40 - L'abri

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Par un heureux hasard ou bien le coup du destin, le souffle coupé, Idríl et Lokri trouvaient l'appartement d'Hildegarde.

— Ida ! s'écria Lokri.

Les larmes coulaient silencieusement sur ses joues. Il se précipitait vers elle pour la délivrer. Il aidait aussitôt Níniel tandis qu'Idríl balayait rapidement la pièce du regard, à la recherche d'une seule personne. Il se figeait brusquement sur place, lorsqu'il distinguait Azurtan. Son regard était ensuite attiré par Hildegarde et Calya à côté d'elle. Aucune des deux ne bougeait. Une marre de sang rouge et noir recouvrait le sol. C'était une vraie scène de carnage.

Idríl se précipitait vers Calya. Le cœur cognant contre sa poitrine, il observait ses nombreuses blessures. Non. Elle ne pouvait pas être morte. Ce n'était pas de cette façon qu'il avait envisagé le plan.

Contre toute attente, la jeune fille semblait sentir sa présence. Elle reprenait peu à peu ses esprits. Qu'elle n'était pas sa surprise lorsqu'elle distinguait Idríl penché au dessus d'elle. Il était en train de lui faire un garrot sans avoir pris conscience qu'elle venait tout juste de se réveiller. Elle avait comme l'impression qu'elle était en train de rêver. Était-elle morte ? Pourtant il semblait drôlement réel.

— Elle est vivante ! hurla Lokri, fou de joie.

Idríl verrouillait aussitôt ses iris avec les siennes. Calya tentait de lui sourire lorsqu'il passait sa main sur sa joue. Là, il s'autorisait de nouveau à respirer, soulagé et réellement heureux de la savoir en vie.
Encore sous le choc par ce qu'elle venait de vivre, Calya s'accrochait désespérément à sa main.

— C'est terminé... elle est morte.

— Je sais, répondit-il en lui caressant tendrement la joue. On doit te sortir de là.

Ida et Lokri se rapprochaient lentement d'eux. D'un commun accord et malgré leur différence de taille très flagrante, Lokri et Idríl aidaient Calya à se redresser en la soutenant chacun par une épaule. Elle ne pouvait pas s'empêcher de gémir de douleur, à cause de ses côtes endolories et de la plaie sur son abdomen. Elle était si épuisée qu'elle ne pouvait pas faire le moindre mouvement.
Une explosion retentissait non loin d'eux ; le laboratoire d'Hildegarde était sur le point exploser. La jeune fille réprimait un frisson. Elle était frigorifiée.

— Calya, ne t'endors pas. Focalise-toi sur le son de ma voix, chuchota Idríl.

Une chaleur soudaine se répandait dans tout son corps. Une lumière les aveuglait. Calya ouvrait lentement les yeux pour voir d'immenses flammes s'élevaient partout autour d'elle. À présent, la chambre d'Hildegarde était en train de brûler. Son cadavre serait à jamais oublié.

Ils se retrouvaient précipitamment dans le couloir, la fumée les empêchant de respirer convenablement. Une autre explosion résonnait. Ils toussaient à plusieurs reprises. Marchant aléatoirement, ils ne voyaient plus grand-chose. La chaleur n'avait de cesse d'augmenter. La panique était en train de gagner les garçons.
Ils n'étaient plus qu'à quelques mètres de la sortie. Idríl et Lokri accéléraient la cadence. Bientôt, en quittant l'Abri dans un énorme nuage de fumée, ils retrouvaient la lumière du jour. Níniel se frottait les yeux en tentant de retrouver ses repères.

Subitement, Calya trébuchait sur quelque chose de dur avant de s'étaler sur le sol en entraînant les garçons avec elle. À bout de force, elle se redressait lentement en grimaçant, puis elle jetait un coup d'œil à la cause de sa chute. Un corps gisait actuellement devant eux.

Lokri s'avançait maladroitement vers le défunt avant de brusquement se figer sur place. Décontenancé, c'est à peine s'il osait regarder Calya dans les yeux. Hébété, penaud et troublé à la fois, il mettait plusieurs instants avant de revenir à lui-même. Inquiète, Ida se rapprochait aussitôt de lui. Sauvagement, elle plaquait les mains sur son visage en poussant un cri d'exclamation, attirant l'attention de plusieurs personnes alentours.
Ébranlés et inquiets, Idríl et Níniel se jetaient un regard d'épouvante.

— Que se passe-t-il ? demanda Idríl en se massant les côtes.

— Amène Calya.

Il ne posait guère plus de questions. Il savait que c'était grave. En s'efforçant de garder son calme, il l'aidait à se relever.
Calya avait comme un mauvais pressentiment tandis qu'ils s'approchaient de la silhouette. Troublée, c'est alors qu'elle découvrait le corps sans vie d'Hermine. Elle était là, allongée sur le sol. Les lèvres entrouvertes, ils pouvaient tous observer un liquide vert couler le long de ses joues. En ce mois d'octobre, plus aucun doute ne leur était permis, la jeune Humaine était bel et bien morte.

Inconsolable et le souffle coupé, Calya se penchait lentement vers son amie de toujours. Les yeux remplis de larmes, découragée, elle priait pour que sa poitrine se relève de nouveau. Désespérée, elle était forcée de reconnaître qu'ils arrivaient trop tard. Elle éclatait brusquement en sanglots, sous les regards peinés de tous ses amis.

— Hermine...

Comme elle s'y attendait, pas de réponse de sa part. Idríl ne pouvait plus supporter de rester là sans agir. Voir Calya dans cet état lui déchirait le cœur. Il avait l'horrible impression qu'on lui enfonçait pleins de flèches partout dans le corps, comme si ses organes se tordaient un à un de douleur. Une lame invisible et pourtant réelle était en train de pénétrer son cœur de pierre. C'était bien la première fois qu'il ressentait ce genre de sensation. La gorge soudainement devenue sèche, il hésitait un bref instant avant de se pencher vers la jeune fille, qui inconsciemment, provoquait en lui ce mélange de sentiments qu'il ne parvenait pas à définir.

Dans l'incapacité totale de détacher ses iris de son corps, Calya continuait de dévisager Hermine. Sans qu'elle ne puisse réagir, deux mains se glissaient avec beaucoup de délicatesse et de tendresse sous ses aisselles. Là, Calya se sentait soulevée. Précautionneusement, Idríl la calait contre son épaule du mieux qu'il le pouvait, sous les œillades attendries de leurs amis.

La fumée l'empêchait de retrouver son chemin. C'est donc Níniel qui prenait avec courage la tête de la marche. Lokri, lui, n'abandonnait pas Hermine qu'il traînait sur le sol avec l'aide d'Ida.

Alors qu'ils se hâtaient vers la sortie du Zoo, de nombreux autres corps gisaient sur le sol. Par la même occasion, Calya observait que tous les enclos étaient ouverts. Aisément, elle devinait que les autres avaient réussi leur mission.
Ne pouvant plus lutter davantage, désorientée et épuisée, Calya fermait les yeux.

LE ZOO FAIRY : Une nouvelle ère Où les histoires vivent. Découvrez maintenant