17~ Appelez-moi Tell, Gabrielle Tell

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"Sport de raquette ou tir ?"
Comme si cette question avait lieux d'être. Voilà enfin de quoi me faire remarquer ! Je commençais à désespérer à force.

Mes muscles encore endoloris par la séance de musculation du matin frémissent à cette idée. Oh oui, mon corps entier a envie de retrouver cette sensation d'adrénaline qui me faisait vibrer quand je tirais. C'était un moyen de survivre au départ, c'est devenu le plus important de mes loisirs.
Et je m'aperçois que même encore engourdit, mon corps n'attend que ça.

Il n'est soudainement plus fatigué. Pourtant je l'ai maltraité !

D'accord, le matin temps libre et l'agréable après-midi en ville d'hier l'ont peut-être reposé. Mes muscles n'étaient plus courbaturés pour l'activité de ce matin, sauf que je n'ai pas pu être raisonnable pour la musculation.
Mais j'ai bien fait ! Eliam qui pariait sur le nombre de poids que j'arriverai à soulever avec mes "bras de coton" s'est rapidement tut devant mes miracles. Une bonne revanche sur la défaite qu'il m'a infligée avant hier !

Alors, pas le moins du monde inquiète, je vais prendre ma place dans le groupe de sports de tir. Et j'ai la surprise de voir que le prince me rejoint.
Je ne m'y trompe pas, il veut encore se moquer. Et il va à nouveau se prendre mon talent en pleine face ce naïf, songé-je en lui souriant.

Mais Corentin, lui, ne vient pas.
Oh ça peut être une simple coïncidence... il est peut-être doué en sport de raquette après tout ?

... arrête tes conneries Gabrielle. Tu sais bien que même si il jouait au tennis depuis ses quatre ans, Corentin serait venu dans ton groupe avant la course.
Son regard fuyant veut tout dire, il ne veut plus de moi.

J'ai sans doute trop forcé sur le lien qui nous unissait. Il n'était pas si solide que ça finalement... Ou n'avait-il simplement pas lieux d'être ? 

Quoi qu'il en soit, le garçon est parti. Et je ne peux pas lui en vouloir. Je suis dangereuse, je ne suis pas faite pour des gens comme lui. Il fait partie des gentils et moi des méchants, c'est aussi simple que ça.

Mais pour une raison que je ne saurais expliquer, je n'arrive pas à le lâcher. 

Alors je me dis que si il choisit l'autre groupe aujourd'hui, c'est peut-être parce qu'il a peur de me voir à l'œuvre. Parce qu'il a peur de voir ses soupçons se vérifier. Parce qu'il a peur d'imaginer des hommes à la place des cibles que je dégommerai, d'imaginer du sang à la place des éclats de bois qui gicleront.
Oui c'est ça, il doit fuir ce que j'étais avant le Best's Game... pas moi.

Je ne sais pas pourquoi je m'attarde sur ça, mais je me tanne tout de même de respecter son choix. Il a été gentil avec moi, je lui dois bien ça, non ?

Et Louise et Capucine ne viennent pas non plus dans mon groupe, ce qui parvient à me mettre mal à l'aise. Ce n'est qu'une histoire de choix de sport ou de choix d'ami finalement ?

Oh mais merde Gabrielle ! T'as toujours été seule, pourquoi tu t'invente des amis maintenant ? Vas dégommer tes cibles, impressionne-les tous, reste ces trois foutus semaines et tais-toi !
Il est hors de question que je me laisse perturber pour des conneries alors je secoue la tête pour m'éclaircir les idées.
J'ai compris, c'est chacun son camps à partir de maintenant.

— Carabine, arc, pistolet, poignards,... énumère un gros bonhomme quand nous entrons dans le domaine de tire. Choisissez votre arme participants !

Et tandis que les autres avancent vers les tables pour s'exécuter, je reste en retrait. J'entreprends de regarder autour de moi, détaillant l'environnement d'un œil averti pour mettre toutes les chances de mon côté.

Nous sommes en plein air, en plein journée. Mais si ce n'est pas mes conditions habituelles de tir, je devrais réussir à m'adapter. Les rayons du soleil sont arrêtés par les arbres qui bordent les murs du terrain, ils ne me gêneront donc pas.
C'est un très bon point ça.

L'ère de tir est séparée en plusieurs espaces disctincts. Des cibles en paille peintes, de faux animaux, une cage pleine de ballons et des tables supportant cartons, boites et allumettes sont mises à notre disposition.
Tout est espacé, le domaine est grand. Je commence à ne plus m'étonner de ce que nous réserve le Palais.

— Eh bien, ça te fait peur ? commente une voix mutine dans mon dos.

Je sursaute avant de reconnaître celui qui vient encore m'importuner. Et ce n'est pas pour autant que je décrispe mes muscles.

— Oh non j'ai compris, reprend le prince en s'arrêtant à coté de moi. Si tu n'avance pas c'est parce qu'il n'y a pas de fléchettes ! Tu es déçue ?

Et malgré toute la force que je mets à rester indifférente, sa remarque réussit à m'arracher un sourire. Oh, pourtant ce n'est pas drôle. Depuis quand je me laisse aller comme ça, moi ?

— Pas besoin de fléchettes pour te mettre la raclée, répondis-je en me tournant vers lui.

Un courant d'air passe sur mon visage et caresse mes cheveux sous cet angle, mais rien ne me perturbe du regard que j'échange désormais avec sa Majestée.

— J'aimerai bien voir ça, ricane-t-il.

Alors je me détache de lui pour faire quelques pas en avant.

— Tu ne devrais pas sous-estimer les autres comme ça, remarqué-je en attrapant un poignard posé négligemment sur la table d'appoint.

Je le soupèse distraitement tout en avançant vers le pas de tir puis lance un regard au garçon qui me suit.
Il n'a que ça à faire ?

— Oh, je ne te sous-estime pas... minaude-t-il. 

Et son air sérieux arrive à me faire froncer légèrement les sourcils. Que sous-entend-t-il ?

— ... je te provoque.

Ah ouai ?

Sans prévenir, je me retourne d'un coup pour lancer le couteau en avant. Et même sans avoir visé la cible, le voilà qui atterrit en plein centre du cercle jaune.

En plein cœur, comme toujours.

— Alors ? chuchoté-je au prince d'un sourire doucereux. C'est assez bien ?

Ses pupilles s'agrandissent un peu sous la surprise, mais ça reste mesuré. Comme toutes ses réactions d'ailleurs, il a un bien trop grand contrôle sur lui-même ce type.
Puis après avoir bien analysé la cible il retourne la tête vers moi, le regard plus aiguisé qu'avant.

— Tu peux en faire combien comme ça ? demande-t-il d'une voix pleine de défit.

Je prends un autre couteau pour le lancer juste à coté du précédent, sans un effort de plus.

— Autant que je veux, affirmé-je en me retournant vers le prince.

Lui qui hoche la tête en souriant, les yeux plissés d'amusement.

— Crâneuse va...

Et c'est plus fort que moi, je ris avec lui.
Oh, l'aprèm s'annonce de plus en plus agréable !

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