Une fois séchée, Calya se rhabillait avant de rejoindre ses amis au coin du feu. Elle se frayait un chemin parmi plusieurs Chevaux en train de brouter. Elle sentait la fatigue gagner son corps lorsqu'elle s'asseyait entre Oryon et Ida.
— Tu manges un petit bout ? demanda Ida.
Calya grignotait sans décrocher le moindre mot. Elle n'avait de cesse à repenser à ce qu'il venait de se passer avec les Mazarkills. Elle se rendait compte que quelque chose chez Idríl avait changé. Il n'était vraiment pas au meilleur de sa forme depuis cet événement. Il passait devant eux sans leur jeter le moindre regard. Étrangement, Calya se faisait du souci pour lui.
— Comment va ton frère ? lui demanda Oryon.
— Il est un peu chamboulé. Je pense que ça ira mieux demain, acquiesça Níniel.
Calya profitait de cet instant pour se retirer et se mettre à l'écart. Elle s'allongeait dans un coin paisible. Recroquevillée, elle buvait quelques gorgées d'eau tandis que le vent venait lui caresser les cheveux comme un vieil ami. En fixant le ciel, elle s'abandonnait complètement au sommeil.
Un bruissement dans la forêt la tirait aussitôt du sommeil. Malheureusement pour elle, elle avait encore rêvé de la mort d'Azurtan. Consciente d'avoir fait un cauchemar, elle se redressait lentement. Tous ses muscles étaient crispés. En dépliant ses mains, elle ressentait une vive douleur dans la nuque. Le vent continuait de lui souffler dans les cheveux alors qu'elle passait ses doigts frais sur son visage en soupirant.
Ne souhaitant plus dormir, de peur de refaire un mauvais rêve, Calya se relevait pour se dégourdir les jambes. Admirant les étoiles brillez, elle se rapprochait du lac. La nuit était calme et paisible, du moins, jusqu'à ce qu'un cri vienne la perturber.
Aussitôt, Calya se figeait sur place. Rapidement, elle balayait les alentours du regard avant de se rendre compte qu'une silhouette venait de se redresser. Affolée, elle faisait un bond en arrière, se glissant brusquement dans un buisson. Son cœur s'accélérait tandis qu'elle plaquait ses mains sur ses lèvres, de façon à ce qu'on ne puisse pas l'entendre respirer. Pendant plusieurs minutes, paniquée à l'idée de devoir faire face à un Mazarkill, elle restait cachée dans le feuillage.
La silhouette venait de disparaître. Après s'être assurée qu'elle ne courrait aucun danger, elle sortait de sa cachette en restant tout de même sur ses gardes. Curieuse, ses pieds la menaient jusqu'à l'endroit où elle avait vu la mystérieuse silhouette. Peut-être était-ce Cassiopée ?
Quelle n'était pas sa surprise lorsqu'elle découvrait Idríl dormir ! Sans savoir pourquoi, elle s'approchait lentement de lui. Dans son sommeil, il avait un mouvement brusque accompagné d'un gémissement de détresse. Calya observait alors que les traits de son visage étaient tous tirés. Il se recroquevillait brusquement. Ses lèvres remuaient et il prononçait toutes sortes de paroles que la jeune fille ne parvenait pas à comprendre. Inquiète, elle s'agenouillait à ses côtés. Elle était décidée à le réveiller. Doucement, elle posait sa main sur son épaule avant de le secouer.
Il parlait d'une voix étouffée. Calya n'hésitait pas à le secouer plus violemment.
Soudain, comme si l'on venait de lui hurler dans les oreilles, Idríl rouvrait précipitamment les yeux. Il éclatait en sanglots tandis que Calya faisait un pas de recul. Par manque de chance, elle marchait sur une branche qui craquait. Interrompu par ce drôle de bruit, Idríl se figeait sur place en retenant sa respiration. Calya n'aurait jamais pensé le voir pleurer un jour. Elle devait le reconnaître, le fait de le voir dans cet état, lui révélait une nouvelle facette insoupçonnée de sa personnalité.
— Qui va là ? interrogea-t-il, les sourcils froncés.
La jeune fille ne pouvait plus fuir.
— C'est Calya.
Que faisait-elle là ? Interloqué, il fronçait les sourcils. Un malaise se créait entre eux. Grâce à sa faculté de voir dans le noir, Calya le dévisageait un instant afin d'observer dans quel état d'esprit il se trouvait. On aurait dit qu'il était à la fois gêné et soulagé. Il séchait rapidement ses larmes d'un revers de manche.
— Pourquoi es-tu là ?
— Tu faisais un cauchemar, répondit-elle d'une petite voix.
Idríl ne répondait pas. Il orientait le regard vers ses mains qu'il s'amusait à plier puis à déplier. Il n'avait visiblement pas conscience que Calya le regardait faire. Comme pour chasser les dernières images de son cauchemar, il se passait les mains sur le visage. Calya se sentait de trop, elle décidait de le laisser se reposer. Elle-même se demandait pourquoi elle restait près de lui, alors qu'ils ne s'étaient jamais appréciés et ne s'en étaient jamais caché.
— Calya ? l'appela-t-il contre toute attente.
La jeune fille se figeait. Dos à lui, elle ne bougeait plus.
— Merci de m'avoir réveillé.
Sa voix se brisait. En posant une nouvelle fois ses yeux gris sur lui, Calya remarquait qu'il était exténué. Elle restait muette.
— Si tu es là toi aussi, je suppose que c'est parce que tu en as fait un ?
Idríl avait vu juste.
— C'était à propos d'Azurtan, confia-t-elle d'une petite voix.
Un nouveau silence se glissait entre eux. Idríl orientait son regard vers les étoiles.
— As-tu déjà senti cette sensation d'étouffer ? Ce sentiment que quelque chose de cassé prend une place considérable en toi... cette désagréable impression, que quoi tu fasses, tu ne pourras jamais combler ce vide qui te ronge chaque jour un peu plus... ce souvenir affreux qui tourne en boucle dans mon esprit. Je ne parviens pas à m'en détacher. Dis-moi que tu comprends ce que je ressens, par pitié, dis-moi que je ne suis pas le seul dans ce cas.
L'Elfe venait de lui ouvrir son cœur. Calya, bien consciente de ses efforts, restait stupéfaite par sa révélation. Malheureusement pour lui, la jeune fille ne le comprenait que parfaitement. Quelque chose en elle s'était brisé à la mort d'Azurtan, quelque chose que jamais personne ne pourra réparer. Calya devrait apprendre à vivre avec un cœur en mille morceaux.
Idríl cherchait en vain son regard.
— Je crois bien que je te comprends plus que ce que j'avais pu imaginer. À la mort d'Azurtan, j'ai senti quelque chose de lourd s'abattre sur moi. Je crois qu'on ne se remet jamais vraiment de la perte d'un être cher. Depuis, ce poids, je l'ai constamment avec moi. Je ne parviens pas à m'en libérer. Parfois, j'ai l'impression de ne plus pouvoir respirer correctement à cause de cette chose qui menace de me rendre folle.
— J'ignorais que tu ressentais ça aussi.
— Il y a bien des choses que tu ignores à mon sujet, déclara-t-elle.
Pour le coup, sa remarque détendait l'atmosphère. Idríl rigolait doucement, emportant avec lui Calya. C'était la première fois qu'ils se découvraient leurs rires.
— Je suis content que ce soit toi qui m'ai réveillé. Ma sœur m'aurait posé mille et une questions à ta place. Je n'aurais pas aimé qu'elle me voie dans cet état si fragile.
— Tu sais, pleurer ne fait pas de toi quelqu'un de faible. C'est même très libérateur !
— Mes parents m'ont depuis toujours, interdit de pleurer. Je n'ai pas été élevé comme toi, qui as reçu une éducation purement Humaine. Ah les Humains, ces êtres qui se prônent supérieurs...
Comme il pouvait l'agacer !
— Franchement, Idríl, ça t'arrive d'être sympa parfois ? Non parce qu'à t'entendre parler, je ne suis rien d'autre qu'une faible ! Tu es vraiment un idiot !
Sans attendre de réponse de sa part, elle regagnait l'endroit où elle s'était installée pour dormir.
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LE ZOO FAIRY : Une nouvelle ère
FantasyEn l'an 4444, les Humains se proclament être les plus forts de la planète. Ils dominent largement les autres Créatures et les privent de leur liberté : ainsi est né Le Zoo Fairy. Un événement marque le tournant de sa nouvelle vie : une Nymphe est ca...