Le plan d'évasion (partie 2)

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Poussant un gémissement, Azurtan se frottait la tête. Par erreur, il s'était pris la porte en plein fouet. Hermine se redressait précipitamment.

— Que se passe-t-il ? demanda-t-il, légèrement décontenancé.

Regrettant de l'avoir cogné, gênée, Hermine se pinçaient les lèvres.

— On vient te libérer, expliqua brusquement Calya. On parlera plus tard.

— Partez ! hurla Patrick en revenant sur ses pas.

Calya pouvait sentir toute la détresse et l'angoisse dans sa voix. Le jeune garçon quittait son cachot sans une seule hésitation, jetant néanmoins quelques coups d'œil inquiets derrière lui. Connaissant les couloirs par cœur, c'est Patrick qui les accompagnait, suivi de près par son épouse. Marilyn s'efforçait de faire abstraction de sa douleur lancinante.
À bout de force, la jeune fille s'essoufflait de plus en plus. Après plusieurs minutes passées à courir, la petite porte en bois dont Marilyn avait révélé l'existence un peu plus tôt, se dessinait enfin devant eux. Patrick l'ouvrait d'un coup sec.

Dehors, il faisait déjà nuit et le vent soufflait fort. Marilyn faisait un tour sur elle-même avant de se précipiter vers Calya, lui adressant un regard qu'elle n'était pas près d'oublier. Dans son cerveau se livrait une bataille. La jeune fille comprenait rapidement qu'elle ne s'en sortirait pas vivante d'ici. Épuisée, sa mère avait perdu trop de sang. Comme pour affirmer les craintes de son enfant, elle baissait le regard vers sa blessure : la balle en argent avait commis bien des dégâts. Des larmes coulaient le long de ses joues, elle se savait condamnée. Cependant, elle pouvait avoir la conscience tranquille puisque Calya était libre.

— Ma chérie, on a réussi.

Ces quelques mots brisaient Calya. Comme s'il sortait d'un long cauchemar, Patrick se précipitait vers Marilyn. Impuissant, les yeux ronds, il observait la femme qu'il aimait s'éteindre à petit feu.

— Marilyn, souffla-t-il, la voix complètement cassée.

— Dis-lui ce qu'il lui reste à faire, soupira son épouse.

Attristé, Patrick relevait la tête vers Calya. Azurtan se tenait en retrait, baladant son regard dans les alentours afin de s'assurer qu'ils ne risquaient rien malgré leur proximité de l'Abri.

— Ma Calya, reprit son père en fixant son épouse, tu dois trouver Constantin. Il est le seul qui pourra répondre à tes interrogations. Il veillera sur toi, mon enfant. Suit ton instinct, il te guidera.

Bouche bée, Calya restait silencieuse. Comment ses parents pouvaient-ils le connaître ?

— Calya, on devrait y aller, lança doucement Hermine en fixant la porte en bois.

Sauf que la jeune fille ne pouvait pas bouger. Il lui était impossible d'abandonner sa mère alors qu'elle avait encore besoin d'elle. Patrick, après avoir libéré sa fille et Azurtan de leurs menottes, prenait calmement Marilyn dans ses bras, afin de s'asseoir sur le goudron frais. Ils n'étaient plus qu'à quelques mètres de la grille, la forêt leur tendait les bras.

— Calya, tu devrais écouter Hermine, les gardes ne vont plus tarder à arriver, annonça gentiment Patrick.

— Je ne peux vous laisser là ! Maman est blessée. Et toi...

Elle ne terminait pas sa phrase que la porte claquait. Des gardes arrivaient. Brusquement, sans réfléchir, Azurtan attirait Calya avec lui dans un passage souterrain. Des voix s'élevaient, rompant ainsi le silence qu'avait laissé le départ de la jeune fille. En jetant un dernier coup d'œil derrière elle, les joues inondées de ses propres larmes, Calya observait qu'un garde pointait une arme en direction de ses parents, sans défense. Azurtan, conscient de ce qu'elle venait de voir, s'empressait de lui cacher la vue.

Un bruit sourd perçait la mélodie du vent. Calya frissonnait en pensant au pire. Un cri de détresse s'échappait de ses lèvres, rapidement étouffé par la main d'Hermine. Son amie se forçait à dissimuler ses cris. Azurtan prenait alors la tête de la marche, laissant Calya se calmer dans les bras de la brune.
Au bout de quelques kilomètres parcourus, après s'être suffisamment éloigné du Zoo Fairy, ils se retrouvaient à présent dans la forêt d'Ironhealth. Azurtan rompait le silence en s'orientant grâce à la lumière que renvoyait la lune.

— Il y a un lac plus très loin. Je connais relativement bien cet endroit grâce à la chasse, on pourra y passer la nuit en toute sécurité.

Hermine et Azurtan marchaient à tâtons dans la forêt, zigzaguant parmi les arbres, la lune ayant disparu sous les épais feuillages des arbres. Ils ne voyaient plus rien dans la nuit. Le garçon agitait maladroitement ses mains autour de lui, pour se protéger d'éventuels obstacles.

— Attention à votre gauche, lança Calya d'une voix faible. Il y a une clôture.

Azurtan cessait aussitôt ses mouvements.

— Comment le sais-tu ? bredouilla-t-il, penaud. Tu es déjà venue ici auparavant ?

— Calya voit dans l'obscurité la plus totale ! lui répondit Hermine d'un ton enjoué.

Azurtan se gardait de dire qu'il trouvait cela intéressant.

Le silence entre eux s'installait comme une quatrième présence, tandis que Calya repensait à ses parents. Dans son esprit, tout était encore trop flou.
Un craquement de branche suivi d'un petit cri faisait sursauter les deux amies. Par automatisme, Hermine plaquait les mains sur sa bouche, étouffant un hurlement. Un peu plus loin devant elles, une ombre sortait du lac. En se concentrant davantage, Calya reconnaissait ses cheveux bleus aplatis et plaqués sur son front. Agacé, Azurtan venait de glisser par mégarde dans l'eau glacée du lac. Il grognait.

— Je croyais que tu avais la capacité de voir dans le noir ! râla-t-il en secouant la tête. Pourquoi ne m'as-tu rien dit ? Me voilà trempé par ta faute !

Calya était trop occupée à penser qu'elle en avait oublié de le guider.
Épuisés du voyage, ils décidaient de se coucher entre deux arbres, là où le sol vêtu de feuilles automnales semblait être le plus plat.

— Comment te sens-tu ? se risqua Hermine d'une voix douce.

— Fatiguée, répliqua simplement Calya.

— Ne t'en fais pas, ensemble, on trouvera l'Oracle.

Calya ne pouvait pas ignorer le fait qu'Hermine prenait grandement sur elle en cet instant. En effet, d'une nature plutôt anxieuse, elle n'avait guère l'habitude de se retrouver hors-la-loi. Or là, elle venait de prendre délibérément la fuite avec Calya. Cette dernière lui était d'ailleurs très reconnaissante d'être restée à ses côtés. À présent, Hermine était devenue une fugitive elle aussi.
Calya orientait son regard en direction des étoiles. Elle s'autorisait un instant de répit, laissant couler silencieusement plusieurs de ses larmes. Ses pensées se dirigeaient vers ses parents, qui n'avaient pas hésité un seul instant avant de lui sauver la vie. La jeune fille leur vouait une reconnaissance éternelle.

LE ZOO FAIRY : Une nouvelle ère Où les histoires vivent. Découvrez maintenant