49. Sois patient

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Le mercredi soir, lorsque j'arrive chez moi (après mes heures de TIG), je décide de contacter Émile. Parce que si Mélissa ne peut pas me répondre concernant le soucis de Madeleine, je pense que son frère lui, sera en mesure de le faire.

L'avoir au téléphone, savoir qu'il se trouve sûrement à quelques mètres de la blonde, ça me fait bizarre.

Une part de moi se sent coupable, comme si j'étais en train de faire quelque chose que je ne devrais pas. Mais l'autre, l'autre est bêtement heureuse à l'idée d'être un peu plus proche d'elle. O.K, ce n'est pas physiquement et... Et je n'arrive même pas à expliquer la chose en fait.

— Écoute, je ne peux pas t'en parler Gontran. Tu sais que je t'apprécie, tu fais le bonheur de ma sœur et... Et entre nous, je te dis chapeau parce qu'elle a vraiment un caractère de merde quand elle s'y met. Seulement il y a certaines choses en ce moment qui sont un peu compliquées et je sais que ce n'est pas à moi de t'en parler.

Qu'il me confirme qu'il y a plus que la santé du père qui inquiète Madeleine, ça me rassure, car je comprends un peu plus sa réaction excessive de l'autre fois, mais ça m'inquiète aussi. Parce que j'ai l'impression de l'abandonner toute seule face à ses démons.

— Est-ce que je peux faire quelque chose pour elle ?

Le soupir d'Émile m'angoisse. On dirait presque que je viens de lui demander si elle ne compte pas m'éliminer de ce monde et qu'il doit cacher les intentions de sa sœur...

Bon O.K, peut-être que je délire un peu. J'ai laissé trop de liberté à mon imagination.

— T'es un mec bien Gontran. Vraiment ! Parfois, je me dis qu'elle ne se rend pas compte de la chance qu'elle a de t'avoir.

Je ne suis pas si bien qu'il croit. J'ai caché des choses à Madeleine, et je continue de le faire. Je sais que tôt ou tard, elle risque de découvrir la vérité sur ma santé qui se dégrade et sur Luna. Mais c'est plus fort que moi. Il faut tout le temps que je pense à la protéger. Et si durant quelques instants, je me dis qu'elle est saine et sauve, je ne peux pas m'empêcher de songer au fait que si elle apprend que je lui mens, elle s'effondrera probablement.

Je ne suis pas spécialement menteur en temps normal. J'ai déjà déformé la réalité pour éviter une réflexion de ma mère par exemple. Genre, quand elle me demande si j'ai rangé ma chambre. Et lorsque j'étais gosse, il m'arrivait de dire que mon père bossait pour des grands studios alors qu'il faisait des petits studios. Mais au final, je faisais toujours attention à être proche de la réalité. Je ne voulais pas de trop grosse différence.

Puis de toute façon, qui n'a jamais arrangé les choses à sa manière, pour épater les autres, pour les préserver ou se préserver soi ?

Seulement avec Madeleine, je sais que c'est différent. Quand elle m'a dit lundi matin que je ne la laissais pas entrer dans ma vie, j'ai eu envie de lui dire qu'elle débloquait. Mais après réflexion, je réalise qu'elle n'a pas tout à fait tort. Il y a une part de moi qui a peur. Peur qu'elle m'abandonne. Peur qu'elle souffre. Peur qu'elle me fasse souffrir. Et ça finit toujours ainsi : face à elle, je n'ai plus rien du Gontran que je suis devant les autres. Je n'ai plus aucune carapace. Je me sens en danger. Alors je me crée mes propres protections.

Des protections de merde, c'est vrai... Cependant le fait est là. Donc inutile de me dire que je foire tout. Parce que je le sais déjà !

— Seulement même si je t'aime beaucoup, je ne crois pas que je puisse te parler de ça. C'est... c'est à elle de t'en parler.

Putain, ça me frustre ce bordel, un truc de ouf.

— Mais elle ne me parle plus, Émile ! Elle ignore tous mes messages. Et j'ai bien vu à midi qu'elle n'allait pas bien. Je voudrais faire quelque chose mais...

— Laisse-lui un peu de temps, me coupe-t-il. Sois patient. Madeleine reviendra vers toi. J'en suis sûr. Elle revient toujours vers toi. C'est plus fort qu'elle. Elle ne peut pas sen empêcher. Mais je ne te garantis pas qu'elle puisse se confier tout de suite.

— S'il te plaît, dis-moi juste si la chose dont tu ne peux pas me parler était déjà arrivée le week-end dernier. J'en ai besoin Émile. Tu comprends, elle n'était pas comme d'habitude ces jours-là aussi !

Il soupire à nouveau tandis que je reste pendu à mon téléphone, le cœur battant. Bien évidemment, depuis que je suis sous traitement, j'ai remarqué que mon corps répondait moins violemment. Mon palpitant par exemple, n'aurait certainement pas tenu le coup face à la dispute de lundi si je n'avais pas été sous médoc. La douleur a été là, mais elle était plus minime.

Mais le fait est que dans mon esprit, la douleur est la même. Elle est juste plus centrée que d'habitude.

— On en avait entendu parler en effet. Mais ça s'est confirmé dimanche soir.

Je laisse mon dos reposer contre le mur.

Voilà pourquoi elle était si énervée !

Il ne s'agissait pas que du stress pour le spectacle. Il y avait autre chose. Peut-être quelque chose dont elle aurait pu me parler si j'avais insisté pour qu'elle se confie samedi dans la nuit... Au départ, elle m'aurait certainement dit que j'étais chiant, mais au final, elle aurait peut-être parlé.

Vu comment elle avait la haine envers son frère, je comprends tout de même que ça a un rapport avec sa famille. Seulement j'ai beau me creuser les méninges, je ne vois pas plus loin. En même temps, il y a tellement de scénarios possibles que c'est impossible pour moi de deviner.

Fait chier...

— D'accord. Merci Émile. Merci d'avoir répondu à mon appel et d'avoir répondu à ma question. Je t'en suis reconnaissant.

Il me dit qu'il n'a pas fait grand-chose et une fois de plus, je le remercie. D'ailleurs, je suis plus qu'honnête, même si j'ignore encore la nature du problème de Madeleine, je sais désormais que tout n'est pas de ma faute. Je sais que la boule de nerf qui m'a quasiment agressé lundi était en pleine séance de pétage de câbles. J'étais juste là au moment endroit et au mauvais moment. Comme Mélissa d'ailleurs...

Je me sens un peu mieux lorsque je mets fin à l'appel. Ma copine ne m'est toujours pas revenue, mais je vais peut-être faire confiance à Émile. Il faut que je lui donne un peu plus de temps. De toute façon, comme il a dit, elle revient toujours vers moi. Ce lien invisible qui nous lie, je sais qu'il n'est pas prêt de se briser. Ça fait la force de notre couple.

C'est plus fort que tout. Ça doit l'être en tout cas.

— Sois patient, murmuré-je pour moi-même.

Tout en fermant les yeux, j'essaie de chasser les parasites qui tentent d'envahir mes pensées. Et Dieu seul sait combien ils sont nombreux !

— Sois patient, me répété-je.

Oui, j'attendrai.

Je peux le faire.

Je n'ai pas le choix.

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NDA : Et voici le chapitre du jour ! Je sais, il est court (trèèès court), mais j'étais obligée de couper à ce moment-là, parce que... eh bien la partie suivante est totalement différente. Voilà...

Alors, que pensez-vous de la conversation entre Émile et Gontran ? J'aime bien leur relation, même si on n'en parle pas souvent xD

Des idées sur ce qui fout le bordel dans la vie de Madeleine (et dans celle de sa famille, d'après son frère d'ailleurs) ?

Près de toi 2 - Gontran Bavière (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant