Chapitre 31 : Black Angel

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—    Toujours pas prête ? demande Sandro en retirant son casque.

Il replace ses mèches à l’arrière en me scrutant de la tête aux pieds et je remarque tout à coup le deuxième casque, calé entre lui et le réservoir. Mes soupçons se confirment.

—    Cali… j’adore cette robe mais pour ce que j’envisage, elle est loin d’être pratique.

Sandro descend de son deux-roues. Mes yeux scrutent son blouson en cuir puis sa monture. L’angoisse m’envahit. Je fais un pas en arrière, puis un deuxième en fixant la moto.

—    C’est mort ! Je ne monterai pas !

Paniquée, je fais volte-face et fonce me réfugier dans le magasin, la peur au ventre et Sandro sur mes talons.

—    Cali, tu ne risques rien, je te promets que j’irai doucement.

Il peut dire ce qu’il veut, je n’ai qu’un objectif :  m’enfermer dans la réserve. Je veux être seule, oublier la moto, effacer ces images qui déferlent dans mon crâne. Sandro accélère sa foulée, je me mets à courir. Plus qu’un mètre et j’y serai. La main tendue, prête à enclencher la poignée, il me saisit par l’épaule, me retourne en me collant contre le mur.

—    Mais pourquoi tu fuis. T’as peur de quoi ?

—    Lâche-moi !

J’essaie de me dégager.

—    Non ! Dis-moi pourquoi t’es affolée. Qu’est-ce que t’as ?

—    Je ne peux pas monter dessus, c’est trop dur.

—    Explique-moi, je ne comprends rien !

Ma tentative pour prendre le large échoue une nouvelle fois. Déterminé à obtenir le fin mot de l’histoire, il m’implore de lui parler. La tête basse, je me résous à l’inévitable, prends une grande inspiration et débute le timbre éraillé :

—    On a eu un accident avec Joye, je conduisais la moto…

Machinalement, je fixe par-dessus son épaule le roadster garé devant la vitrine et mon cœur se comprime face à la fatalité.

—    Je… je ne sais pas si le destin me joue des tours ou s’il a encore décidé de me torturer mais j’avais exactement le même modèle que toi.

Ma terreur fait face à sa compassion et doucement, il relâche sa poigne.

—    Tu veux que je m’assoie derrière toi… mais je suis tétanisée rien que d’imaginer grimper dessus.

Je secoue la tête, passe mes mains nerveusement sur mon visage et lui fais part de mes craintes.

—Qu’est-ce que tu feras si dans un virage je me braque, si j'ai des mauvais reflexes et qu’on perd l’équilibre ? Ou si un taré nous percute avec sa voiture ? Ne me dis pas que tout ira bien, personne ne peut le savoir, personne n’est à l’abri d’un accident. Je l’ai vécu, je sais ce que ça fait d'être écrasée par de la tôle, de sentir son corps en lambeau… Je ne veux pas revivre l’enfer des hôpitaux. J'ai beaucoup trop souffert. Ce que tu me demandes est au-dessus de mes forces… je ne peux pas…. je ne peux pas… je…

La crise d’angoisse s’empare de moi. La poitrine oppressée, l'air peine à rentrer dans mes poumons. Sandro m’encercle par la taille et me blottit contre lui.

—    Shuuut… shuuut, calme-toi, respire doucement, prend ton temps, murmure-t-il en restant d’un calme olympien.

Je cale peu à peu ma respiration sur la sienne, en inhalant l’odeur apaisante de son parfum mêlée à celle de son cuir. Sa force tranquille mapaise, l’accalmie revient et je me laisse aller contre lui. Il caresse mon échine dans un lent va-et-vient quand sa voix suave resonne et adoucit mon stress.

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