|PRÉSENT|Je viens d'atterrir à l'aéroport de Paris CDG. Je sors de l'avion et vais prendre mes valises qui étaient dans la soute. Une fois mes bagages récupérés, je marche jusqu'à la sortie. Je vais prendre les transports et environ une heure trente plus tard, j'arrive dans mon quartier où j'ai toujours habité et la nostalgie m'envahit. Mes pieds sont posés sur le gravier du quartier, mes yeux distinguent parfaitement les tours, et pourtant, c'est comme si je n'étais pas réellement rentré. C'est comme si j'étais parti, et que le Anas qui avait l'habitude de vivre ici s'en est allé au Maroc et n'est plus jamais revenu. Comme si, un nouveau Anas faisait son entrée.
Il est tôt dans la matinée lorsque j'arrive devant ma tour. Rien n'a changé. Il s'est passé trois ans mais rien n'a changé. Je pose mes valises et m'assois sur le muret juste en face de ma tour. J'avais l'habitude de me poser ici avec l'équipe. Ou bien devant chez Ramy, Djibou ou Issa. On surnommait cet endroit le "QG". On avait l'habitude de se poser et de parler à toute heure. Aujourd'hui, assis sur ce même muret, je contemple le lever du soleil. Je n'avais jamais fait attention à l'incroyable vue que l'on a d'ici avant. Je ne regardais pas assez autour de moi, trop focalisé sur ma personne et mes problèmes.
Mon appartement paraît plus étroit. Dans mes souvenirs, j'avais plus d'espace. En posant mes affaires sur le canapé, je revois Naëlle en pyjama assise dessus à regarder la télé. Je la revois me sourire en me voyant entrer et venir m'embrasser en me demandant comment s'est passé ma journée. Le silence qui plane dans l'air me ramène à la réalité en me rappelant qu'elle n'est plus là.
Je n'ai jamais essayé de la recontacter. Il m'est déjà arrivé de penser à elle lorsque j'étais au Maroc, mais il ne m'est jamais venu à l'esprit de lui téléphoner et de prendre de ses nouvelles. De même, je n'ai jamais reçu ni un coup de fil ni un message de sa part. Je suppose qu'elle comme moi avons compris. Nos chemins se sont séparés et je doute qu'ils se recroisent un jour. Je ne regrette pas d'avoir partagé sa vie et d'avoir fait tout ce que j'ai fait pour elle. Je ne regrette pas non plus mes erreurs envers elle. Je ne regrette rien. J'ai appris à accepter. J'accepte d'avoir des défauts, j'accepte d'avoir pu lui faire du mal. Mais aujourd'hui tout ça est derrière moi. Chercher à avoir des nouvelles de Naëlle serait comme replonger dans un passé qui est révolu. Ça n'apporterait rien de constructif à ma vie.
Après m'être reposé, avoir pris une douche et m'être changé, je sors de mon appartement. Je marche en regardant le quartier qui a désormais un peu plus de vie qu'à mon arrivée. Nous sommes en Novembre, il fait frais dehors. Tout le monde a un manteau sauf moi qui ne transporte qu'une veste Nike. Je sens des regards interrogateurs. Certains se demandent qui est ce fou qui ne porte qu'une veste Nike et je sens que d'autres me reconnaissent mais n'osent pas venir me parler. Djibou m'avait averti qu'à mon retour ça parlerait. Selon lui, mon départ a beaucoup fait jasé les gens du quartier. Ils ont tous sorti leurs hypothèses sur la raison de mon départ. Certains pensaient même que je ne reviendrai jamais.
J'arrive devant la tour où vivent mes parents. La porte du hall est fermée. J'appelle un appartement au hasard et réponds "c'est moi". On m'ouvre sans vraiment savoir qui je suis. Après toutes ces années cette technique marche encore. Je souris en entrant dans le hall et en attendant l'ascenseur. Je suppose que certaines habitudes ne changeront jamais.
Lorsque j'arrive devant la porte de leur appartement, j'entends de l'agitation. Étrange puisqu'il n'y a que mon père et ma mère qui vivent dans notre ancien foyer familial. Je ne prends pas la peine de toquer, sachant qu'ils laissent toujours la porte ouverte et entre. Je vois des enfants courir dans le salon et je crois reconnaître Louna parmi tous les gosses présents. Plus j'avance et plus je découvre des visages familiers. Mon père, ma mère, Telma, Hussein, Inès, Mawan et Ramy sont tous assis autour de la table basse où est disposé du thé et des gâteaux. Ils ne m'entendent pas approcher à cause du bruit que font les enfants. Je m'arrête à quelques centimètres d'Inès en réfléchissant à ce que je pourrais faire. Finalement, je m'avance vers eux le plus naturellement possible en essayant de cacher le stress qui m'envahit. Je m'approche pour me servir des gâteaux et j'entends un silence qui s'installe progressivement. Je sens des regards sur moi mais continue de me servir. Lorsque je finis, je m'arrête à nouveau à côté d'Inès, je suis dos à elle. Tout en mangeant, j'ose finalement lever la tête. Tous leurs yeux sont braqués sur moi. Je vois de l'étonnement, de la surprise, mais surtout du choque.
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ANAS - Un mal pour un bien
General FictionJe me souviens comme tu n'avais pas peur de parler de ce mot, la mort. Moi, j'en ai toujours eu peur. Je n'ai jamais su pourquoi mais il m'effrayait. J'avais tellement de questions qui en découlaient comme : «Qu'est-ce qu'il se passe après ?» «Allon...