Chapitre 42

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Marie jeta un œil à la fenêtre. La nuit était tombée et Joris lui manquait cruellement. Elle avait tenté de paraître sereine face à lui mais en vérité, les menaces reçues l'inquiétaient au plus haut point. Et se retrouver seule ce soir-là... Paula la rejoignit après de la fenêtre, déposant une veste sur ses épaules. La femme était venue à la demande de Joris.

-Il ne faudrait pas que tu attrapes froid. Monsieur ne me le pardonnerait pas ! Si tu savais comme je suis heureuse que tu ais retrouvé la parole ! dit-elle avec un clin d'œil, arrachant un sourire à la jeune femme. Ne te fais donc pas autant de soucis. Il revient demain soir, ça passera vite.

Marie hocha la tête. L'envie d'y croire y était mais quelque chose l'inquiétait malgré tout. Paula s'éloigna pour répondre à un appel pendant qu'elle malmenait ses doigts, perdues dans ses pensées.

-Marie, je suis vraiment desolée... revint Paula au bout de plusieurs minutes, gênée. Mon petit-fils a une grosse fièvre et ma fille et mon gendre sont en voyage à l'étranger.

La jeune femme accusa le coup. Elle s'efforça cependant de lui sourire.

-Ne vous inquiétez pas, souffla-t-elle de sa voix encore faible. Allez vite le retrouver, il a besoin de vous.

-Ça tombe vraiment mal mais je ne peux pas le laisser seul, attrapa-t-elle son manteau. Au moindre problème, appelez-moi ou appelez Joris. Tout ira bien...

La vieille femme passa ses doigts experts sur sa joue, de manière maternelle. Elle se retint d'agripper sa main pour la supplier de ne pas la laisser seule.

Mais elle hocha simplement la tête. La minute suivante, elle se retrouvait seule dans l'immense demeure. Ça n'était bien évidemment pas de la faute de Paula, mais celle d'un malheureux concours de circonstances. Cependant, elle ne pouvait s'empêcher de réprimer un frisson de peur alors que la nuit tombait, plus noire et plus terrifiante à chaque seconde.

"Allons Marie, tu n'es plus une petite fille ! Cesse de sursauter à chaque bruit alors qu'il n'y a rien !" se sermonna-t-elle toute seule.

Tentant de reprendre consistance, elle monta rejoindre son lit, impatiente d'être au lendemain.

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-Comment ça il n'y a jamais eu de congrès prévu !? hurla Joris sur le pauvre réceptionniste qui n'y comprenait rien.

Arrivé à l'hôtel dans lequel devait se tenir le congrès, il avait déjà été surpris par l'absence des journalistes et plus simplement de monde en général. Le hall était vide et les seules personnes présentes n'étaient manifestement que des clients de l'établissement. Après quelques vérifications, il avait vite obtenu les réponses à ses questions. Mais qu'avait-il pu se passer ? Ses associés étaient parmi les meilleurs, sélectionnés par lui-même. Jamais une telle erreur n'aurait été cautionnée.

... Sauf si de fausses informations leur avaient transmises volontairement. Tout s'assembla brutalement dans son esprit.

Marie !

Comment avait-il pu être si naïf ? Sans plus attendre, il courut au premier taxi, espérant que son jet privé pourrait le mener rapidement à elle.

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Le vent s'était levé, pliant les arbres en deux et poussant d'effroyables vagues sur les côtes de l'île. Si l'orage ne battait pas encore son plein, cela ne tarderait pas. Marie fut réveillée en sursaut par la sonnerie du téléphone qui reposait sur la commode aux côté du lit. Numéro inconnu. Mais le domaine dans lequel l'avait emmenée Joris était la plupart du temps inhabité. Les numéros n'avaient sans doute jamais été entrés dans le répertoire. Il pouvait très bien s'agir de lui ou de Paula qui s'inquiétaient. Sans grande nervosité, elle décrocha.

"Bonjour, Marie..."

La jeune femme réprima un frisson en constant que ça n'était ni Paula ni Joris. Sous le choc, elle se laissa tomber sur le lit. Sa voix qui s'était déliée lentement au fil des jours se retrouvait soudainement bloquée.

"Tu n'as pas à être effrayée. Tu sais, voilà longtemps que je t'observe. C'est formidable que tu ais retrouvé ta voix. Il me tarde de l'entendre à nouveau... Parle-moi donc, Marie..."

Les mains de la jeune femme tremblaient à un point qu'elle peinait à tenir le téléphone. Il s'agissait sans aucun doute du stalker. Et il lui semblait connaître sa voix. Mais qui ? Qui... Devant son silence, il continua son monologue.

"Bon, tu as décidé de garder le silence... Je ne t'en veux pas, je sais que ton accident a été terrible pour toi."

Les paroles et la façon dont il les prononçaient n'étaient pas en elles-même effrayantes. C'était le fait qu'elle ne connaisse pas son identité qui la terrifiait. Mais sa voix refusait de demander des explications.

"Sache juste que je suis près de toi en ce moment-même."

Marie sentit sa respiration s'accélérer encore. Mais elle ne devait pas céder à la panique. Il l'affirmait mais rien ne lui prouvait que c'était vrai.

"En passant, je trouve ravissante ta petite chemise de nuit en dentelle. Vraiment sexy..."

D'accord. Il ne mentait pas.

"Ne t'inquiète pas, très bientôt tu seras avec moi, et pour toujours."

Wesley. C'était Wesley. Comment avait-elle pu ne pas percuter plus tôt ?

La tonalité de sa voix. Sa façon de prononcer certains mots. C'était lui et il n'y avait aucun doute. Une multitude de questions envahissaient son esprit. Et Charlotte ? Il est marié avec des enfants. Que cherchait-il donc ? Pourquoi souhaite-t-il briser sa relation avec Joris ? Pourquoi lui fait-il subir tout ça ? Pourquoi est-il resté ainsi dans l'ombre pendant des années ?

Elle revoie encore son visage d'enfant, son premier ami à avoir pris soin d'elle.

Pourquoi !?

Pourquoi...

Sous la force du vent, la fenêtre de la chambre s'ouvrit soudain avec fracas, faisant voler les papiers, les rideaux, les draps, sa chemise de nuit. Si le choc précédent l'avait empêchée de réagir immédiatement, le froid et la peur de savoir Wesley juste à l'extérieur la poussèrent à laisser tomber le téléphone à terre pour la fermer.

Les papiers étaient retombés au sol, en désordre. Elle fixait à présent le combiné au sol comme s'il allait la brûler. Elle le fixait pétrifiée à la simple idée d'entendre encore un mot de sa part. Quand elle osa enfin s'approcher, elle constata avec stupeur qu'il avait raccroché.

Recroquevillée au sol, n'osant faire le moindre mouvement, un nouveau fracas la fit sursauter. Une ombre. Une ombre qui s'approchait.

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