Près de toi 2 - Gontran Bavière (Terminée)

22. La délivrance... ou pas

Contrairement à l'année dernière, j'ai cours jusqu'à 17 heures, et Madeleine finit à la demie, ce qui fait que nous n'avons qu'une demi-heure pour nous voir avant que les bus ne nous séparent.

C'est un peu court, mais nous ferons avec. De toute façon, nous n'avons pas le choix.

— Oui... Non Émile... Oh écoute hein ! J'fais ce que j'peux. T'as qu'à y aller toi ! Ah bon ? Mais c'est papa qui s'en charge du coup ?

Assis dans un des fauteuils de la cafétéria (jour de pluie), les bras croisés derrière ma tête, je regarde ma blonde rouler des yeux. Son frère l'a appelée il y a cinq minutes. Ces deux-là sont toujours incapables de se parler sans s'envoyer des tires. Ça doit vraiment être chouette à la maison...

Qu'est-ce que je raconte ? Je sais très bien que c'est chien et chat à la ferme. J'ai déjà passé plusieurs journées là-bas. Pas de nuit. Mais j'espère que ça viendra. J'aimerais bien suivre Mad le matin quand elle va récolter les œufs des poules avant de préparer le petit-déjeuner.

Je suis sûr que je trouverai un moyen de la distraire dans son boulot. Je le ferai rien que pour l'entendre me dire qu'elle me déteste alors que ses joues se coloreraient et que ses yeux me crieraient qu'elle m'aime. J'adore quand elle est contradictoire comme ça.

— Roh, mais bien sûr que je le sais ! roule-t-elle des yeux. Oui, l'argent est dans la pochette, dans le meuble à papiers... Tu trouves ?

Je n'ai aucune idée de ce qu'il se passe, mais Mad semble agacée.

— Bon, tu rappelles quand t'as trouvé hein... Quoi ? Ah, ça y est ? Ouais, c'est l'argent du tournage... Ben oui ! Je t'ai dit que je ferai des économies ! Pff, mauvaise langue va ! Ouais, c'est ça... J'raccroche... Mais oui, roh ! J'raccroche... Oh il m'énerve, il écoute pas.

Tout en retirant le portable de contre son oreille, elle verrouille ce dernier sous mon regard surpris.

— Tu lui as raccroché au nez ?

— Bah ouais, mais c'est de sa faute ! Il n'écoutait pas.

Bravo Émile, t'as réussi à l'énerver... Et je fais comment moi maintenant, pour la calmer ? Je veux dire, qu'est-ce que je peux faire, qui peut être vu par tout le monde, pour la détendre ?

— Qu'est-ce qu'il se passe ? demandé-je en me décalant d'un fauteuil pour me retrouver à côté de celui de Mad.

Son soupir ne me dit rien qui vaille.

— Tu sais que papa a découvert qu'Émile me donnait des cours de conduite dans son dos, n'est-ce pas ?

Je hoche la tête.

Elle me l'a annoncé au mois de juillet. Émile et Mad ont tout de même réussi à garder leur affaire secrète durant un certain temps. Peut-être plus longtemps que mon père et moi à propos des footings. Quoique... ce doit être kif-kif.

— Et ben figure-toi qu'il m'a annoncé mercredi que finalement, il trouvait que c'était bien le fait que j'apprenne à conduire, soupire-t-elle.

Je ne comprends pas où est le problème... Si elle voulait s'y mettre, ça devrait l'arranger, non ?

— Il veut m'inscrire au code, pour que je passe la conduite accompagnée par la suite. Je lui ai dit qu'avec les cours, le conservatoire et tout le reste, ça allait me faire beaucoup, mais il m'a répondu que l'année prochaine, ça sera pire avec le bac ! Donc bah du coup, il est allé se renseigner sur les horaires et les forfaits.

Madeleine boit quelques gorgées de son chocolat qu'elle a acheté en arrivant ici.

— Ça coute une blinde ces trucs ! C'est complètement dingue ! déclare-t-elle en secouant la tête. Bref, comme je ne veux pas qui se ruine pour moi, je lui ai dit de prendre l'argent que j'ai gagné pour le court-métrage. C'est pas grand-chose, mais ça l'aidera toujours un peu.