52. Je deviens une épave, papa

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— Gontran ?

La voix de mon père raisonne dans le couloir et dans un moment d'espoir, je prie pour que la porte des toilettes se referme toute seule, comme par miracle. Parce qu'entre nous, je n'ai pas la force de la repousser avec mes pieds.

— Gontran ? continue de m'appeler mon paternel.

En entendant pleinement son ton grave, je comprends qu'il vient de me trouver.

— Fiston, ça fait cinq minutes que ta mère...

Il ne termine pas sa phrase et rentre dans la petite pièce en mode panique. Sans dire un mot, je le vois dérouler le papier toilette et enrouler ce dernier autour de sa main.

— Ça va aller, souffle-t-il en soulevant mon menton puis en essuyant ma bouche.

Je ne peux même pas lui parler. Le goût amer qui remplit ma gorge est trop fort encore. Je pue. Et je suis lessivé.

Mon père continue de me nettoyer tandis que d'une main lasse, j'essaie de tirer la chasse pour ne plus voir mon petit déjeuner au fond de la cuvette.

— Ça va aller, répète-t-il.

Je sais qu'il parle plus pour lui que pour moi.

Cela fait bien quatre jours que j'ai des vomissements à répétition. Le toubib a dit que c'était quelque chose qui arrivait assez souvent avec la prise de médicaments qu'il m'a donnée.

Ce mois de décembre n'a vraiment rien de magique pour moi.

— Comment tu te sens ? demande papa en faisant ce que je ne suis pas capable de faire.

Après m'avoir aidé à me relever, il abaisse le battant des toilettes.

J'aimerais lui répondre que tout va bien. Mais je n'en ai pas la force. Tout ce que je peux faire, c'est pleurer. Ces derniers jours, j'ai l'impression d'être une fontaine.

— Je suis là Gontran, souffle mon père en me prenant dans ses bras.

Doucement, il m'aide à rejoindre la salle de bains.

Aujourd'hui, les effets indésirables sont si forts que je me demande si je serais capable de me rendre au lycée lundi. Heureusement que le moment de crise arrive le week-end et que je suis à la maison. Déjà qu'alterner entre les chiottes et les salles de cours sans que les profs, les élèves et surtout Madeleine ne captent pas que je ne vais pas bien, c'était difficile, alors si j'avais été dans cet état, ça aurait été mission impossible.

— Tourne-toi, lance papa.

Un gant tiède s'écrase un peu brutalement sur ma joue avant de frotter énergiquement le reste de mon visage. La dernière fois qu'il m'a lavé la figure je devais avoir... En fait, pour être honnête, je ne m'en souviens pas. Généralement, c'était ma mère qui se chargeait de mon bain je crois.

— Florian ? Qu'est-ce que tu... Oh mon Dieu ! hurle ma mère en entrant dans la salle de bains.

Le gant quitte ma figure pour être remplacé par les mains de ma reum.

— Gontran chéri, qu'est-ce qu'il se passe ? Florian, qu'est-ce qu'il se passe !

La panique dans sa voix me fait comprendre que j'ai une sale gueule.

— Il vomissait. Je l'ai trouvé par terre dans les toilettes.

Ma mère étouffe un sanglot et me prend dans les bras. Ses doigts caressent ma nuque en même temps qu'elle me dit qu'elle est là et que tout ira bien.

Je me sens coupable de les inquiéter. Je me sens nul de ne pas pouvoir leur dire que je vais bien. Si seulement j'avais plus d'énergie...

— Les dents, il s'est brossé les dents ? demande-t-elle en se tournant vers mon père.

Près de toi 2 - Gontran Bavière (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant