pas l'habitude de s'excuser et que cela le mettait mal-à-l'aise.

La jeune femme l'observa quelques secondes avant de se pencher sur lui. Tendrement et sous son regard d'abord intrigué puis attendri, elle déposa un léger baiser sur sa tempe. Sensuellement, elle laissa ses lèvres frôler sa peau pendant qu'elle les descendaient jusqu'à sa bouche dure. Empreinte d'une infinie douceur, elle l'embrassa tandis qu'il enserrait son visage de ses grosses mains.

-Je t'aime... souffla-t-elle de sa voix dont il ne pouvait déjà plus se passer.

~~~~~~~~~~~~~~
Marie s'employait à sortir les vêtements des sacs qui leur avait été apportés seulement quelques heures après l'arrivée sur l'île. Joris était décidément très efficace quand il s'agissait de sa sécurité et de son confort... Ils avaient longuement discuté de l'identité de l'inquiétant stalker mais elle ne voyait pas plus que lui qui pouvait faire ça. L'homme s'était éclipsé depuis quelques minutes déjà pour répondre à un coup de téléphone.

Dans la pièce d'à côté, elle l'entendait parler et sa conversation semblait houleuse. Pourvu qu'il ne se passe rien de grave...

-Comment ça, je dois de toute urgence me rendre à ce congrès !? cria-t-il à travers le combiné à son associé dont il sentait la voix trembler. J'ai pris trois jours de congé, ça n'est certainement pas pour le rendre en Angleterre !

"Mais... C'est très important ! Le client a menacé de mettre les contrats en suspend si vous n'y allez pas !"

Joris poussa un énorme soupir avant de s'écrouler sur le fauteuil. L'idée de laisser Marie seule ne lui plaisait absolument pas. Mais avait-il vraiment le choix ?

Marie se laissa tomber sur le lit, brusquement anxieuse à l'annonce de Joris.

-Tout ira bien. Paula va venir et certains de mes hommes ne quitteront pas la maison. Je reviens demain soir, tenta-t-il de la rassurer même si cela lui brisait le cœur de l'abandonner ainsi.

Il l'embrassa tendrement avant de partir. Il devait se dépêcher pour prendre l'avion. Plus vite il partirait, plus vite il reviendrait après d'elle...

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