Du bruit, de la chaleur, des coups. Et une grande douleur au niveau de la gorge. Son corps fut éjecté et roula sur l'herbe humide. Sa robe déjà peu couvrante fut déchirée.
Au loin, elle voyait la voiture écrasée contre l'arbre et dont une partie était en flammes. Blessée et au bord de l'évanouissement, elle ne s'inquiétait même plus de savoir si oui ou non la voiture allait bientôt exploser. Elle apercevait le corps inerte et couvert de sang de Yahn encore sur le siège de la voiture.
Sentant vaguement un objet étranger au niveau de sa gorge et ayant des difficultés à respirer, elle souleva péniblement sa main pour tâter. Elle sentit son cœur s'affoler en comprenant quelle était la nature de cette douleur : un morceau de verre était enfoncé dans sa gorge, empêchant l'air de rejoindre ses poumons. Surtout, elle ignorait si son aorte n'était pas sectionnée. "C'est la fin..." pensa-t-elle avec un mélange d'épuisement et de soulagement. Néanmoins, son instinct de survie prenant le dessus, elle s'appliquait à respirer lentement, écoutant ses souffles rauques et attendant que le noir de la mort l'emporte...
Des bips aiguës envahissaient son esprit qui peinait à se réveiller. Un bruit agaçant. Elle le connaissait mais, trop fatiguée, était incapable de faire le rapprochement avec un lieu ni souvenir. Plusieurs fois, elle replongea dans un profond sommeil...
Les heures, les jours passaient sans qu'elle n'en ai conscience. Et enfin, elle entrouvrit les yeux. La lumière était trop forte. Elle était encore vivante, constata-t-elle avec déception. Elle tâta sa gorge et ne sentit qu'un bandage.
-Ne le touchez pas trop, Mademoiselle. Il ne faudrait pas rouvrir la plaie, dit une voix féminine à ses côtés.
L'infirmière alla chercher un médecin qui vérifia ses constantes et ses bandages. Elle avait une multitude de questions mais rien ne sortit lorsqu'elle ouvrit sa bouche. Le médecin la regarda d'un air peiné.
-N'essayez pas de parler... Nous allons faire des examens plus poussés.
Marie comprit immédiatement et une larme coula sur ses joues.
-Je suis désolé de vous apprendre ça en de telles circonstances mais votre mari est décédé durant l'accident.
Elle aurait voulu lui rétorquer qu'il ne devait en rien être désolé.
-Mais heureusement, mis à part votre voix, vous n'aurez aucune séquelle grave. C'est un miracle. Votre grand-père est ici, je vais le faire entrer.
...
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Joris acheva sa lecture avec un sombre soupir. Il savait tout, et cela ne le réjouissait guère. Il n'osait imaginer la détresse du petit bout de femme qui reposait encore dans ses bras lorsqu'elle s'était éveillée à l'hôpital après une telle épreuve.Il ne remercierait jamais assez Carl qui était revenu dans la vie de la jeune femme au moment parfait pour l'assister dans sa nouvelle vie.
Car il s'agissait bien de cela : une nouvelle vie. Libérée de son bourreau mais à jamais hantée par son souvenir. Un nouveau lieu de vie avec son grand-père qu'elle connaissait peu. Des études qui ne servaient plus à rien sans voix. Une passion laissée à l'abandon.
Elle leva son regard bleu sur lui, l'air vide. Tendrement, il reprit ses caresses sur ses cheveux, sachant bien que ce geste l'apaisait.
-C'est une nouvelle page qui se tourne, murmura-t-il à son oreille. Je sais que c'est dur, mais il faut oublier, apprendre à vivre avec. Et je vais t'y aider.
Ses larmes mouillait le tissu de sa chemise et elle s'accrochait à lui comme si sa vie en dépendait. Lentement, il la berçait comme une enfant.
Au bout d'une vingtaine de minutes, ses sanglots cessèrent enfin. Joris la déposa sur le lit et alla chercher un linge humide à la salle de bain. Délicatement, il le passa sur son visage pour apaiser ses yeux rougis.
-Ça va mieux ? demanda-t-il avec un petit sourire réconfortant.
Elle hocha timidement la tête, s'en voulant de s'être autant lâchée devant lui. Mais elle ne regrettait pas de s'être enfin libérée de ce lourd secret. Pour la première fois, elle accordait une entière confiance à un homme. Et après Yahn, ça n'était pas gagné. En quelques mots, il l'avait totalement apaisée.
-Il est tard, constata-t-il en observant la nuit tombante. La journée a été riche en émotions mais je suis sûr que tu as un petit creux.
L'estomac de Marie parla pour elle et l'homme sourit en la voyant devenir écarlate.
-Je vais préparer le dîner et après tu pourras te reposer.
Ses crises de larmes tout d'abord causées par le départ soudain de Joris puis par l'évocation de l'accident l'avait en effet épuisée. Voyant son expression renfrognée, Joris haussa un sourcil.
"C'est rien, j'en ai juste marre de pleurer tout le temps, se justifia-t-elle. J'ai l'impression d'être faible."
Il lui prit le menton, l'obligeant à ne plus baisser les yeux.
-Tu n'es pas faible. Tu apprends à vivre et, avec ton passé, je suis plus que conscient que c'est éprouvant. Chacun n'exprime pas sa douleur de la même manière. Tu te bats pour enfin connaître le bonheur et c'est tout à ton honneur. Donc je t'interdis de penser que tu es faible. Est-ce que c'est bien clair ?
Marie hocha la tête timidement, avant de prendre sa main qu'il lui tendait et de le suivre jusqu'au salon. Alors qu'il préparait du riz cantonais accompagné de morceaux de poulet, la jeune femme relisait des partitions musicales pour son cours du lendemain. Mais l'épisode de la matinée la perturbait toujours.
"As-tu une idée de qui a pu envoyer ce bouquet ? Je ne connais personne. Dans quel but aurait-on pu l'envoyer ?"
Joris avait en effet réfléchi à la question et il ne comprenait pas plus que la jeune femme.
"Peut être était-ce pour te rendre fou de jalousie ? As-tu des ennemis ?"
Il se retourna vers elle, un sourire aux lèvres. Sa naïveté l'amusait.
-Des ennemis, j'en ai beaucoup. Quand on possède une fortune comme la mienne, on est souvent victime de tentatives de manipulation. Mais si ce que tu dis est vrai, alors son plan a bien failli fonctionner... asséna-t-il sombrement.
Il n'osait imaginer ce qu'il se serait passé si Elias n'avait su le raisonner. En en étant parfaitement conscient, il allait devoir se montrer prudent.
Après le dîner, Marie s'était endormie sur le canapé. Attendri, il déposa une couverture sur ses épaules. Il ferait tout pour la protéger...
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Attraction
RomanceSon carnet et un crayon, voilà les deux objets que Marie a toujours en sa possession. Avec son grand-père Carl, elle vit au fond d'une forêt perdue, en Bretagne. Timide, elle fuit les habitants du village voisin. Et pour cause : son mutisme forme un...