7 - La salle des jugements

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La curiosité de la jeune fille s'éveillait lorsqu'elle traversait le bâtiment, oubliant complètement la situation délicate dans laquelle elle était. Toutes les pièces étaient identiques à celle où elle avait été soignée, à l'exception des plafonds qui représentaient des scènes différentes, glorifiant l'Humain et ses actions, tout en dénonçant les méfaits de l'existence des Créatures.

Lorsqu'ils passaient devant la sixième pièce consécutive, Calya préférait éviter de lever la tête ; c'en était trop ! Le plus déroutant était que chaque peinture portait la signature d'Azurtan Carpen.

La jeune fille reprenait aussitôt ses esprits lorsqu'elle empruntait un long couloir. En son milieu se trouvait un ascenseur de verre. Attirant les regards de plusieurs personnes à la fois, elle surprenait quelques bribes de conversations qui à son approche, se transformaient en murmures. Calya n'était pas dupe. Elle savait qu'elle était le sujet principal de leur conversation. Celle-ci se doutait que toute la communauté avait été avertie de son procès.

Ils montaient dans l'ascenseur transparent, pour s'enfoncer davantage dans l'Abri. Souffrant de vertige, Calya se retenait de regarder ses pieds. Quelques instants après, les portes s'ouvraient sur le troisième sous-sol, comme l'indiquait le numéro sur le mur blanc en face d'eux. Tous ces couloirs de la même couleur formant un véritable labyrinthe lui donnaient le tournis. Après ce qui lui paraissait être des heures, Calya et le garde arrivaient enfin devant les portes. Stupéfaite, la jeune fille constatait qu'elle n'était pas juste recouverte, mais entièrement faite d'or. Elle tentait d'un geste délicat, de poser sa main dessus, sauf que le garde l'en empêchait d'une tape sèche sur sa main. Calya lui jetait un regard noir, mais elle ne rencontrait qu'un masque. Alors elle secouait vivement la main pour lui montrer que son geste n'était pas nécessaire.
Le garde l'ignorait tandis qu'il assenait un violent coup à la porte. Calya levait les yeux au ciel. Attendant le signal, il soufflait dans un murmure :

— Agora Chi !

Comme par magie, la porte s'ouvrait. Il saisissait brusquement Calya par le bras. Hébétée par ce qu'elle venait de voir, elle tentait en vain de se dégager de son emprise.

Aussitôt, Calya était frappée par le contraste entre les maisons d'Algar et la beauté de cette pièce, entièrement faite d'or. Il n'y avait pas de fenêtre puisqu'ils se retrouvaient sous terre. Pourtant, quatre grands lustres somptueux, qui touchaient presque le marbre, émettaient une source de luminosité telle qu'on se serait cru en pleine journée. Les quelques tables en or, calées contre les murs, illuminaient la vaste salle. En soit, il n'y avait rien d'autre comme objet. Cela montrait à quel point l'Abri était riche, comparé à la ville entière. Dans cet environnement et plus particulièrement dans cette pièce pleine de luxure, Calya se sentait piégée. N'étant pas à sa place, des dizaines de pensées surgissaient dans son esprit...
Plongée dans de profondes réflexions, la jeune fille ne se rendait pas compte qu'elle était seule. Peu à peu, l'angoisse grandissait en elle, ignorant toujours le châtiment qu'elle allait subir.

Bientôt, des bruits de talons martelaient le sol, arrachant Calya de sa contemplation. Hildegarde traversait son champ de vision, de façon à se planter devant elle. Calya grimaçait. Sa jupe blanche serrée retombant juste au-dessus de ses genoux, lui laissait entrevoir ses pansements aux mollets. S'était-elle battue ? Avec qui ?

— Venez avec moi. Je vous accompagne dans la salle des jugements.

Avant que la rousse n'ait le temps d'acquiescer, Hildegarde s'emparait rapidement de ses poignets qu'elle menottait entre eux. Calya prenait ça pour de la provocation contrairement à Hildegarde qui lui offrait un léger sourire.

— Pourquoi suis-je menottée ? demanda-t-elle d'un ton espiègle.

— Pour éviter que vous preniez la fuite, trancha Hildegarde d'un ton glaçant.

Les deux femmes se dirigeaient à présent d'une même cadence vers une seconde porte en or, plus petite que la première. D'un geste précis, Hildegarde l'ouvrait.
Calya pouvait dès lors observer qu'une immense table entièrement faite de marbre blanc habillait le milieu de cette nouvelle pièce. Plusieurs regards se tournaient dans sa direction. Environ une quinzaine de personnes la dévisageait, renforçant son malaise. Qui était tous ces gens aux visages inconnus ? Tout cet abus de blanc lui donnait mal à la tête. Le cœur battant à toute vitesse, les mains menottées, elle se retrouvait comme pétrifiée. Elle se sentait grandement menacée. Hildegarde s'efforçait de la pousser d'une main dans le dos vers le milieu de la salle. Calya n'avait pas d'autre choix que d'avancer, son bras droit blessé se trouvant dans une position des plus inconfortables pour elle.
Paniquée, elle cherchait en vain un visage familier parmi ces nouvelles personnes. Malheureusement pour elle, Calya était toute seule.

Comme pour se rassurer, elle ne quittait pas Hildegarde du regard, se rappelant brusquement qu'elle avait été celle qui avait renvoyé son père du Zoo Fairy comme un mal propre, après son attaque par une Panthère. Hildegarde n'avait pas hésité à l'humilier devant ses collègues, le plongeant ainsi dans une dépression de trois longues années... et ça, Calya ne l'avait pas oublié contrairement à elle.

— Ravi de tous vous revoir assit à cette belle table, je vous souhaite la bienvenue ! déclara Hildegarde, les yeux fermés, c'était leur manière de se saluer entre eux. Si j'ai fait appel à vous aujourd'hui, c'est que l'heure est grave. En effet, cet après-midi aura lieu le procès de Calya Tororgnor, ici même présente.

Elle désignait la jeune fille d'un simple geste de la main. Quelques bavardages s'élevaient de tous les côtés de la pièce. Les joues rouges de honte et de panique, Calya détournait le regard. Aucun murmure ne la faisait réagir, son cerveau avait comme cessé ses fonctions.

LE ZOO FAIRY : Une nouvelle ère Où les histoires vivent. Découvrez maintenant