Vampiris Sanguinare T1 | y.seok - n.gi

06.

Lorsqu'il souleva ses paupières, Yoongi était baignée de lumière. Une lumière blanche, pure. L'éclat de cette peau exposée le surprit d'abord. Il contempla la paume d'une main inerte, ouverte face aux cieux, le long d'un flanc. Il en fixa longuement les traits, les sillons, le poignet découvert qui le rattachait à un bras, son bras. C'était la sienne. Sa main. Il ne la reconnaissait pas.

Étranger à tout ce qui l'entourait, la moindre chose sur laquelle il posait son regard ne faisait qu'accentuer sa confusion. Allongé sur un lit de peau et de paille, Yoongi ne reconnaissait pas non plus l'endroit, dont l'odeur de foin et de chevaux lui était à la fois familière et inconnue. De toute évidence, il se trouvait dans une écurie. Il entendait du brouhaha, des voix qui criaient des ordres, des discussions lointaines qui se superposaient. Le grattement d'un sabot attira à nouveau son attention sur ce qu'il y avait à proximité. Il s'était éveillé dans un monde qu'il ne saisissait pas.

Installé dans une stalle vide, sur un lit de fortune, Yoongi ne comprenait pas ce qu'il faisait là. Dans les boxes voisins, les montures renâclaient et soufflaient paisiblement. Son crâne était vide, ses souvenirs aussi. Tout ce qui remontait à avant son réveil n'existait simplement pas, et ça le troublait beaucoup. Il savait pourtant qui il était.

Lorsqu'il se redressa et posa ses pieds nus sur le sol de terre tassée, il leva la tête pour trouver la source de cette lumière, qui lui avait paru si éclatante en ouvrant les yeux, et qui s'était à présent estompée. Entre les poutres du voligeage, là où la toiture avait disparu, des cieux gris se dessinaient. Il porta une main à son front, le tâta sans y trouver la moindre chose, puis il fit de même avec son cou, sa gorge et son estomac. Comme s'il prenait conscience qu'il avait un corps. Il leva encore la tête, ahuri. Quelqu'un arrivait à grands pas.

La porte de l'écurie s'ouvrît. Une femme à l'allure forte; larges épaules, visage ovale. Elle se dirigea vers Yoongi, toute imposante qu'elle était. Confus, ce dernier eut envie de reculer en la voyant. Les mains calleuses de la femme frottèrent son tablier, essuyant la saleté des travaux passés.

« Comment ça va ? lui demanda-t-elle, sur un ton bienveillant qui tranchait avec son allure. Bien dormi ? »

Yoongi l'observa avec méfiance, puis hocha la tête lentement. La femme ne s'en formalisa pas. Elle tapota dans ses mains.

« C'est quoi ton nom ? lança-t-elle alors. T'en as bien un, pas vrai ? »

Le mutisme de Yoongi se prolongea, sa curiosité le déstabilisait. Il se força à articuler, mais sa voix sortit rauque et rêche; elle griffa sa gorge comme des échardes.

« Yoongi. »

– Eh bien Yoongi, comment tu te sens ? continua la femme. T'as mal quelque part ? Tu viens d'où ? »

La question éveilla chez Yoongi quelque chose d'étrange, un souvenir flou, un semblant de réponse instinctive. Une petite bâtisse, aux murs de pierres grossières. Elle lui semblait loin, tout comme son souvenir, et pourtant juste là sur le bout de sa langue. À portée d'esprit. Mais il ne savait pas où il se trouvait en ce moment, où se trouvait cette écurie par rapport à la bâtisse de ses souvenirs.

« Je suis où ? »

La femme, qui s'était courbée comme pour l'observer de sa hauteur, se redressa en posant ses poings sur ses hanches. Elle arborait à présent un air dubitatif; parce qu'il n'avait pas répondu, ou parce qu'elle avait finalement reconnu une quelconque sonorité, un accent dans sa voix ou son nom ?

Yoongi sentait cet environnement inconnu peser de plus en plus lourd. Et s'il n'était plus dans son comté ? L'idée, quoique floue et impensable, lui lia les entrailles.