Chapitre 31

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Après mon appel téléphonique avec Naëlle, je suis resté encore une semaine au Maroc. Bien que l'ambiance était au rendez-vous, je n'étais pas d'humeur à faire la fête. Les propos de Naëlle m'ont perturbés. Alors comme ça, il m'arriverait de l'appeler Yazel sans m'en rendre compte ? Impossible. Carrément improbable. Je suis maître de moi-même quand même. Je m'en serais forcément rendu compte. C'est sûr.

Seulement voilà, j'ai beau avoir essayé de me convaincre dur comme fer qu'elle m'embobine, ses raisons m'échappent. Il faut être honnête, elle ne gagne rien à me mentir, et je sais qu'elle ne le fait pas. Elle me dit la vérité, c'est ça le plus dramatique.

J'ai passé la majorité de mon temps à cogiter. Je me suis littéralement creusé, retourné le cerveau dans tout les sens. Une partie de moi veut rester et avancer avec elle. Mais une autre partie m'encourage à la quitter pour ne pas la faire souffrir davantage. Elle ne doit pas qu'elle perde son temps avec moi si je n'en vaux pas la peine. Ouais, c'est ce que j'ai réussi à me convaincre durant ma dernière semaine. J'étais persuadé de faire le bon choix mais une fois de retour en France, j'ai complètement perdu mes moyens. Mon courage s'est envolé lorsque j'ai vu son joli visage en face du mien. Elle a réussi à me faire douter. Après tout, ça lui fera plus de mal que de bien si je la quitte. Sans compter que je me retrouverais une nouvelle fois seul après tant d'années. Je suis bien avec Naëlle, pourquoi toujours tout compliqué ? C'est simple, je ferais plus attention au prénom que je prononcerais. Au pire, si je me trompe, elle n'aura qu'à me corriger. Elle comprendra que je ne le fais pas exprès. Elle est très compréhensive, je suis sûr qu'elle arrivera à saisir.

Pendant que je me persuade que tout ira bien, j'ouvre mon placard et y sort mon ensemble Champion. Je l'enfile et me chausse de mes basket Nike. Je suis fin prêt et beau gosse en plus de ça. Un dernier petit passage devant le miroir qui a pour but de me rassurer et me voilà parti. Mon programme d'aujourd'hui consiste à emmener Naëlle au KFC. Ça fait une semaine que je suis rentré de France et nous ne nous sommes toujours pas captés seul à seul. Bon, j'exagère un peu, je l'admets. J'ai eu plusieurs fois l'occasion de la croiser au quartier avec Maëlys ou bien avec un sachet de grecs dans les mains. Mais cette fois, c'est différent.

Je me dirige vers l'étagère où toutes les clés de l'appartement sont habituellement posées mais ne trouve pas les miennes. Mon père est au travail donc il ne les a pas pris. J'entre dans la chambre de ma mère sans toquer et la vois au téléphone. J'articule pour lui demander si elle est celle qui a pris mes clés mais elle répond négativement. Je referme alors la porte doucement et arrive au salon où se trouve mes deux sœurs.

— Quelqu'un a vu les clés de ma gova ?

Seule Telma m'atteste ne pas les avoir vu. Aucun son ne sort de la bouche d'Inès. Je répète donc ma question mais en m'adressant personnellement à elle :

— Inès, mes clés tu les as vu ou pas ?

Elle me regarde surprise, bégaye puis m'affirme également ne pas les avoir vu. Elle est choquée que je lui ai parlé. Pourtant, il n'y a pas de quoi l'être. C'est elle qui a conclu qu'on ne se parlait plus. Personnellement j'ai jamais dit ça.

— Putain. Papa a pas pris ma voiture quand même ?

Telma — Regarde dans les poches de tes jeans. C'est pas la première fois que ça t'arrives.

— Ah ouais, bien vu !

Je me rends dans ma chambre et fouille les poches de trois jeans avant de les trouver dans mon quatrième et dernier jean. Je remercie Telma puis sort de l'appartement en chantonnant. Je parais serein et heureux de l'extérieur mais la vérité est que je stresse de voir Naëlle.

ANAS - Un mal pour un bienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant