- Tu as passé une bonne journée ?
En entendant le son de ma voix, Patrina sursaute dans un bruit de talonnettes et je ne peux réprimer un sourire face à sa surprise.
Enfin une réaction !
Alors je pose les documents sur la table et me retourne, pressée de voir de quoi elle a l'air. Sauf que la photographe se reprend trop vite.
Ses lunettes noires me font face, mais aucun trait d'émotion ne déforme son visage passif.
Ah le jour où elle craquera elle, il y aura eut un meurtre !- Oui... fait-elle finalement de sa voix neutre.
Et elle retourne à son silence.
Oh, je dois dire que ça ne me dérange pas plus que ça.
Au moins sait-elle se montrer discrète et tempérée, les deux meilleurs qualités pour une journaliste selon moi. Et puis tant qu'elle sert bien ma cause, je ne lui en demande pas plus.Considérant sa réponse suffisante, la photographe se retourne pour faire quelques pas vers la porte. La poignée dans la main, elle se fige cependant son geste pour rajouter dans sa barbe :
- Vous savez, vous êtes la première à me poser cette question dès le premier jour.
Je la dévisage un moment, puis elle finit par se retourner.
- Oh... relevé-je en inclinant la tête de quelques degrés. ...j'en fais trop c'est ça ?
Fidèle à elle-même, elle ne répond rien. Mais ma remarque arrive quand même à adoucir ses traits, une grande victoire déjà !
- Ça va, j'ai compris, rigolé-je en balayant mon commentaire de la main. Depuis combien de temps travailles-tu ici ?
- Sept ans, murmure-t-elle platement.
- Et en sept ans personne ne t'as jamais demandé comment tu allais dès le premier jour ? répété-je, indignée.
Patrina hoche lentement la tête de bas en haut, d'une formidable insensibilité.
- Eh bien, au moins tu te souviendras de moi ! déclaré-je avec un sourire.
Et elle approuve d'un léger signe de tête avant de s'incliner, puis quitte la pièce en silence.
Quand la porte claque derrière elle je retourne distraitement à mes papiers sur l'histoire du pays, plus légère de cet échange.
Elle reste impassible, mais je crois que je commence à l'avoir cette photographe.
ღ ღ ღ
Après quelques tours de chambre, je finis par pousser un long soupire.
J'ai dîné, j'ai pris ma douche et je suis crevée. Ce serait un parfait moment pour gager mon lit et m'assoupir.
Mais mon corps fait de la résistance. Dans mon large pyjama noir, je me sens obligée de bouger. La nuit est tombée il y a seulement quelques heures, il est trop tôt pour dormir !L'écran allumé de la télévision remplit la chambre de lumières bleutées, et son sons rebondit contre les murs sans que je n'y prête attention.
L'émission de ce soir est passée, satisfaisante. Je peux me réconforter d'avoir fait bonne impression. Je ne compte peut-être pas parmis les favoris, mais je suis surtout loin des derniers. Je ne serai donc pas éliminée demain.
Non, Gabrielle va rester au moins la prochaine semaine. Avec avec des alliés de béton en plus !Curieusement, m'en voilà presque enthousiaste.
Cette après-midi a été longue. On a encore joué à ces jeux de présentation pour en apprendre plus sur les autres sans vraiment en avoir envie.
Corentin n'a pas de dents de sagesse -du moins ne sont-elles pas sorties du haut de ses vingts-ans- , Adama a donné des boucles d'oreilles en diamant qu'elle a reçu pour un anniversaire à des œuvres caritatives il y a quelques années, Juliette peint depuis trois ans, Louise a déjà sauvé deux vies, Capucine connaît ses tables de multiplications jusqu'à vingt et Eliam a faillit s'étouffer avec un noyau d'abricot dans sa jeunesse.
Oh oui, passionnantes les vies de mes concurrents...
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Best's game
Fiksi RemajaÇa n'aurait dû être qu'un défi avec son frère. Un nom inoffensif, un sourire faux, des couettes dressées sur sa tête... comme si Gabrielle se faisait des couettes ! Sauf que c'est son nom qui a été sélectionné. Alors elle doit y aller. Passer des...