Louise-049

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J'ai l'affreuse sensation que l'espoir se moque de moi. Qu'il est là pour me faire du mal, m'assassiner, me poignarder sauvagement dans le dos. Qu'il collectionne les cœurs, surtout brisés, et que le mien ne sera qu'un numéro exposé fièrement dans sa vitrine.

‒ Tu veux faire quoi ? je tente, comme si elle était en état de prendre une décision.

‒ Buter Mathieu. 

Ce n'est pas la réponse que j'attendais mais je peux comprendre, et comment d'ailleurs. Et ça ne fait que raviver ma colère. Il nous a bien fait son petit numéro avec sa femme qui l'a quitté pour une femme, ce qui ne justifie en rien son homophobie, mais il semblait plus perdu que dangereux. Comme quoi, il ne faut pas se fier aux apparences. 

Je n'ai pas le temps de remettre mes inquiétudes pour nous deux sur le tapis puisque la porte s'ouvre brusquement et manque de claquer contre le mur. Je suis prête à bondir mais je n'en fais rien. 

Une femme brune, à l'allure de mannequin pénètre dans notre bulle, mais ne parvient pas à l'éclater. Elle est entourée de quelques personnes prête à tout pour elle. Laurène et moi échangeons un regard perplexe. 

‒ Oh mon Dieu ! s'exclame l'inconnue. L'amour de ma vie est à l'hôpital ! C'est affreux ! 

Aussi clichés que soit ses mots, la manière dont elle les dit ne trahit en rien une folie. Mais plutôt une personne raisonnable, inquiète pour une autre. Je pense d'abord à une patiente évadée du service psychiatrique, mais ceux qui l'entourent ne ressemble en rien à des médecins en blouse blanche. Ils sont habillés de manière très chic, comme des gardes du corps, en moins formel. Mais qu'est-ce qu'il se passe ici ?

‒ Excusez-nous, mais vous devez vous être trompés de chambre, je dis calmement. 

‒ Absolument pas, affirme cette femme aux cheveux bruns. GRAVITATION, je suppose que vous connaissez, assène-t-elle à mon intention.

Je prend une bonne inspiration. Laurène attend simplement que j'arrive à la faire sortir.

‒ Oui, il me semble que je connais pas mal, je réponds.

‒ Alors vous devriez savoir qui je suis, elle réplique aussitôt.

Les trois hommes autour d'elle sont aussi neutres qu'un vase.

‒ Non, désolée. 

Elle roule des yeux.

‒ C'est pas grave, de toutes façons je ne viens pas pour vous, mais pour mon âme-sœur !

Elle croise les bras, je reste muette une seconde. 

‒ Ecoutez, je sais pas ce que vous voulez mais ce n'est pas le moment, Ok ? Laurène à besoin de repos. Repassez plus tard. 

‒ Je ne peux pas repasser plus tard, je serais vraiment indigne de faire cela, je suis là pour la soutenir ! 

Je me tourne vers ma copine, obligée de l'impliquer. 

‒ Tu la connais ? je demande. 

‒ Non mais je crois savoir, articule t-elle doucement. 

‒ Bien-sûre que tu sais mon amour, je savais que tu me reconnaîtrais au premier regard ! intervient l'inconnue. 

Je reste éberluée. Une boule se forme dans mon ventre, je suis toujours sans réponse. 

‒ C'est moi @vingt-cinq-ans, plus connue sous le nom de Jessica Etern.

Son nom provoque un déclic, ou une décharge, quelque chose de désagréable en moi. Jessica Etern est une actrice en vogue en ce moment, et je ne l'ai pas reconnue. Il faut dire que le seul moment où je m'intéresse à l'actualité c'est lors de la rentrée littéraire.  

‒ Et c'est maintenant que tu t'intéresse à nous ? je demande, effarée. Tu étais la personne la plus compatible avec nous deux, et nous venions te voir lorsque la fusée est tombée en panne, puis il y a eu l'incident. 

Je me tourne face à Laurène.

‒ Oui, et j'ai eu vent par les médias de l'état de mon âme-sœur ! Je n'ai pas hésité une seule seconde à venir. Oh excusez-moi, je ne suis pas venue seule, je ne vous ai pas présenté Luca à ma gauche. 

Il fait un léger signe de tête, à peine perceptible, il est grand et blond. 

 ‒ A ma droite, Théo.

Même signe de tête, même taille, cheveux noirs frisés. 

‒ Et Lucas avec un S, juste derrière.

Même signe de tête, même taille, cheveux noirs, pas frisés. 

Pour une femme compatible avec moi, j'avoue que cette première impression me laisse très perplexe. Je suis sûre que c'est pareil pour Laurène. 

‒ Donc ! Je suis venue conquérir la femme de ma vie ! s'exclame-t-elle en couvant Laurène du regard. 

‒ Pourquoi ce ne serait pas moi ? je demande, interpellée. Après tout nous avons la même compatibilité toutes les trois ! Je ne sais pas comment c'est possible, marmonné-je pour moi-même.

‒ Mais entre Laurène et moi c'est différent, j'ai tout de suis ressentie ce petit truc, dit-elle en mimant quelque chose de petit avec son pouce et son index. 

Tout ça avant d'éclater de rire. Moi je ne ris pas du tout, ma mâchoire est plutôt contractée. 

‒ Je plaisante les filles ! Je voulais juste vous faire peur ! dit-elle en pouffant. 

Je retiens mon souffle jusqu'à ce qu'elle avoue tout. 

‒ Par contre je suis bien Jessica Etern. Je suis là pour mon nouveau rôle qui va s'inspirer des passagers de GRAVITATION et je dois passer du temps avec vous pour m'imprégner de vos histoires. Je ne sais pas si vous savez ce qui se passe dehors mais vous êtes en train de faire une petite révolution.

En effet, je reconnais bien les traits fins de son visage que j'ai du voire à la télé quelques fois. Elle n'était tout de même pas obligée de venir faire sa comédie dans une chambre d'hôpital. Je ne lui réponds pas par des poèmes, moi. Je pourrais très bien dire :

Arrête ton cinéma.

J'en ai marre de tout ce drama.

Je n'ai rien demandé.

A la base j'étais juste une hétéro ratée. 

Même pas garçon manqué.

Et maintenant je suis une justicière lesbienne.

Pour démonter tous les clichés.

Avec ma copine, Laurène.

Ok, je m'emballe. Et je me remercie de ne pas avoir pensé à voix haute. 

Elle reprend :

‒ D'ailleurs j'ai quelques questions à vous poser, si vous le permettez. 

Je soupire, un peu décrispée.

‒ Elle demande l'autorisation maintenant ? je remarque. 

C'est sorti tout seul. Laurène étouffe un rire. De toutes façons, ça m'étonnerait que son corps ai la force de s'égosiller. 

‒ Désolée les filles, sérieusement je voulais juste vous changer un peu les idées ! Du coup, je voulais savoir si ça n'avait pas été trop difficile de cohabiter toutes les deux sachant que vous aviez la même personne compatible ? Je veux dire, vous auriez pu être rivales ? 

Cette fois c'est à mon tour de rire, et c'est nerveux.

‒ J'ai pu discuter un peu avec Clara et elle m'a dit que @vingt-cinq-ans à eu du succès avec ses conquêtes, c'est un des profils les plus suivis, après vous deux, et qu'elle allait peut-être rejoindre l'équipe des coachs sentimentaux, donc avec Laurène si je ne me trompe pas. Ça vous fait quoi ? 

Je ne savais même pas que nous étions suivies. Mais tout ça me ramène à la même question : et nous ? Et nous dans tout ça ?  

Avis ?:)

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