Une part d'ombre (partie 2)

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Comme le garçon gardait le silence, impatient, Thalion lui attrapait violemment le bas du visage. De cette manière, il l'obligeait à le regarder droit dans les yeux, ainsi, il ne pouvait pas briser leur contact visuel.

— J'exige une réponse de votre part !

Níniel pouvait sentir la détresse de Calya. Au bout de quelques minutes qui lui paraissaient être interminables, Azurtan finissait par répondre.

— Je suis un demi-dieu.

Il avait dit cela sur un ton glacial. Níniel ramenait les mains sur sa bouche, étouffant un cri de surprise. Les yeux écarquillés, Calya restait muette.

— Un demi-dieu ? s'exclama un Elfe.

— Je n'y crois pas ! répondit un autre.

— Silence ! ordonna Thalion avant de se retourner vers Azurtan. Fils d'un dieu, réellement ?

— Pourquoi mentirais-je sur ma vraie nature ? répliqua-t-il d'un ton brusque.

Thalion grimaçait. Il se retournait vers son peuple, balayant la foule du regard, à la recherche d'une personne en particulier.

— Idríl ! Apporte-moi le Verition.

Les sourcils froncés, Calya s'apprêtait à demander à Níniel ce qu'était le « Verition » lorsqu'elle se retournait rapidement vers elle.

— Oh ! Cela n'annonce rien de bon, lui confia-t-elle d'une petite voix. Le Verition est une sorte de sérum de vérité extrêmement puissant. Thalion est certain que le chasseur lui ment.

Calya pressait d'un geste brusque ses mains contre son visage. Azurtan disait malheureusement la vérité. Comment pourrait-il le prouver sans être influencé par le Verition ? Au même instant, la jeune fille croisait le regard d'Azurtan. De la peur se reflétait dans pupilles. Elle aurait tant aimé pouvoir le rassurer.

Quelques instants plus tard, Idríl revenait avec un objet rond en argent dans les bras. D'une démarche drôlement assurée, il faisait face à Azurtan. Rapidement, Idríl insérait l'aiguille sous sa peau, sans qu'il ait le temps de réagir. De toute façon, Azurtan était bien trop épuisé pour lutter, de plus, il disait la simple vérité, il n'avait alors aucune raison de se battre.
Consciente que Calya était en proie à une solitude qui ne laissait guère place au doute, Níniel lui jetait un faible coup d'œil avant de lui tapoter gentiment l'épaule, comme pour la rassurer. Elle semblait vraiment être aussi affectée que Calya par la scène qu'elle voyait.

— Apparemment, cela ne fait pas mal.

Les mains à présent vides, les prunelles d'Idríl rencontraient par le plus grand des hasards celles de Calya, qui sentait immédiatement le poids de son regard peser sur elle.

— Bien, nous pouvons reprendre notre discussion, ajouta Thalion. Cela fait désormais un siècle que je n'ai plus entendu parler de dieux. Qui sont dont tes parents ?

— Mon père n'est qu'un simple Humain. Ma mère, elle, est plus connue sous le nom de Svana, la déesse du bleu.

Azurtan semblait s'être débarrassé d'un poids qui l'empêchait de respirer. Ses épaules s'affaissaient. Des chuchotements fusaient dans la salle. Voilà ce qui expliquait définitivement la couleur naturelle de ses cheveux ainsi que l'origine même de son prénom !

— Je ne peux y croire, rétorqua Thalion dans un souffle. Autrefois, j'ai connu votre mère, elle m'a toujours impressionné de part de sa grandeur mais aussi de sa beauté. Sa peau bleue comme vos cheveux lui donnait un charme...

— C'est répugnant comme histoire, soupira Idríl.

Tous les autres Elfes écoutaient attentivement Thalion.

— Il y a bien des années qui se sont écoulées depuis que je l'ai vue.

— Elle est morte depuis, trancha Azurtan sans monter la moindre émotion.

Une nouvelle fois, Calya rencontrait par hasard le regard d'Idríl... et c'est elle qui détournait la tête. Curieuse d'en connaître davantage sur les géniteurs d'Azurtan, elle lui dévouait son attention la plus sincère. Il peinait à tenir sur ses pieds. Il manquait cruellement de sommeil et cela se voyait terriblement. Il était en train de tourner de l'œil.

— Que lui est-il arrivé ? interrogea Thalion sans parvenir à dissimuler son chagrin.

— Elle a été assassinée par une Chimère.

Calya ne pouvait plus rester là. Ils perdaient un temps considérable à discuter, au fond d'elle, ses pensées se tournaient vers Hermine. Ça devait être elle sa priorité et rien d'autre ! Contre toute attente, lassée par cette cérémonie qu'elle ne jugeait guère nécessaire, la jeune fille se levait. Brusquement, elle se dirigeait vers la porte sous les regards interrogateurs des autres. Lorsqu'il la remarquait, la voix de Thalion résonnait, lui demandant quelles étaient ses intentions. La jeune fille laissait sa colère éclater.

— Cet interrogatoire ne sert pas à grand-chose, il ne nous avance en rien, affirma-t-elle en fixant Azurtan. Le sérum de vérité n'était d'aucune utilité étant donné qu'Azurtan a toujours dit la vérité.

Thalion était forcé d'admettre que la jeune femme venait de marquer un point. Quelques chuchotements s'élevaient autour d'elle. Les Elfes semblaient désorientés.
D'un geste rapide, Idríl se rapprochait d'elle. Les bras croisés, Calya ne lui accordait pas la moindre attention. Elle voulait simplement quitter la salle. Alors qu'elle tentait d'esquiver Idríl, elle se retrouvait prise au piège dans l'étau de ses bras. Une sensation nouvelle lui faisait détourner le regard de la porte qu'elle convoitait tant. Un violent pique d'électricité forçait l'Elfe à s'éloigner d'elle. Il se massait lentement le bras, là où leurs peaux avaient été en contact. Calya se redressait lentement, manquant de peu de perdre son équilibre.

— Ne me retouche plus jamais ! grogna-t-elle en le fixant.

Níniel se précipitait vers elle alors qu'Azurtan cherchait de nouveau à croiser son regard. Préférant garder ses distances avec Idríl, Calya retrouvait son calme. Thalion se retournait vers la jeune fille.

— Allons, ne compliquons pas la situation. Je sais le nécessaire. Je vous rends votre chasseur. Vous pouvez partir dès à présent.

Comme pour confirmer ses paroles, il s'en allait vers Azurtan, lui brisant la corde autour de ses mains. Le garçon se précipitait aussitôt vers Calya, qui l'accueillait avec un simple sourire. Elle qui s'était grandement méfiée de Thalion, finalement voyait qu'elle pouvait lui faire confiance. C'était un homme de parole.
Thalion enlaçait un instant son neveu et sa nièce, sous les regards compatissants de Calya et Azurtan, qui ne pouvaient s'empêcher de repenser aux personnes qu'ils aimaient.
Les larmes aux yeux, Níniel menait la marche tandis que son frère refermait la porte.

LE ZOO FAIRY : Une nouvelle ère Où les histoires vivent. Découvrez maintenant