Louise-011

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J'ai la sensation que je me décompose de l'intérieur. Je ne comprends pas ce qui ne va pas chez moi. Je vois bien que je suis à côté de la plaque et je ne sais même pas pourquoi. Tout à coup l'image de Candace et Mathieu se donnant la main devant la tour Eiffel m'apparait ce qui m'inflige un énorme coup de blues : cette image n'est qu'un mensonge, depuis les premières lignes, tout est faux. Depuis combien de temps je me trompe à ce point-là ? Comment ai-je pu plonger à ce point entre des lignes qui ne tiennent pas debout, à m'enfermer sous celles-ci, comme les barreaux d'une prison. Et le pire dans tout ça c'est que je n'ai pas de dénouement. Je ne sais pas qu'elle est l'intrigue, le problème. Il faut que je me rendre à l'évidence : je suis bel et bien en train d'être aussi aveugle qu'une héroïne de roman, tout le monde comprend ce qu'il se passe, sauf elle. Et bordel, qu'est-ce que ça fait mal.

J'éclate en sanglot, malgré toute la force que j'ai déployée pour ravaler mes larmes. Heureusement je suis seule sur la banquette arrière puisque Laurène a dû l'aller aux toilettes, et les autres se sont dispersés sur d'autres sièges. Il n'y a plus que Garance et moi, mais celle-ci dort encore, du moins c'est ce que je croyais lorsque je lève la tête et que je la vois me fixer avec des yeux tout ronds. Mon cœur bat si fort que je ne me sens pas bien. Je vois bien que mon amie attend une explication ce qui me gêne d'autant plus : je ne sais pas ce qui m'arrive.

‒ J'ai envie de rentrer, lançai-je au hasard, je suis fatiguée.

Garance sort un paquet de mouchoir de son petit sac à dos, en extirpe un, et me le tend avant de passer son bras autour de mes épaules.

Il s'est passé quelque chose pendant que je dormais ? tente-t-elle, inquiète.

Je fais non de la tête et sèche le dessous de mes yeux d'un revers de la main.

‒ On ne peut pas rentrer maintenant ma belle, je suis désolée de t'avoir embarqué, j'aurais dû me douter que ça ne te plairai pas ! Je te promets de faire en sorte que la journée passe vite ! se résous-t-elle à dire pour me consoler.

Tout à coup, la femme tatouée et très peu lesbienne, s'arrête face à moi. Apparemment mon état la stoppe dans son élan. Si bien que je vois un mélange étonnant dans son regard. Elle s'approche un peu plus et commence à parler sous le regard méfiant et protecteur de ma meilleure amie :

‒ Ecoute ma grande, je suis désolée de t'avoir envoyé bouler tout à l'heure... tu sais quand tu m'as demandé si j'étais lesbienne ou quelque chose comme ça.

J'ai droit à un regard étonné et incompréhensif de Garance qui doit se demander si elle n'est pas encore en train de rêver. Je ne relève pas, me sachant déjà assez au fond du trou.

‒ C'est juste que j'en ai marre que les gens me prennent pour une lesbienne sans arrêt, reprend la tatouée. C'est vrai quoi ? On n'a pas le droit d'avoir les cheveux courts quand on est hétéro ? Des tatouages et le style qui va avec ? Tout ça parce qu'on aime les hommes ?

Elle s'emporte et poursuit son discours enflammé, si bien que deux ou trois têtes curieuses se tournent vers nous.

‒ J'en ai marre de l'image que les gens ont de moi ! Je n'ai rien contre les lesbiennes : loin de là ! ajoute-t-elle. Mais je n'en suis pas une et le monde entier pense le contraire à cause de... de je ne sais pas quoi d'ailleurs. C'est comme si nous étions des couleurs sans nuances ! C'est n'importe quoi.

Je regarde ses cheveux décolorés en blancs, et ses collants effilochés, on dirait une rock star. Tout à coup Garance prend parti avec la tatouée, ce qui me surprend, je n'attendais aucune réaction de sa part et je pensais qu'elle la traiterai de folle lorsque celle-ci aurait le dos tourné. Mais il n'en est rien.

‒ Je suis totalement d'accord avec toi ! s'engage Garance.

‒ Ah, tu vois ! continue la rock star, puis elle se tourne vers moi. Au fait, je ne sais pas pourquoi tu pleures mais si c'est de ma faute je m'excuse. Je suis très flattée si tu m'as abordé parce que tu voulais fleurter avec moi, ou quoi que ce soit, je sais que nous sommes tous ici pour trouver l'amour... continue-t-elle avec passion, mais JE NE SUIS PAS LESBIENNE.

Garance tente de décortiquer la situation, mais malgré tous ses talents de détective privée, je lis sur son visage que l'enquête n'est, pour le coup, pas une mince affaire. Nous sommes rejointes par Laurène, qui semble furieuse. Je vois des flammes jaillirent de son regard. Et je ne le sens pas bien du tout.

Elle me jette d'abord un premier regard, et je sais qu'elle sonde mes émotions sur mon visage, ce qui n'est pas difficile puisqu'il y a encore la trace de mes larmes sur mes joues bien que j'ai fait mon possible avec le mouchoir.

‒ Dégage de là ! lance-t-elle à l'intention de la tatouée.

Son ton est froid et autoritaire. J'en aurais presque frissonné. Elle est drôlement sexy quand elle s'énerve. C'est bizarre mais c'est la seule chose que je pense à l'instant précis. Cependant mon cœur palpite. Pourquoi Laurène fait-elle ça ?

La tension monte.

Garance à du mal à résoudre l'équation qui s'offre à elle : tout comme moi d'ailleurs. Mon souffle se fait court et j'ai comme des fourmis dans le ventre. Je tente de respirer calmement. Je pense que c'est la fin de Candace et Mathieu, sans vraiment savoir pourquoi. Je sais juste que Candace a décidé de mettre fin à sa relation avec Mathieu. Et pourtant ce n'est pas la fin de l'histoire : loin de là.

OTHER GIRLS 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant