17. Tu me le dirais si quelque chose n'allait pas, n'est-ce pas ?

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Mercredi après-midi, Madeleine ne rentre pas chez elle après les cours, car il a été décidé la veille qu'elle resterait en ville avec moi et qu'Angelina la récupérerait après son boulot. Autant dire que je suis super content. Savoir que je vais pouvoir passer un après-midi entier avec Mad, c'est comme si on venait de m'annoncer que j'avais gagné au loto.

Sauf que Madeleine n'est pas très en forme aujourd'hui. Et quand elle sort du conservatoire (elle a débuté à la rentrée), elle est à la limite de déprimer.

— Ça va ? demandé-je en fronçant les sourcils.

— Ça va, soupire-t-elle.

Elle ment.

Madeleine a beau être une bonne comédienne, je sais reconnaître désormais quand elle ne me dit pas le vérité.

— Dis, tu me le dirais si quelque chose n'allait pas, n'est-ce pas ?

Ma question reste sans réponse.

Son long soupir m'angoisse.

— Mad ? insisté-je.

Ses yeux bleus me survolent avant de retrouver leur sujet d'observation, soit le sol. Alors je fais un pas vers elle, retire la mèche de cheveux qui commençait à lui tomber sur la joue, pose mon doigt sous son menton et l'oblige à me regarder.

Je remarque aussitôt que ses lèvres tremblent.

— Qu'est-ce qu'il se passe ? continué-je d'une voix douce. Tu chantes si mal qu'ils ne veulent plus de toi en cours ? plaisanté-je.

Un sourire étire ses lèvres. Je préfère ça. Je préfère la voir heureuse ou amusée plutôt que... Je ne sais même pas comment je peux décrire son état d'il y a quelques secondes.

— Hier, mon prof de chant m'a contactée pour me dire qu'il souhaitait me voir car il avait quelque chose à m'annoncer. C'est pour cette raison que j'ai dit que l'on devait faire un arrêt ici... Et euh... Il y a dix minutes, il m'a dit qu'il voulait que j'intègre sa troupe de chanteurs pour son prochain spectacle.

Je lève un sourcil, prêt à entendre la chute. Mais celle-ci n'arrive pas.

— Et c'est pour ça que tu tires la tronche ? m'étonné-je.

Mes doigts caressent ses joues, attendant qu'elle me confie la suite.

— Je ne suis pas prête Gontran.

Décidément, elle le dit souvent ces derniers temps.

— Je... je ne le sens pas, souffle-t-elle en plantant son regard dans le mien.

Puis soudainement, elle explose. Elle se met à parler vite, sans respirer. Ses yeux se remplissent de larmes et je la perds dans un flot de contrariété :

— Le prof a dit que j'avais du talent. Peut-être, mais ma technique n'est pas bonne. J'ai commencé les cours il y a un mois seulement. Je ne peux pas me tenir à côté de chanteurs de quarante ans qui sont dans le métier depuis plus de vingt ans.

— Calme-toi Madeleine.

Elle ne m'écoute pas et continue :

— Je vais me faire écraser. Je vais être ridicule ! Ça va ruiner ma carrière. Déjà que je n'en ai pas vraiment puisque je ne suis bonne qu'à tourner dans un court-métrage qui est devenu un véritable flop.

— Arrête Mad, tu dis n'importe quoi. Tu as du talent.

— Je vais devenir la risée du conservatoire, enchaîne-t-elle, sourde à mes paroles. Je vais être rayée de la liste des jeunes artistes peut-être intéressants. C'est horrible Gontran ! Je vais me casser le gueu...

Près de toi 2 - Gontran Bavière (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant