Chapitre 53 √

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Alors que j'ignore la voix du prince qui ne cesse de m'interpeller, j'enfile rapidement mes vêtements trempés et avance le long du bassin.

Arrivée à la porte, je suis stoppée par la main de Solenn qui m'agrippe fermement. Ses ongles s'impriment dans ma peau lentement et je me retiens de ne pas lui en coller une.

- Qu'est-ce que tu fiches ici ? siffle-t-elle, le regard noir.

Je la jauge un court instant, ne laissant aucune émotion transparaître de mon visage. Comment peut-elle être aussi... méchante ? Comment peut-elle détester sa propre sœur ? Et comment ma mère peut-elle croire cette vipère plutôt que moi ?

Je laisse mes questions de côté alors qu'elle rajoute :

- Il est à moi. D'ici quelques jours, nous serons mariés alors va-t-en d'ici.

- Je te le laisse, Solenn. Je n'ai pas envie de me disputer avec toi maintenant alors ne t'en fais pas pour ça.

Les mots sortent de ma bouche sans que je puisse faire quoique ce soir et je cligne des yeux plusieurs fois en essayant de me reprendre. Oui. C'est la meilleure des solutions. Il n'a pas eu besoin de moi pendant ces deux mois ? Il n'aura pas besoin de moi après. Et puis, il n'a même pas cherché à me contacter après que je sois partie. Au final, il est fort possible qu'il mente. J'aimerais croire le contraire mais trop de choses se bousculent en même temps...

Il va se marier avec ma sœur.

Ma mère me dirait de ne pas tout gâcher et de les laisser profiter. Il faut que je me ressaisisse, que je me comporte bien et que je laisse faire le temps. Certes, j'éprouve des sentiments pour lui mais... Et Solenn ? Que penserait ma mère ? Que dirait-elle ? Oh, et puis merde.

J'en ai marre de me prendre toujours tout dans la tronche sans que personne ne fasse rien pour moi. Il y a bien eu une raison qui m'a poussée à quitter le palais ? Le prince et Solenn. Et si j'étais, au final, destinée à épouser Aiden ? Et si je me trompais depuis le début, et si mes sentiments envers le prince n'étaient rien ? Et que j'inventais tout ?

Éprise par beaucoup trop de doutes, je pousse la porte, l'air frais balayant mon visage doucement.

J'ai besoin de parler. Et je suis sûre et certaine qu'Ariane saura m'écouter.

• • •

- Tu en es au combien ? je demande en triturant mes doigts

- Cinquième mois, Mademoiselle, répond Ariane en baissant les yeux.

- Sarah ! Je m'appelle Sarah. Décidément, tu es vraiment têtue.

- Pardonnez-moi, Mademoiselle. C'est juste que...

- Arrête. Je vais te parler et tu vas m'écouter, d'accord ?

Ariane hoche docilement la tête. Je lui fais signe de s'assoir sur mon lit et elle semble hésiter un court instant mais finit par me rejoindre avec un sourire nerveux.

On m'a attribuée cette chambre d'amis alors que je me promenais comme à mon habitude dans les couloirs. Malheureusement, j'ai semé des traces de mon passage à cause de mes cheveux mouillés qui dégoulinaient sur le marbre et une domestique m'a attrapée. Elle m'a conduit à une autre femme qui m'a emmenée jusqu'à ma chambre d'amis. Si elle savait seulement que je ne suis pas une simple « amie » comme laissait le ton employé qu'elle a utilisé. Je suis Sarah Crawford, la seule et l'unique en son genre !

Mais bon, peu importe à présent. J'observe Ariane qui me fixe, attendant que je parle.

Je me lève, me racle la gorge et commence à tourner en rond dans la petite pièce en parlant :

- Bon, commençons par le commencement, j'imagine. Je suis partie du palais parce que j'en avais marre de Solenn mais aussi de l'atmosphère qui y régnait. Je voulais rentrer chez moi, dormir jusqu'à n'en plus finir, et profiter. Mon ancienne vie me manquait. En venant ici, je ne m'attendais pas à être autant détestée par pratiquement toutes les filles et encore moins à...

Je ne finis pas ma phrase, la gorge nouée. Je ferme les yeux et pousse un soupir. Ce n'est pas si grave au final ? L'amour est tellement compliqué...

- À quoi ?

- À tomber amoureuse. Ariane, si tu savais comment mon cœur rate des battements quand je l'aperçois, quand ses yeux se posent sur moi, je manque à chaque fois de m'étouffer et... Ariane, je crois que je suis amoureuse.

- Oh, mais c'est génial ça ! s'exclame-t-elle en souriant. Je vous l'avais bien dit.

Je roule des yeux et reprends :

- C'est peut-être génial mais c'est là qu'intervient le problème numéro un. Ma sœur. Elle me déteste, bon ce n'est pas une nouveauté à vrai dire mais il n'est pas là le problème. Le problème, c'est qu'elle veut le prince ! Et moi aussi. Et nous voilà bloquées.

- Mais et le prince ? Il vous aime ?

- Je ne sais pas... J'ai peur qu'il mente, peur de me faire des films.

- Mais... Je ne comprends pas. Vous êtes Sarah, la fille qui n'a peur de rien alors pourquoi vous bloquer à cause de votre sœur ? Foncez ! Allez lui dire que vous l'aimez.

- Et c'est là qu'intervient le problème numéro deux, je soupire. Ma mère. Elle est persuadée que je veux saboter la relation entre ma sœur et le prince. Je ne peux rien faire, Ariane. Je suis contrainte d'observer leur bonheur. J'assisterai au mariage, je finirai seule et dépressive. Voilà à quoi se résumera ma vie.

Ariane réfléchit longuement et alors que je m'apprête à clore notre discussion en la remerciant de m'avoir écoutée, elle intervient :

- Allez parler à votre mère. Comme ça, vous écartez le problème numéro deux et vous foncez vers le prince.

Je pèse le pour et contre et réplique :

- Elle ne me croira pas. J'aurais beau lui dire que j'aime Kaled, elle ne cessera de croire ma sœur.

- Alors ne faites rien. Laissez les choses se faire et agissez en fonctionnement de celles-ci. Vous savez, Mademoiselle, parfois il suffit juste d'écouter son cœur et de laisser faire les choses, pas besoin de préparer tout à l'avance. Laissez-vous guider et vous finirez par trouver votre bonheur, je vous le garantis.

𝐏𝐫𝐢𝐧𝐜𝐞𝐬𝐬𝐞 𝐒𝐚𝐫𝐚𝐡Où les histoires vivent. Découvrez maintenant