De bien mauvais souvenirs (partie 2)

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La jeune fille fronçait les sourcils en dévisageant l'Elfe. Son visage lui revenait soudainement en mémoire ; elle se rappelait l'avoir vu durant son enfance dans l'enclos des Elfes. Puis elle se souvenait étrangement d'un bébé à côté des barrières et d'une femme en train de pleurer en le regardant. Calya ne mettait pas longtemps à faire le rapprochement...

— Je peux enfin te voir, ma fille.

Ses mots lui faisaient l'effet d'un coup de poing dans le ventre. Nyséa Tororgnor, sa mère, se tenait devant elle. Calya se sentait complètement démunie. Elle s'était imaginé tant de fois face à elle, et toutes les questions qui lui étaient destinées semblaient s'être envolées. Comment devait-elle réagir ? Elle gardait ses quelques rancœurs dans un coin de sa tête. Ne sachant même pas par où commencer...

— J'ai appris ce que tu as fait pour les Créatures du Zoo. Tu nous as rendu notre bien le plus cher.

Calya ne savait pas quoi lui répondre. Juste lui dire merci ? Mais, merci pour quoi au juste ? Merci de l'avoir abandonnée alors qu'elle venait à peine de naître ? Merci de lui avoir menti toute sa vie ? Merci de l'avoir poussée à vivre parmi les Humains ? Merci de l'avoir sans cesse exposé au danger ?

Peinée, Nyséa s'approchait un peu plus d'elle. Pouvait-elle lire en Calya ? Et comprendre tout ce qu'elle ressentait en cet instant ?

La jeune fille aurait aimé pouvoir discuter avec elle et lui répondre normalement. Mais quelque chose l'en empêchait, elle était comme bloquée devant cette mère qu'elle découvrait. Elle n'était en rien semblable à tout ce qu'elle avait pu imaginer.

— J'ai du mal à croire que tu sois en face de moi.

— Tu m'as abandonné, trancha Calya en parlant pour la première fois.

C'est la rancœur sortie tout droit de son cœur qui parlait. Les épaules de Nyséa s'affaissaient. Calya comprenait aussitôt qu'elle l'avait blessé. Elle avait parlé sans réfléchir, ayant été un peu trop brusque. Nyséa relevait ses yeux remplis de tristesse vers sa fille qui avait la mâchoire contractée. Malgré le tourbillon de sentiments qu'elle ressentait, elle entendait la colère de son enfant.

— J'imagine qu'il m'est impossible de me faire pardonner.

— Non, en effet.

Par fierté et rancœur, Calya voulait prouver à sa mère qu'elle pouvait très bien s'en sortir sans elle. Depuis son enfance, elle avait vécu et s'était toujours débrouillée sans sa présence. Sa sensibilité prenait le dessus et c'est l'enfant en elle qui était en train de réclamer sa mère. Elle détestait la petite fille qui vivait encore en elle, et qui au fond, n'avait jamais perdu espoir de se voir un jour réuni avec ses vrais parents. Un désir d'enfance qui se révélait encore plus maintenant qu'elle était adulte.

— J'ai agi bêtement, je n'aurais jamais dû partir à la recherche de Zerus... je ne t'ai pas aidé. Tu es mon plus grand regret, Calya.

Elle s'approchait un peu plus de sa fille, arrivant juste à côté d'elle, là où s'était tenu Idríl quelques minutes auparavant. Nyséa aurait voulu prendre sa main, cependant elle préférait ne pas tenter le coup, craignant le fait d'être rejetée.

Est-ce que cela était censé adoucir Calya ?

— Actuellement non, répliqua aussitôt Calya, tu m'as plus rendu service qu'autre chose. Grâce à ta lâcheté, j'ai pu grandir ailleurs que derrière les barreaux de ce misérable enclos du Zoo. J'ai eu une belle enfance, et une adolescence remplie de bonheur. Tu m'as sauvé d'une certaine manière.

Calya était en train de cracher ce qu'elle avait au plus profond d'elle. À côté, Nyséa restait sans voix. Elle avait craint qu'en retrouvant sa fille, celle-ci ne daigne même pas à lui adresser la parole.

— J'espère que tu arriveras un jour à me pardonner, lança sa mère d'un ton rempli de sincérité.

Calya se contentait de la fixer, elle avait beaucoup de questions à lui poser, mais elle était très fatiguée.

— Je souhaite me reposer.

Comprenant que Calya mettait fin à leur discussion, elle se relevait tristement avant de se tourner doucement vers son enfant :

— Tu as été courageuse, ma fille.

Calya se prenait aussitôt la tête entre ses mains. Elle s'autorisait alors à relâcher tout ce qu'elle avait gardé en elle, laissant doucement venir les larmes. Elle savait qu'elle aurait besoin de temps pour apprendre à connaître et à pardonner sa mère.

Elle finissait par s'endormir.

LE ZOO FAIRY : Une nouvelle ère Où les histoires vivent. Découvrez maintenant